LIGANDS DU REPRESSEUR MYCOBACTERIEN EthR, PROCEDES DE SELECTION ET APPLICATIONS
La présente invention se rapporte au domaine de la recherche de nouveaux médicaments pour le traitement des infections mycobactériennes, notamment la tuberculose et la lèpre. Plus précisément, l'invention concerne des procédés de sélection de composés capables de se lier au répresseur mycobactérien EthR, cette liaison l'empêchant de réprimer l'expression du gène mycobactérien ethA codant un activateur de l'éthionamide (ETH). La présente invention s'intéresse également aux composés ainsi sélectionnés, ainsi qu'à leurs applications pour la prophylaxie et/ou le traitement des infections mycobactériennes. L'on estime à l'heure actuelle qu'environ 7 à 8 millions de personnes contractent la tuberculose chaque année. Environ 50 millions de personnes sont actuellement infectées par des souches de
Mycobactθ um tuberculosis multi-résistantes aux antibiotiques. De telles souches sont en particulier résistantes à la fois à l'isoniazide (INH) et à la rifampicine (RIF), les deux antibiotiques de première ligne (i.e., dont l'indice thérapeutique, représentant le rapport dose toxique / dose thérapeutiquerest-élevé)-utilisés-pouriraiterla-tuberculose (Espinal e 'a/:,
2001 ). Ces patients sont donc soumis à un traitement à l'aide de composés de seconde ligne (i.e., dont l'indice thérapeutique est plus faible), moins actifs, plus chers et ou plus toxiques ( ahmoudi et Iseman, 1993). L'antibiotique de seconde ligne ethionamide (2-éthyl- thioisonicotinamide, ETH, Trescatyl) est utilisé en clinique depuis plus de 35 ans. Il est associé à des troubles gastro-intestinaux et une hépatotoxicité importants. Sa prescription est dès lors limitée essentiellement au traitement de patients qui rechutent du fait de souches de M. tuberculosis résistantes aux antibiotiques de première ligne, ou au
traitement de patients présentant une lèpre lépromateuse, en remplacement de la clofazimine (Jenner et Smith, 1987). L'ETH est un analogue structural de l'INH. ETH et INH sont des prodrogues qui doivent être converties en composés actifs par des enzymes mycobactériennes spécifiques (Baulard et a , 2000). Ces deux antibiotiques inhibent la biosynthèse des acides mycoliques, constituants essentiels de la paroi mycobactérienne. Ils ont tous deux pour cible l'enzyme énoyl-AcpM réductase (InhA). Cependant, le mécanisme d'action de ces deux antibiotiques suivent des voies métaboliques différentes : l'INH est activée par la catalase peroxydase KatG, alors que l'activation de l'ETH est dépendante de l'enzyme EthA. Dès lors 95% des souches résistantes à l'INH restent sensibles à l'ETH. Une autre différence majeure entre ces deux antibiotiques résident dans leur concentration minimale inhibitrice respective (CMI). Afin d'assurer des concentrations d'ETH dans les fluides corporels en excès par rapport à la CMI in vitro (2,5 μg/ml), il est recommandé d'utiliser des dosages quotidiens de 10 mg/kg (Johnston et al., 1967), soit 5 fois plus que le dosage recommandé pour l'INH. Récemment, les gènes ethA et ethR impliqués dans l'activation de la prodrogue ETH ont été identifiés (Baulard et al. 2000, DeBarber et a , 2000). EthA est une enzyme contenant du FAD qui catalyse en deux étapes l'activation de l'ETH (Vannelli et al. 2002). L'expression d'ethA est placée sous le contrôle du gène adjacent ethR, dans la mesure où la surexpression d'ethR conduit à une résistance à l'ETH et où l'inactivation chromosomique d'ethR est associée à une hypersensibilité à l'ETH, révélant par là-même que toutes les molécules d'ETH ne sont pas activées in vitro chez les mycobactéries de type sauvage. La présente invention vise à fournir des moyens qui permettent une activation plus efficace de l'ETH par les mycobactéries. Ainsi, grâce aux
moyens selon l'invention, il est désormais possible d'optimiser l'efficacité thérapeutique de l'ETH en réduisant les dosages à administrer aux patients et, partant, en réduisant les effets secondaires liés à l'administration de cet antibiotique selon les protocoles actuels. Selon un premier aspect, la présente invention fournit des procédés de sélection de composés qui agissent comme ligands du répresseur EthR, et qui, lorsqu'ils sont liés audit répresseur, empêchent ce dernier de réprimer l'expression du gène ethA.. Dans ce qui suit, ces composés seront également appelés « inhibiteurs du répresseur EthR ». Dans le cadre de l'invention, l'on entend par « sélection d'un composé » le fait que l'on choisit de retenir et d'utiliser ce composé parce qu'il présente la propriété d'intérêt recherchée : c'est un inhibiteur du répresseur EthR, autrement dit en l'espèce, comme indiqué ci-dessous, il présente la capacité, en se fixant au répresseur EthR, d'empêcher ce dernier de réprimer l'expression du gène ethA. Les formules « composé qui agit comme ligand du répresseur EthR » ou « ligand du répresseur EthR » sont équivalentes et désignent un « composé capable de se lier au répresseur EthR ». Dans la mesure où le composé en question bloque l'activité du répresseur EthR en l'empêchant de réprimer l'expression du gène ethA, ce composé sera également, et de manière équivalente aux formules précédentes, appelé « inhibiteur du répresseur EthR » ou « inhibiteur de EthR ». Dans le présent contexte, un « composé » peut être n'importe quel type de molécule, biologique ou chimique, naturelle, recombinante ou synthétique. Par exemple, un composé peut être un acide nucléique (e.g., un oligonucléotide sens ou antisens tel qu'un ARN antisens), une protéine, un acide gras, un anticorps, un polysaccharide, un stéroïde, une purine, une pyrimidine, une molécule organique, un radical chimique, etc.. Le terme « composé » couvre également les fragments, dérivés, analogues structurels ou combinaisons de ceux-ci, dès lors qu'ils possèdent la
capacité, en se fixant au répresseur EthR, d'empêcher ce dernier de réprimer l'expression du gène ethA. Cette capacité représente la propriété d'intérêt que doivent -présenter les composés sélectionnés par la mise en œuvre des procédés objets de la présente invention. L'on entend ici par « réprimer », le fait de diminuer, réduire, décroître, réguler négativement, inhiber, bloquer, prévenir, empêcher. A contrario, l'on doit comprendre par « activer », le fait d'augmenter, accroître, réguler positivement, promouvoir, améliorer, stimuler. Selon un premier mode de réalisation, un procédé de sélection tel que visé par la présente invention comprend au moins (procédé A) : a) le clonage du gène codant ledit répresseur EthR sur un premier plasmide d'expression recombinant, et le clonage d'au moins la région promotrice et opératrice du gène ethA en amont d'un gène rapporteur sur un second plasmide d'expression recombinant ; b) la transformation d'une cellule hôte recombinante avec au moins les plasmides selon l'étape a) ; c) la culture de ladite cellule hôte recombinante en présence d'un composé candidat ; d) la mesure du niveau Ni d'expression du gène rapporteur en présence dudit composé candidat ; e) la comparaison du niveau Ni mesuré à l'étape d) avec le niveau No d'expression du gène rapporteur en l'absence dudit composé candidat ; et f) si Ni est significativement supérieur à No, la sélection du composé. Un deuxième mode de réalisation du procédé de sélection selon l'invention correspond au procédé décrit ci-dessus, dans lequel toutefois l'on utilise non pas deux plasmides d'expression recombinants (étapes a) et b)), mais_ un seul, sur lequel sont clones à la fois le gène codant le répresseur EthR et au moins la région promotrice et opératrice du gène
ethA en amont d'un gène rapporteur. Ainsi, un tel procédé comprend au moins (procédé B) : a) le clonage du gène codant ledit répresseur EthR, et le clonage d'au moins la région promotrice et opératrice du gène ethA en amont d'un gène rapporteur, sur un plasmide d'expression recombinant ; b) la transformation d'une cellule hôte recombinante avec au moins le plasmide issu del'étape a) ; c) la culture de ladite cellule hôte recombinante en présence d'un composé candidat ; d) la mesure du niveau Ni d'expression du gène rapporteur en présence dudit composé candidat ; e) la comparaison du niveau Ni mesuré à l'étape d) avec le niveau N0 d'expression du gène rapporteur en l'absence dudit composé candidat ; et f) si Ni est significativement supérieur à No, la sélection du composé. Pour la mise en œuvre des étapes citées ci-dessus (clonage, transformation, culture, mesure de l'expression d'un gène rapporteur), l'homme du métier fera appel à des techniques conventionnelles (voir par exemple Sambrook et Russel, 2001). La région promotrice et opératrice du gène ethA à cloner aux fins de la mise en œuvre d'un procédé selon l'invention comprend au moins la séquence SEQ ID N°1 , qui correspond à la région promotrice et opératrice du gène ethA sur laquelle se fixent 4 molécules de répresseur (voir partie expérimentale infra). De préférence, cette région comprend au moins la séquence SEQ ID N°2, sur laquelle se fixent 8 molécules de EthR. De manière encore préférée, cette région comprend au moins la séquence SEQ ID N°3, laquelle correspond à la séquence intergénique ethA-R. Selon un mode de réalisation particulier, un plasmide d'expression recombinant contenant le gène ethR (codant EthR) est pMV261-ef/? :? (voir partie expérimentale ci-dessous).
Selon un autre mode de réalisation particulier, un plasmide d'expression recombinant contenant au moins la région promotrice et opératrice du gène ethA en amont d'un gène rapporteur est pBSh-PethA - lacZ (voir partie expérimentale ci-dessous). Dans le plasmide pBSh-PethA - lacZ, le gène rapporteur est lacZ.
Bien évidemment, l'homme du métier peut mettre en oeuvre n'importe quel autre gène rapporteur connu dans le domaine de l'invention pour être utilisable chez les mycobactéries, notamment les gènes xylE, gfp, lux et le gène codant pour la protéine glucuronidase. Dans les procédés selon l'invention, ladite cellule hôte recombinante est une cellule mycobactérienne. Il s'agit de préférence d'une cellule de Mycobacterium bovis, M. smegmatis, M. tuberculosis ou M. leprae. En particulier, l'homme du métier peut choisir une cellule de M. bovis BCG 1173P2 (souche vaccinale accessible sur simple demande auprès de l'Organisation Mondiale de la Santé), ou de M. smegmatis mc2155 (Snapper et a , 1988 ; voir partie expérimentale ci- dessous). Selon un troisième mode de réalisation, un procédé de sélection conforme à la présente invention comprend au moins (procédé C) : a) la détermination du niveau Li de liaison du répresseur EthR sur au moins la région promotrice et opératrice du gène ethA, en présence d'un composé candidat ; b) la comparaison du niveau Li avec le niveau Lo de liaison du répresseur EthR sur au moins la région promotrice et opératrice du gène ethA, en l'absence dudit composé candidat ; et c) si Li est significativement inférieur à L0, la sélection du composé. En particulier, les niveaux de liaison L0 et U peuvent être déterminés à l'aide d'une méthode choisie parmi la résonance plasmonique de surface, la détection de la fluorescence naturelle et le transfert d'énergie par résonance de fluorescence (FRET pour
« Fluorescence résonance energy transfer ») par lequel l'homme du
métier déterminera le transfert d'énergie entre EthR et là région promotrice et opératrice de ethA, en présence et en absence d'un ligand (Jia et al., 1996 ; Pyles et al., 1998 ; Hillisch et al., 2001 ; Engohang- Ndong ef a/., 2004). Selon un quatrième mode de réalisation, un procédé de sélection visé par la présente invention comprend au moins (procédé D) : a) la mise en présence du répresseur EthR et d'au moins deux composés candidats ; b) la cristallisation du mélange ainsi obtenu ; c) l'analyse de la structure du cristal issu de l'étape b) ; d) si cette analyse révèle que l'un desdits composés est lié audit répresseur EthR, la solubilisation dudit cristal ; e) l'élution et la sélection dudit composé. Les étapes d) de solubilisation du cristal et e) d'élution et sélection du composé font appel à des méthodes conventionnelles (voir par exemple la partie expérimentale infra), bien connues dans le domaine technique de l'invention. Selon un cinquième mode de réalisation, un procédé de sélection objet de la présente invention comprend au moins (procédé E) : a) la mise en présence du répresseur EthR et d'un composé candidat ; b) la cristallisation du mélange ainsi obtenu ; c) l'analyse de la structure du cristal issu de l'étape b) ; d) si cette analyse révèle que ledit composé est lié audit répresseur EthR, la sélection dudit composé (à partir du composé candidat de départ). Dans les deux modes de réalisation qui précèdent (procédés D et
E), les étapes de cristallisation (étape b)), d'analyse de la structure du cristal (étape c)) et, le cas échéant, celle du composé sélectionné (comme indiqué ci-dessous, on peut déterminer, dans le cadre d'une étape ultérieure supplémentaire, la structure du composé sélectionné) peuvent
être réalisées, par exemple à l'aide des techniques décrites dans les exemples ci-après, ou par n'importe quelle autre méthode classique, connue de l'homme du métier. On notera qu'à l'issue des procédés de sélection selon l'invention décrits supra (procédés A, B, C, D et E), une étape de détermination de la structure du composé sélectionné peut être avantageusement mise en œuvre. En outre, les procédés de sélection selon l'invention décrits supra (procédés A, B, C, D et E) peuvent être mis en œuvre seuls ou en combinaison. Ainsi, par exemple, l'homme du métier pourra choisir un procédé de sélection selon l'un ou l'autre des cinq modes de réalisation susmentionnés. De préférence, l'un parmi les trois premiers modes de réalisation ci-dessus (procédé A, B ou C) sera alors mis en oeuvre. Alternativement, l'homme du métier pourra d'abord mettre en œuvre le quatrième ou cinquième mode de réalisation (procédé D ou E) afin de sélectionner un composé, puis l'un quelconque des trois premiers modes de réalisation (procédé A, B ou C) afin de confirmer que le composé ainsi sélectionné présente la capacité, en se fixant au répresseur EthR, d'empêcher ce dernier de réprimer l'expression du gène ethA. Ainsi, de préférence, le procédé selon le quatrième ou cinquième mode de réalisation (procédé D ou E) sera mis en œuvre préalablement à un procédé selon l'un quelconque des trois premiers modes de réalisation (procédé A, B ou C). Un deuxième aspect de la présente invention concerne un composé, tel que défini supra, inhibiteur du répresseur EthR, susceptible d'être obtenu par la mise en œuvre d'un procédé de sélection selon l'invention. Alternativement, un composé visé par l'invention est susceptible d'être obtenu par la mise en œuvre successive de plusieurs, de
préférence deux, procédés de sélection différents parmi ceux décrits ci- dessus. Selon un mode de réalisation, un composé visé par la présente invention interagit avec les résidus F110 et F114 du répresseur EthR (voir partie expérimentale ci-dessous, paragraphe ll-E). De préférence, un tel composé interagit non seulement avec les résidus F110 et F114, mais également avec les résidus W138 et W145 de EthR. Selon un autre mode de réalisation, un composé objet de l'invention se fixe dans la poche de liaison du ligand du répresseur EthR, laquelle est définie par les résidus de EthR suivants : R128, V134, G124, L76, Q125, F187, F184, T121 , W138, F114, L183, E180, M142, N179, N176, W145, F110, W207, T149, 1107, L87, V152, Y148, G106, W103 et M102 (voir partie expérimentale ci-dessous, paragraphe ll-E). On notera que l'octanoate d'hexadécyle (Garcia-Rubio et al. ;
2002), ainsi que les composés décrits par Fraaije et al. (2004) sont déjà connus en tant que tels. Les composés connus sont exclus des composés faisant, en tant que tels, l'objet de la présente invention. Selon un troisième aspect, là présente invention fournit des moyens utiles dans le domaine de la prévention et/ou du traitement des maladies, notamment des infections bactériennes et, de préférence, des infections mycobactériennes telles que la tuberculose et la lèpre. Ainsi, l'invention a trait à un composé inhibiteur du répresseur EthR comme médicament, destiné eh particulier à prévenir et/ou traiter les infections bactériennes, de préférence mycobactériennes. En particulier, un tel composé pourra être obtenu par au moins un procédé de sélection décrit supra. En effet, dans la mesure où le mutant knockout ethR décrit dans
Baulard et al. (2000) présente un phénotype de ralentissement important de la croissance, EthR constitue à lui seul une cible thérapeutique. Un ligand de EthR est susceptible de donner lieu à un phénotype comparable
à celui du mutant sus-cité. Eh tout état de cause, un ligand de EthR peut présenter des propriétés avantageusement bactériostatiques, voire bactéricides, contre les mycobactéries. Par exemple, outre les composés susceptibles d'être obtenus par au moins un procédé selon l'invention, le composé utilisé comme médicament peut être un analogue ou un dérivé du ligand co-cristallisé décrit dans la partie expérimentale ci-dessous (octanoate d'hexadécyle). Ce peut être également un analogue ou un dérivé de la benzylacétone (voir partie expérimentale infra). Au sens de la présente invention, un « analogue » est n'importe quelle version modifiée, pharmaceutiquement acceptable (notamment non toxique), d'un composé initial, ladite version modifiée pouvant être naturelle ou synthétique, dans laquelle un ou plusieurs atomes, tels que des atomes de carbone, d'hydrogène, d'oxygène, ou des hétéroatomes tels que l'azote, le soufre ou un halogène, ont été ajoutés ou supprimés de la structure du composé initial, de manière à obtenir un nouveau composé moléculaire pharmaceutiquement acceptable. Le terme « dérivé » désigne ici n'importe quel composé pharmaceutiquement acceptable qui présente une affinité pour le répresseur EthR, une ressemblance ou un motif structurel, en commun avec un composé de référence. Entrent également dans cette définition, d'une part les composés qui, seuls ou avec d'autres composés, peuvent être des précurseurs ou des produits intermédiaires dans la synthèse du composé de référence, moyennant une ou plusieurs réactions chimiques, et d'autre part les composés qui peuvent être formés à partir du composé de référence, seul ou avec d'autres composés, via une ou plusieurs réactions chimiques. En particulier, les cétones et les esters obtenus à partir d'un composé de référence sont compris dans la définition du terme « dérivé ». L'expression « pharmaceutiquement acceptable » désigne ici ce qui est apte et utile pour préparer une composition pharmaceutique ou un
médicament, qui est généralement dépourvu de toxicité, notamment chez l'homme. Sont ainsi couverts par les définitions d' « analogues » et de « dérivés » ci-dessus au moins certains des composés pharmaceutiquement acceptables décrits par Fraaije et al. comme étant soit des substrats, soit des produits de l'activateur mycobactérien EthA (voir le Tableau I dans Fraaije et al. 2004 ; et voir le paragraphe lll-B de la partie expérimentale ci-dessous), et/ou leurs analogues et/ou dérivés pharmaceutiquement acceptables. Ainsi, selon un mode de réalisation particulier, un composé utile comme médicament visé par l'invention est choisi parmi les analogues et dérivés inhibiteurs de EthR et pharmaceutiquement acceptables de la 2- hexanone, la 2-heptanone, la 4-heptanone, la 2-octanone, la 3-octanone, la 2-décanone, la 2-dodécanone (Fraaije et al. 2004). L'invention concerne également une composition pharmaceutique comprenant au moins, en tant que principe actif, un composé inhibiteur du répresseur EthR et utile comme médicament (c'est-à-dire notamment pharmaceutiquement acceptable), tel que décrit supra, en association avec au moins un excipient pharmaceutiquement acceptable. L'homme du métier choisira un ou plusieurs excipients pharmaceutiquement acceptables en fonction de la voie d'administration de la composition pharmaceutique. En outre, la forme du médicament ou de la composition pharmaceutique (par exemple, une solution, une suspension, une emulsion, des comprimés, des gélules, etc..) dépendra de la voie d'administration choisie. Ainsi, au sens de l'invention, un médicament ou une composition pharmaceutique peut être administré par n'importe quelle voie appropriée, par exemple la voie orale, locale, systémique, intraveineuse, intramusculaire ou mucosale, ou bien en utilisant un patch, ou encore
sous une forme encapsulée dans, ou immobilisée sur, des liposomes, des microparticules, des microcapsules, et analogues. On peut notamment citer, à titre d'exemples non limitatifs d'excipients appropriés pour une administration par voie orale, le talc, le lactose, l'amidon et ses dérivés, la cellulose et ses dérivés, les polyéthylène-glycols, les polymères d'acide acrylique, la gélatine, le stéarate de magnésium, des matières grasses animales, végétales ou synthétiques, les dérivés de la paraffine, les glycols, les stabilisants, les conservateurs, les mouillants, les dispersants, les émulsionnants, les agents de pénétration, de solubilisation, etc.. Les techniques de formulation et d'administration des médicaments et compositions pharmaceutiques sont bien connues dans la technique ici considérée (l'homme du métier pourra notamment se référer à l'ouvrage « Remington's Pharmaceutical Sciences », dernière édition). La présente invention a également pour objet l'utilisation d'au moins un composé inhibiteur du répresseur EthR et utile comme médicament (c'est-à-dire notamment pharmaceutiquement acceptable), tel que décrit supra, pour la fabrication d'un médicament destiné à la prévention et/ou au traitement des infections bactériennes, de préférence mycobactériennes. En outre, l'invention concerne des produits contenant un composé inhibiteur du répresseur EthR et utile comme médicament (c'est-à-dire notamment pharmaceutiquement acceptable), conformément à l'invention, et soit l'ETH ou l'un de ses dérivés, soit un antibiotique activable par l'activateur mycobactérien EthA, comme produit de combinaison pour une utilisation simultanée, séparée ou étalée dans le temps en thérapie antituberculeuse ou antilépreuse. Les figures suivantes sont fournies à titre purement illustratif et ne limitent en aucune façon la présente invention. Figure 1 : activité β-galactosidase chez les mycobactéries transformées.
A : détection de l'activité β-galactosidase chez M. smegmatis transformé avec (a) pBSh-PethA-/acZ, (b) pBSh-PethA-/acZ + pMV261-e7?R, (c) pMV261-ef ?R, sur boîtes gélosées contenant du milieu LB enrichi en X- Gal. B : quantification de l'activité β-galactosidase chez M. bovis BCG transformé avec (a) pBSh-PethA-/acZ, (b) pBSh-PethA-/acZ + pMV261-e /?f?, (c) pMV261-ef ? Chaque valeur est une moyenne faite sur 3 répliques de cultures. Figure 2 : EMSA de la liaison de Hise-EthR à la région intergenique ethA- R.
La sonde marquée de 191 pb (100000 cpm) a été mélangée avec 0 μg (piste 1 ), 0,45 μg (piste 2), 0,90 μg (piste 3), 1 ,35 μg (piste 4), 1 ,8 μg (piste 5) et 3,6 μg (piste 6) His6-EthR en l'absence (A) ou en présence d'un excès de la région intergenique ethA-R non marquée utilisée comme compétiteur spécifique (B) ou encore en présence d'un excès d'ADN compétiteur non spécifique (C).
B et C : les EMSA ont été réalisés sans (piste 1 ) ou avec 0,9 μg (autres pistes) Hise-EthR purifié. Figure 3 : A et B : protection à la Dnase I de la région intergenique ethA-R par His6- EthR.
Les 2 sondes (A : fragment Hind\\\-Sph\ de 323 pb ; B : fragment Xho\- HindlW de 312 pb) ont été incubées sans (piste 1) ou avec différentes quantités de His6-EthR (A : piste 2 : 0,0625 μg ; piste 3 : 0,125 μg ; piste 4 : 0,25 μg ; piste 5 : 0,5 μg ; piste 6 : 1 μg ; B : piste 2 : 1 μg ; piste 3 : 2,5 μg ; piste 4 : 5 μg ; piste 5 : 7,5 μg ; piste 6 : 10 μg), avant traitement par la DNase I.
C : localisation de la région protégée par Hise-EthR contre la digestion par la DNase I. D : analyse d'extension d'amorce.
La séquence du brin codant est montrée et le point +1 de transcription est souligné.
Figure 4 : affinité globale et stoechiométrie de l'interaction entre His6-EthR et Pet A mesurée par SPR. A : structure de la région intergenique ethA-R.
IG-37 comprend 2 répétitions directes imparfaites (flèches pleines) qui comprennent 2 répétitions indirectes imparfaites (bases en italique).
IG-36 comprend 2 répétitions indirectes imparfaites (flèches en pointillé).
B : sensorgrammes d'injections de 0,35 ; 0,70 ; 1 ,39 ; 3,47 et 8,6 μM Hisβ- EthR, en utilisant le fragment IG-106.
C : stoechiométrie de liaison en fonction de la concentration en Hise-EthR.
Sensorgrammes de 0,612 ; 1 ,25 ; 2,50 et 5 μM His6-EthR, en utilisant les fragments IG-62 (D), IG-37 (E) et IG-36 (F).
Figure 5 : représentation de Hill pour la liaison de His6-EthR sur la région intergenique ethA-R.
Figure 6 : chromatographie par filtration sur gel.
Profils d'élution d'un fragment PCR (0,108 nmole) chevauchant la région intergenique ethA-R en l'absence (A) ou en la présence de 0,385 nmole
(B), 1 ,920 nmole (C) et 3,850 nmole (D) de His6-EthR purifié. E : profil d'élution de 3,850 nmole de His6-EthR en l'absence d'ADN.
Axe des y : absorbances relatives (mAU pour unité de milliabsorbance) à
260 nm (pointillé) et 280 nm (trait plein).
Figure 7 : interaction in vivo entre les molécules EthR.
Boîtes gélosées contenant du milieu minimal, enrichi en maltose et X-Gal. Figures 8 et 9 : structure du ligand lié à l'homodimère de EthR, selon une vue respectivement perpendiculaire [figure 8 : structure du cristal du répresseur EthR du groupe d'espace P2-|2-ι2 (forme 1 )] ou le long (figure
9) de l'axe double du dimère.
EthR est constitué de 9 hélices : α1 (23-38), α2 (47-54), α3 (56-64), α4 (68-92), α5 (99-115), α6 (118-129), α7 (132-158), αδ (168-188) et α9
(192-212).
Les molécules de HeOc occupent l'espace à travers tout le domaine de fixation du ligand. Les 2 hélices de reconnaissance α3 et α3' sont séparées par 52 A.
Figure 10 : superposition de la région centrale de liaison du ligand (hélices α4 à α9) de EthR et celle du répresseur QacR, équivalent d'un point de vue topologique, sous la forme induite.
Les résidus 89 à 93 de QacR subissent, comme illustré, une transition tour-hélice (TTH) dans l'hélice α5 suite à la liaison du ligand, cette transition n'étant pas observée dans la structure du répresseur non lié. Cette transition est également présente dans EthR. Les motifs HTH, bien que relativement bien conservés d'un point de vue structurel entre les deux répresseurs (RMSD de 1 A pour ces régions isolées) ne se superposent pas du fait des orientations relatives différentes de leur domaine de liaison du ligand respectif. Figure 11 : reconnaissance du ligand par EthR.
Seuls les résidus dont les atomes se situent dans une sphère de 5Â autour du ligand sont indiqués.
Une molécule d'eau est enfouie via un pont hydrogène formé avec le résidu N179. La reconnaissance du ligand implique des résidus des 6 hélices qui forment le domaine de liaison du ligand.
Figure 12 : superposition de la région centrale de liaison du ligand (hélices α4 à α9) de EthR en complexe avec l'octanoate d'hexadécyle et celle de QacR en complexe avec le déqualinium. F110 joue apparemment un rôle important dans l'induction de EthR, par analogie avec celui joué par la région Y92 de QacR. La structure de QacR met en évidence la poche de liaison comprenant plusieurs sites. Bien que les deux répresseurs présentent le même portail d'entrée du ligand et possèdent des sites de liaison adjacents partiellement chevauchants, ils sont particulièrement divergents en ce qui concerne les cavités de liaison dans leur globalité. Le ligand de EthR est profondément enfoui, essentiellement dans la région centrale hydrophobe du domaine de liaison du ligand, dans
une cavité qui est située parallèlement aux axes des hélices α4 et α7. En revanche, la poche de liaison à plusieurs sites de QacR se trouve pratiquement parallèle à α6. Le déplacement de α5 dans EthR par rapport à celui de QacR ferme cette cavité dans EthR. Figure 13 : carte de la densité d'électrons, effectuée à un niveau de 1 ,5 σ, calculée en excluant l'octanoate d'hexadécyle (HeOc) du modèle. Figure 14 : identification du ligand de EthR par GC-MS après extraction organique. Chromatogramme (temps de rétention 21.00 min à 27.00 min) de la fraction organique des cristaux de EthR (A). Spectre d'ionisation d'électrons (El) du pic GC à 22.16 min (B). En utilisant comme données d'entrée les masses mesurées à partir du spectre GC-MS pour cribler une banque interne GC-MS, le ligand a été identifié comme étant un octanoate d'hexadécyle. Spectre de référence El de l'octanoate d'hexadécyle (C). Il présente un pic moléculaire d'ions M+ à m/z= 368 et des pics d'ions caractéristiques à m/z = 43, 57, 111 , 127, 145, 269. Le pic GC à 24.17 min correspond à l'octanoate d'hexadécyle. Le pic GC à 25.99 min correspond à des contaminants non spécifiques (phtalates).
Figure 15 : Effet synergique de la benzylacétone et de l'ETH sur la croissance de M. smegmatis. L'effet synergique a été testé en déposant 4μL de dilutions en série (A : 10'2 ; B : 10"3 ; C : 10-4 ; D : 10'5) d'une culture en phase de croissance de M. smegmatis me2 155 sur des boîtes de milieu LB ne contenant pas d'antibiotiques, ou contenant 5μg/mL de ETH seul (ETH), 1 mM de benzylacétone seule (BA), ou une combinaison des deux composés (ETH + BA).
La partie expérimentale ci-après, appuyée par des exemples et références aux figures, vise à illustrer, sans limiter, la présente invention.
PARTIE EXPERIMENTALE
I- EthR réprime l'expression de ethA en se liant directement sur la région promotrice et opératrice de ethA :
A. Matériels et méthodes :
A.1. Souches bactériennes et conditions de croissance
Toutes les souches ont été cultivées en aérobiose à 37°C. Toutes les étapes de clonage ont été réalisées chez E. coli XL1- Blue (Stratagène).
Les souches de E. coli ont été cultivées en milieu Luria-Bertani (LB) (Life
Technologies) en présence ou non de 1 ,5% d'agar (Difco).
Les souches mycobactériennes ont été cultivées en milieu Sauton (Sauton
1912) enrichi avec 0,001 % ZnS04 et 0,25% Triton WR1339 (Sigma) ou sur agar M7H11 enrichi avec 10% de mélange catalase-dextrose- albumine-acide oléique (Becton Dickinson). Mycobacterium smegmatis et
M. bovis BCG 1173P2 ont été transformées comme décrit précédemment
(Wards et Collins, 1996).
Les cultures à grande échelle de mycobactéries ont été amenées en milieu de phase exponentielle (36 h pour M. smegmatis mc2155 ; 11 à 16 jours pour M. bovis BCG).
Le cas échéant, les antibiotiques (Sigma) ont été ajoutés au milieu aux concentrations suivantes : kanamycine à 20 μg/ml, ampicilline à 100 μg/ml, hygromycine à 50 μg/ml, streptomycine à 20 μg/ml et gentamicine à 15 μg/ml.
Après croissance, les bactéries ont été récoltées, lavées avec du tampon phosphate PBS et stockées à - 20 °C.
A.2. Plasmides et manipulations d'ADN Toutes les manipulations d'ADN ont . été réalisées en utilisant des protocoles classiques, tels que décrits par Sambrook et Russell (2001 ). Le
système « Fast-link™ DNA ligation » (Epicentre Technologies) a été utilisé pour les ligatures. a) Construction de pBSh -lacZ Le fragment Bam λ\-Bgl\\ de 3,678 kb, contenant le cadre ouvert de lecture (ORF) codant la β-galactosidase, a été isolé de pQEGM (Antoine et al., 2000) et inséré dans pBSh-D (Picardeau et al., 2000) avant d'être digéré par SamHI. b) Construction de oBSH-PethA-lacZ
La région promotrice Pet A a été amplifiée par PCR en utilisant les amorces 0-161 : 5'-CCAGCGGACGGTCCTCTAGAAGGTTC-3' (SEQ ID N°4), 0-162 : 5'-GTGAGATCTCATGGATCCACGCTATCAAGGTAA-3' (SEQ ID N°5). Le produit PCR a été inséré dans pCR2.1Topo (Invitrogen) pour donner pCR2.PethA (2 + 4). Le plasmide a été redigéré par Xba\ et BglU et le fragment de 191 pb contenant PethA a été inséré dans pBSh- lacZ, préalablement digéré par Xba\ et SamHI pour donner pBSh-PethA- lacZ.
c) Plasmides pour le test double hybride bactérien
La région codant EthR a été amplifiée par PCR en utilisant les amorces O- 243 : 5'-CTGCAGTGACCACCTCCGCGGCCAG-3' (SEQ ID N°6) et O- 244 : 5'-GGTACCTTATCTGTTCTCGCCGTAA-3' (SEQ ID N°7). La séquence amplifiée a été clivée par Pst\ et /4sp718, et insérée dans pT25 digéré par Psfl-,4sp718 (Karimova et al., 1998), pour donner pT25-EthR. Alternativement, la même région chromosomique a été amplifiée par PCR en utilisant les amorces O-240 : 5'-
GGTACCGACTACTTCCGCAGCCAGTCA-3' (SEQ ID N°8) et 0-242 : 5'- AAGCTTTCGCCGTAAATGCTGGTCA-3' (SEQ ID N°9), clivée par Hind\\\ et Asp718, et insérée dans pT18 (Karimova et a , 1998) préalablement digéré par les mêmes enzymes pour donner pT18-EthR. Une souche de
E. coli cyclase-déficiente (DHP1 ) (Karimova et al., 1998) a été co- transformée avec ces deux plasmides. La capacité des clones résultants à fermenter le maltose a été déterminée à 30°C sur des boîtes de milieu minimum M9 solide fraîchement préparé, contenant 1 % de maltose comme unique source de carbone et 40 μg/ml de 5-bromo-4-chloro-3- indolyl-β-D-galactopyranoside (X-gal, Promega).
A.3. Tests Beta-galactosïdase
Les activités β-galactosidase des souches recombinantes de M. smegmatis et M. bovis BCG ont été détectées sur des boîtes d'agar M7H11 enrichi avec 100 μg/ml de X-gal. Les activités β-galactosidase ont été quantifiées en cultures liquides, en utilisant une méthode adaptée de Miller (1972). Brièvement, les cellules mycobactériennes ont été cultivées en milieu Sauton (50 ml) jusqu'à une densité optique (DO) à 600 nm de 0,6. Les cellules ont ensuite été récoltées par centrifugation (4000 g, 15 min, 4°C), et les culots ont été lavés, puis resuspendus dans 1 ml de PBS. Après sonication des suspensions bactériennes, des aliquots des lysats ont été incubés avec de l'orthonitrophényl-β-D-galactoside (ONPG, Sigma) à 30°C. La réaction enzymatique a été suivie par spectrophotométrie à une absorbance de 420 nm (A 2onm), et la vitesse initiale a été calculée en utilisant la proportion linéaire de la courbe cinétique. L'Activité β- galactosidase Spécifique (AS) a été déterminée comme suit : AS = (ΔA 2onm min"1) / (DOβoonm I de culture). Des échantillons en triple exemplaire ont été mesurés pour chaque clone bactérien. Afin d'évaluer l'influence potentielle de l'ETH sur l'activité du répresseur EthR, M. smegmatis co-transforφé avec pBSh-PethA-/acZ et pM261-ef/7f? a été cultivé jusqu'à une DOβoonm de 0,3.
Des concentrations variables de ETH (0-10-20-40 μg/ml) ont ensuite été ajoutées à la culture (en double), et les activités β-galactosidase ont été mesurées toutes les 10 min pendant une heure.
A.4. Production et purification de His6-EthR L'ADN codant EthR a été amplifié par PCR en utilisant l'ADN chromosomique de M. tuberculosis H37Rv comme matrice et les 5. oligonucléotides 0-183 : 5'-CATATGACCACCTCCGCGGCCAGT-3' (SEQ ID N°10) et 0-184 : 5'-GGATCCGAGCACCCCCGACCGAGT-3' (SEQ ID N°11 ) comme amorces. Le produit PCR a été inséré dans pCR2.1 Topo de manière à former pCR2Λ-ethR. La séquence du fragment codant EthR a été déterminée sur les deux brins et, ensuite, isolée à partir de pCR2.1-0 ethR par digestion avec Nde\ et BamHI, puis insérée dans pET-15b (Novagen), pour donner pET-15b-e#7R. Ce plasmide code une protéine EthR portant une étiquette amino terminale ayant la séquence suivante : MGSSH6SSGLVPRGSHM (SEQ ID N°12). Ce plasmide a été introduit dans E. coli BL21(DE3). E. coli BL21(DE3)(pET-15b-etf?R) a été cultivé en5 milieu LB (120 ml) jusqu'à une DOeoonm de 0,6-0,7. De l'isopropylthiogalactoside (IPTG) a ensuite été ajouté à une concentration finale de 1 mM, et la culture a été maintenue pendant 3 heures de plus. Les cellules ont été récoltées par centrifugation à 12 000 g à 4°C, resuspendues dans 10 ml de tampon de lyse (50 mM NaH2P04,0 300 mM NaCI, pH 7,5, 10 mM imidazole) et lysées par deux passages à travers une presse de French à 6,2 x 106Pa. Après centrifugation (20 000 g, 25 min, 4°C), le surnageant a été récupéré, et His6-EthR a été séparé du lysat de cellules totales par chromatographie sur colonne d'agarose Ni-NTA (Qiagen). Après un lavage extensif avec du tampon de5 lyse, Hise-EthR a été élue de la résine par 100 mM imidazole dans du tampon de lyse, puis dialyse sur la nuit contre du tampon de lyse. Environ 900 μg/ml de protéines purifiées ont été obtenus comme déterminé à l'aide du système « Bio-Rad protein assay ». La pureté des protéines a été déterminée par coloration au Bleu de Coomassie après0 électrophorèse SDS-PAGE sur un gel de polyacrylamide à 12%. La
protéine purifiée a été stockée dans 10% de glycérol à -20°C, puis dialysée avant usage.
A.5. Mesure de l'interférence de la mobilité électrophorétique (EMSA pour « Electrophoretic mobility shift assays »)
Le fragment PCR de 191 pb obtenu en utilisant les oligonucléotides 0-161 et 0-162 et contenant la région promotrice de ethA a été purifié par électrophorèse sur gel d'agarose et marqué avec 10 μCi de [γ-32P]ATP (3000 Ci/mmol ; Amersham Biosciences) en utilisant la T4 polynucléotide kinase (10 unités, Invitrogen). Le fragment radio-marqué ([32P]-PethA) a été purifié en utilisant une colonne MicroSpin G-25 (Amersham, Biosciences). [32P]-PethA (100 000 coups par minutes ; cpm) a été incubé pendant 10 min à température ambiante avec des quantités variables de HiSβ-EthR dans un volume réactionnel de 20 μl contenant 1 μg de poly-(dl-dC) (Amersham Biosciences) et 2 mM Tris-HCI (pH 8,0), 0,4 mM MgCI2, 5 mM KCI, 0,2 mM DTT, 10% de glycérol et 0,01 % de détergent non-ionique P40 (Igepal CA-630, Sigma).
Après incubation, le mélange a été chargé sur un gel de polyacrylamide à 10% non dénaturant et soumis à une électrophorèse. Le gel a ensuite été séché sous vide et exposé toute la nuit à un film radiographique Biomax (Kodak).
Les tests de compétition ont été réalisés comme décrit (Tang et al., 2001 ). Du Pet A non marqué et la cassette de résistance à la streptomycine de pHP45Ω non marquée (Frey et Krisch, 1985) (en excès molaire de 0 à 1000 fois) ont été respectivement pré-incubés comme ADN compétiteurs spécifiques et non spécifiques avec Hise-EthR pendant 10 min à température ambiante, suivi de l'addition de sondes marquées et l'incubation pendant 10 min à température ambiante. Les complexes protéines-ADN résultants ont été soumis à une électrophorèse et à une auto-radiographie comme décrit ci-dessus.
A.6. Filtration sur gel
Un fragment d'ADN de 94 pb chevauchant PethA a été amplifié par PCR en utilisant l'ADN chromosomique de M. tuberculosis H37Rv comme matrice et O-270 : 5'-CGGTCATGGATCCACGCTATCAAC-3' (SEQ ID N°13) et O- 272 : 5'-GGAGGTGGTCACCCTGGCAGC-3' (SEQ ID N°14) comme amorces. Des quantités variables de His6-EthR ont été mélangées avec 6,7 μg (0,108 mmoles) de produits PCR dans du tampon A (50 mM NaH2P04, pH 7,5 ; 250 mM NaCI) et filtrées sur une colonne Superdex 200 HR 10/30 reliée à un système AKTA FPLC (Amersham Biosciences) à un débit de 0,3 ml par minute. Les concentrations relatives de protéines et d'ADN dans l'éluent ont été suivies en mesurant l'absorbance à 280 nm et 260 nm. La masse moléculaire apparente de Hise-EthR en l'absence d'ADN a été estimée en utilisant la courbe standard Ve/V0 contre le log des masses moléculaires des protéines standards (ribonucléase A, 13,7 kDa chymotrypsinogène A, 25 kDa ; ovalbumine, 45 kDa ; albumine, 66 kDa aldolase, 158 kDa ; catalase, 232 kDa ; apoferritine, 440 kDa thyroglobuline, 669 kDa ; standards de taille moléculaire pour filtration sur gel de protéine ; Amersham Biosciences). Vo est le volume mort et Ve est le volume d'élution.
A.7. Test de liaison par résonance plasmonique de surface (SPR) L'appareil BIAcore 2000' (BIAcore'AB, Uppsala, Suède) a été utilisé pour des analyses en temps réels des interactions moléculaires entre Hise-EthR et la région promotrice de ethA. 4 fragments d'ADN ont été obtenus par PCR en utilisant l'ADN chromosomique de M. tuberculosis H37Rv comme matrice. Un fragment de 106 pb (figure 4A ; IG-106) chevauchant la région intergenique ethA-R a été obtenu en utilisant O-270 : 5'-CGGTCATGGATCCACGCTATCAAC- 3' (SEQ ID N°13) et 0-271 : 5'-biotine-CTGACTGGCCGCGGAGGTGGT- 3' (SEQ ID N°15).
Un fragment d'ADN de 62 pb (IG-62) chevauchant une région de 55 pb identifiée par des expériences d'empreintes à la DNase I a été amplifié en utilisant 0-248 : 5'-biotine-GATCCACGCTATCAACGTA-3' (SEQ ID N°16) et O-250 : 5'-CTACGTGTCGATAGTGTCG-3' (SEQ ID N°17). Un fragment de 37 pb chevauchant 2 répétitions directes a été amplifié en utilisant 0-255 : 5'-ATCAACGTAATGTCGAG-3' (SEQ ID N°18) et 0-256 : 5'-GTCGACATCTCGTTGACG-3' (SEQ ID N°19), puis clone dans pCR2.1Topo. Un fragment d'ADN biotinylé de 104 pb (IG-37) a ensuite été obtenu par PCR en utilisant 0-255 et 5'-biotine- AATTGGGCCCTCTAGATGCAT-3' (SEQ ID N°20).
Finalement, un fragment de 36 pb chevauchant 2 répétitions inversées a été amplifié en utilisant 0-253 : 5'-GTAATGTCGAGGCCGTCAA-3' (SEQ ID N°21 ) et 0-254 : 5'-ATAGTGTCGACATCTCGTT-3' (SED ID N°22), puis clone dans pCR2.1Topo. Un fragment d'ADN biotinylé de 103 pb (IG-36) a ensuite été obtenu par PCR en utilisant 0-253 et 5'-biotine-AATTGGGCCCTCTAGATGCAT-3' (SEQ ID N°23).
Les fragments biotinylés amplifiés ont été purifiés sur colonne Quiaquick (Qiagen), puis leur séquence a été déterminée avant immobilisation sur une cellule couplée à la streptavidine CM5 Sensor Chip en utilisant le protocole standard fourni avec le système « Aminé Coupling » (BIAcore'). Brièvement, la streptavidine a été injectée à 500 ng/μl dans 10 mM d'acétate de sodium (pH 3,5) pendant 12 minutes à un débit de 10 μl/min. L'ADN biotinylé (environ 69 kDa pour le fragment de 106 pb) a été injecté à travers chaque cellule à 200 ng/ml pour obtenir une fixation stable de la streptavidine de 205 unités de résonance (RU). L'intégrité et la quantité d'ADN fixé ont été contrôlées par injection durant 120 secondes de 1 ,6 μM d'histone H1 de veau (Sigma) à 10 μl/min. La liaison de His6-EthR à l'ADN a été effectuée à 25°C dans .0,05 M NaH2P04 (pH 7,15), 0,25 M NaCI, 0,002 M MgCI2, 0,05 M KCI et 0,001 M DTT à un débit de 20 μl/min.
His6-EthR a été injecté aux concentrations désirées dans du tampon de circulation jusqu'à ce que l'équilibre soit atteint.
Les cellules Sensor Chip ont été régénérées par une injection de 60 secondes de SDS à 0,03%. Les courbes finales ont été obtenues par soustraction du signal correspondant à une cellule fonctionnalisée avec un fragment d'ADN double brin non pertinent de 100 pb (fragment -276 à - 176 du promoteur de la stroméIysine-1 humaine). Le rapport molaire entre Hise-EthR (25,9 kDa) et l'ADN immobilisé ont été déterminés selon l'équation 1 suivante : n = (α RU Hise-EthR / β RUADN) X (MrADN/MrHis6-EthR) dans laquelle n est la stoechiométrie du complexe, RU est la réponse mesurée (en unités) obtenue à la saturation de liaison, et Mr est le poids moléculaire, α = 1 pg de protéines liées par RU/mm2 and β = 0,73 pg d'ADN lié par RU/mm2. Ces facteurs proviennent de la différence d'indice de réfraction molaire entre ADN et protéines, ce qui se traduit par un comportement plasmonique différent (PharmaciaBiosensor, 1994 ; Speck et al., 1999). Afin de déterminer le coefficient de Hill et le Ko global de l'interaction, une deuxième cellule Sensor Chip contenant le même produit PCR biotinylé a été créée de manière à obtenir une fixation de l'ADN sur la streptavidine équivalente à 100 RU. His6-EthR a été injecté comme décrit précédemment selon des concentrations croissantes allant de 100 nM à 2 μM de manière à obtenir l'équilibre de liaison. Pour chaque concentration, le signal à l'équilibre, noté Req, a été mesuré. La saturation fractionnaire, θ = Req/Rmax, a été calculée. Rmax représente le maximum de capacité de liaison de Hise-EthR estimé à 225 RU dans cette expérience. La portion linéaire (de θ = 0,2 à θ = 0,8) de la représentation de Hill, représentant le log (Θ/1-Θ) en fonction du log [His6-EthR], a été ajustée par approximation linéaire de l'équation de Hill, log (Θ/1-Θ) = KH + ΠH [Hise-EthR]. KH et ΠH représentent respectivement la constante de Hill et le coefficient de Hill.
Pour la demi saturation (θ = 0,5), l'équation de Hill est égale à 0, la constante de dissociation globale à l'équilibre (Ko) est donnée par la relation Ko = io kH/nH. La même procédure et les mêmes calculs ont été adaptés et appliqués aux fragments IG-62, IG-37 et IG-36.
A.8. Analyse d'extension d'amorces
L'ARN total a été isolé à partir de M. bovis BCG 1173P2 comme décrit précédemment (Mangan et al., 1997). L'ADN contaminant a été éliminé de la préparation d'ARN en utilisant la DNase I (DNA-free™ kit, Ambiom). Cinq pmoles d'amorce 0-273 : 5'-GCTCTTGGTCGGGCAACGGTCCTG- 3' (SEQ ID N°24) ont été marquées à l'extrémité 5' en utilisant du [γ- 32P]ATP comme décrit précédemment.
10 μg d'ARN totaux ont été mélangés avec 2 pmoles d'amorce marquée et un mélange de dNTP (25 nmole pour chaque nucléotide) dans un volume final de 12 μl. Après hybridation pendant 5 min à 70°C, les mélanges ont été rapidement refroidis dans de la glace, et 4 μl de First- Strand-Buffer [50 mM Tris-HCI, pH 8,3 ; 75 mM KCI et 3 mM MgCI2, 10 mM DTT, DnaseOut (40 U ; Invitrogen)] ont été ajoutés. Le mélange de réaction a ensuite été incubé à 37°C pendant 2 min avant l'addition de 200 unités de M-MLV RT (Reverse transcriptase du virus de la leucémie murine de Moloney ; Invitrogen). La réaction d'extension a été conduite à 37°C pendant 50 min, puis l'enzyme a été inactivée à 70°C pendant 15 min. Une réaction de séquençage en utilisant la terminaison de chaîne au didéoxy avec l'amorce 0-273 a été menée en parallèle et chargée sur un gel de séquence contenant 8 M d'urée et 6% de polyacrylamide, concomitamment aux produits d'extension d'amorce, de manière à déterminer la position du point de départ de la transcription.
A.9. Empreinte à la DNase I : Des expériences de protection à la DNase I ont été réalisées essentiellement comme décrit précédemment (Reisenauer et al., 1999 ;
Bellefontaine et al., 2002). Un fragment Hind\\\-Sph\ de 323 pb et un fragment Xho\-Hind\\\ de 312 pb chevauchant PethA ont été isolés de pCR2.1-PethA (2 + 4) (voir paragraphe A.2 ci-dessus). Le premier fragment a été marqué à son extrémité au niveau du site HindWl en utilisant seulement 50 μCi [α-32P]dATP (3000 Ci/mmol ; Amersham Biosciences) et 5 μl de fragment de Klenow (Invitrogen). Le fragment Xho\-Hind\\\ a été marqué à son extrémité au niveau du site Xho\ en utilisant le même protocole. Les fragments d'ADN marqués (10 000 cpm) ont été incubés avec Hisβ- EthR purifié. De la DNase I diluée (0,025 U, Roche) a été ajoutée à chaque mélange réactionnel pendant 3 min à température ambiante, puis la réaction a été stoppée avec 100 μl de solution stop (200 mM NaCI, 20 mM EDTA et 10% de SDS). Les produits de digestion à la DNAse I ont été extraits au phénol, précipités à l'éthanol et séparés sur un gel contenant 8 M d'urée et 6% de polyacrylamide. Un étalon de sequençage généré avec l'amorce universelle et M13mp18 comme matrice a été utilisé pour identifier la position de la région protégée.
B. Résultats :
B.1. Répression de EthA par EthR
Il a été démontré précédemment que la surexpression de ethR entraînait une résistance accrue à l'ETH chez les mycobactéries, tandis qu'une inactivation par mutation de ethR augmentait la sensibilité à l'ETH (Baulard et al ., 2000), ce qui suggère que EthR régule de manière négative la production de EthA, la mono-oxygénase putative requise pour l'activation de l'ETH.
Afin de confirmer cette hypothèse, la région promotrice de ethA a été insérée en amont du gène rapporteur lacZ dans pBSh-D, un plasmide navette E. co//-mycobacterie qui se réplique sous la forme d'une simple copie dans les mycobactéries (Picardeau et al., 2000). Le plasmide
résultant, appelé pBSh-PethA-/acZ a été électrotransformé dans M. smegmatis mc2155 et M. bovis BCG 1173P2.
Les colonies de M. smegmatis recombinant présentaient une couleur bleue intense sur des boîtes de M7H11 enrichi en X-gal (Figure 1A), révélant l'expression de ethA dans ces conditions. Une couleur bleu pâle a été observée pour les colonies de M. bovis BCG (pBSh-PethA-/acZ) (données non montrées). Les deux souches recombinantes ont ensuite été co-transformées avec pMV261-eιf/ιR, un plasmide multicopie compatible comprenant ethR (Baulard et al., 2000). Les colonies de M. smegmatis et M. bovis BCG résultantes étaient blanches sur boîtes enrichies en X-gal, révélant que la présence de ethR réprimait l'expression de ethA.
De manière à confirmer le phénotype de M. bovis BCG, l'activité β- galactosidase a été quantifiée chez les souches recombinantes : Mycobacterium bovis BCG (pBSh-PethA-/acZ) présentait une activité β- galactosidase significativement supérieure (15,7 U) par rapport à BCG co- transformé avec pBSh-PethA-/acZ et pMV261 -ethR (0,51 U) (Figure 1 B). Ainsi, la surexpression de ethR chez M. smegmatis et chez BCG a conduit à une forte inhibition de l'expression de ethA. Ces résultats confirment l'hypothèse selon laquelle EthR régule de manière négative l'expression de ethA. Par analogie avec la capacité de la tétracycline à inhiber la liaison de TetR sur son opérateur, l'influence de l'ETH sur l'activité du répresseur EthR a été évaluée. Mycobacterium smegmatis co-transformé avec pBSh-PethA-/acZ et pMV261-ef/?R a été cultivé en présence de concentrations variables d'ETH, et les activités β-galactosidase ont été mesurées. Les activités β-galactosidase n'ont pas semblé être influencées par un traitement à l'ETH (données non montrées), indiquant que l'ETH n'entrave pas la capacité de EthR à réprimer ethA, même à haute concentration.
B.2. Liaison de EthR à Pet A démontrée par des tests de modification de la mobilité électrophorétique
Afin de déterminer si la répression de ethA par EthR intervient via une interaction physique directe entre la région promotrice de ethA (PethA) et EthR, des tests de modification de la mobilité électrophorétique (EMSA) ont été réalisés sur un fragment d'ADN de 191 pb marqué au [32P] à son extrémité, contenant la région intergenique ethA-R, amplifié par PCR à partir de l'ADN chromosomique de M. tuberculosis H37Rv. EthR complet et recombinant a été marqué par une étiquette histidine (His6-EthR), à son extrémité N-terminale, afin de faciliter la purification de l'enzyme en utilisant la chromatographie d'affinité Ni2+-chélate. Comme montré sur la figure 2A, l'ajout de quantités croissantes de His6-EthR purifié au fragment d'ADN marqué au [32P] entraînait le retard de la migration du fragment sur des gels de polyacrylamide natifs, révélant que EthR est capable de se fixer sur le région intergenique ethA-R. Des compétiteurs d'ADN spécifiques et non spécifiques ont été utilisés pour déterminer la spécificité de liaison de HiS6-EthR à la région promotrice de ethA (Figures 2 B et 2C). La réapparition d'une sonde libre a été observée lorsqu'un compétiteur spécifique (sonde non marquée) était ajouté en excès de 500 à 1000 fois au mélange contenant la sonde marquée et His6-EthR, tandis que la même quantité de compétiteur non spécifique (voir Matériels et Méthodes, partie A supra) ne modifiait pas l'interaction entre Hise-EthR et la sonde marquée.
B.3. Détermination des sites de liaison de EthR
Afin de localiser précisément l'opérateur de ethA, des expériences d'empreintes à la DNase I ont été réalisées sur les deux brins de l'ADN. Deux fragments, un fragment Hind\\\-Sph\ de 323 pb et un fragment XΛol- HindWl, contenant la région intergenique ethA-R ont été marqués à leurs extrémités sur les brins opposés. Pour les deux fragments, Hise-EthR purifié était capable de protéger la même région de 55 pb après digestion
modérée à la DNase I (Figures 3A et 3B). Cette région se situe de 5 nucléotides en amont du codon d'initiation d'ethA à 16 nucléotides en amont du codon d'initiation d'ethR, couvrant ainsi 55 pb au-delà de la région intergenique de 75 pb (Figure 3C). Ainsi, EthR se lie à une région d'ADN inhabituelllement longue, suggérant qu'il interagit avec son opérateur sous la forme d'un multimère fonctionnel. De manière intéressante, les expériences de protection à la DNase I réalisées avec soit de faibles (Figure 3A) soit de fortes (Figure 3B) concentrations de His6-EthR ont donné lieu à des empreintes équivalentes, suggérant une association coopérative de la protéine à l'opérateur.
B.4. Identification du point d'initiation de la transcription du gène ethA
Afin de comprendre les mécanismes de répression d'ethA par EthR, le point +1 de transcription d'ethA a été identifié en utilisant une analyse par extension d'amorces. Lorsque l'ARN total préparé à partir de M. bovis BCG 1173P2 a été soumis à une analyse d'extension d'amorces, un produit unique a été identifié, commençant au nucléotide A localisé 13 bases en amont du codon d'initiation de la traduction de ethA (Figure 3D). Ce résultat indique que le point d'initiation de la transcription d'efM et les sites de reconnaissance de l'ARN polymérase chevauchent l'opérateur de ethA (Figure 3C).
Lorsque la séquence en amont du point d'initiation de la transcription d'efM a été comparée avec d'autres séquences promotrices mycobactériennes, aucune boîte conservée -10 ou -35 putative n'a pu être identifiée (Figure 3C). Le promoteur d'efM ne ressemble pas au consensus de σ70 de E. coli et donc devrait être classé dans le groupe C des promoteurs régulés proposés par Gomez et Smith (2000).
B.5. Stoechiométrie de l'interaction entre His6-EthR et la région intergenique ethA-R
Un fragment d'ADN double brin biotinylé de 106 pb (Figure 4A ; IG-106) chevauchant la région intergenique ethA-R a été utilisé comme ligand pour mesurer la stoechiométrie de liaison de Hisβ-ËthR par résonance plasmonique de surface (SPR). Des concentrations croissantes de His6-EthR ont été injectées sur une cellule Sensor Chip fonctionnalisée par 205 RU de fragment d'ADN biotinylé jusqu'à saturation du ligand à l'équilibre (Figure 4B). Etant donné que Hise-EthR a un Mr calculé de 25 920 et que 205 RU de fragment d'ADN (69 k Da) ont été fixées sur la surface de la cellule Sensor Chip, le rapport Hise-EthR : ADN a été estimé à l'aide de l'équation 1 pour chaque concentration de Hise-EthR. Une stoechiométrie de 8 molécules de .His6- EthR par molécule d'ADN a été déduite. De manière intéressante, cette stoechiométrie était très rapidement atteinte à un seuil de concentration de Hise-EthR (Figure 4C). Cette expérience a été répétée en utilisant un fragment d'ADN double brin biotinylé de 62 pb (Figure 4A ; IG-62) chevauchant la région de 55 pb identifiée par les expériences d'empreinte à la DNase I. Une stoechiométrie identique de 8 molécules de His6-EthR par molécule d'ADN a été mesurée (Figure 4D), confirmant que toutes les molécules de répresseur se lient dans la région protégée par la DNAse I.
En supposant qu'un homo-octamère a de grandes chances de présenter une certaine symétrie de liaison, le centre de la région protégée par la DNase I (le G en position 32 de la région intergenique ethA-R) semble scinder deux copies d'une longue répétition directe (7-C-A-4-C-G-t/a-a/g- A-T-G-T-C-G-A ; SEQ ID N°25 et 26) qui comprend elle-même des répétitions inversées imparfaites (bases en italique, Figure 4A). Lorsqu'un fragment de 37 pb (Figure 4A, IG-37) chevauchant ces deux, répétitions, directes était fixé sur la surface de la cellule Sensor chip, une liaison coopérative d'en moyenne 4,5 molécules de Hise-EthR par molécule d'ADN a été observée (Figure 4E).
Lorsqu'un fragment PCR de 36 pb (Figure 4A ; IG-36) chevauchant les deux répétitions inversées pratiquement parfaites (T-A-a/g-T-G-T-C-G-A) centrées sur la base 34 était utilisé, la liaison de His6-EthR était fortement réduite (Figure 4F).
β. 6. Détermination du coefficient de Hill (n») et du Ko de l'interaction entre Hise-EthR et la région intergenique ethA-R Afin d'évaluer l'affinité de Hise-EthR pour la région intergenique ethA-R, des analyses de l'interaction à l'équilibre ont été effectuées. 100 RU du fragment d'ADN biotinylé de 106 pb mentionné ci-dessus (IG-106) ont été immobilisées sur une cellule Sensor Chip. Cette faible quantité d'ADN immobilisé a permis à la protéine d'atteindre un équilibre de liaison pour une plus large plage de concentrations de protéines (de 0,1 à 2 μM) dans le volume maximal d'injection possible pour l'appareil BIAcore 2000'. Dans ces conditions, la capacité de la cellule Sensor Chip a été estimée à Rmaχ = 225 RU, ce qui correspond à la même stoechiométrie de 8 molécules His6-EthR que celle déduite des analyses SPR précédentes (voir paragraphe B.5). La saturation fractionnaire de l'ADN à l'équilibre Req/Rmax (où Req est la valeur de RU mesurée à l'équilibre) a été déterminée pour chaque concentration de protéines. La fonction de Hill (Fersht, 1985), a été reportée comme une fonction du log de [His6-EthR] (Figure 5). L'analyse de la partie linéaire de la fonction de Hill (de 0,2 à 0,8) par régression linéaire (R2 = 0,9904) a fourni une constante de liaison globale à l'équilibre (KD) de 146 nM et un coefficient de Hill (ΠH) de 3,46. La valeur de KD représente une valeur moyenne pour les 8 sites de liaison. La valeur théorique maximale du coefficient de Hill est 8 et correspond au nombre de sites de liaison de His6-EthR. La valeur du coefficient de Hill de 3,46, supérieure à 1 , indique une liaison coopérative de HiSβ-EthR sur la sonde d'ADN (Fersht, 1985).
B.7. Nécessité de la présence de l'opérateur pour l'octomérisation de His6-EthR
Les expériences de SPR décrites ci-dessus (voir paragraphe B.5) ont indiqué que EthR se lie de manière coopérative sous la forme d'un homo- octamère à l'opérateur d'ethA.
Afin de déterminer si la multimérisation de EthR nécessite la présence de cette cible d'ADN, Hise-EthR a été soumis à une chromatographie analytique d'exclusion de taille sur une colonne Superdex 200 HR 10/30 en présence d'un fragment PCR de 94 pb contenant la région intergenique ethA-R (voir matériels et méthodes, partie A supra).
Le fragment d'ADN de 94 pb éluait sous la forme d'un pic simple avec une absorbance maximale à 260 nm à un volume d'élution (Ve) de 11 ,11 ml (Figure 6A). L'ajout de faibles quantités de His6-EthR purifié au fragment d'ADN de 94 pb a entraîné l'élution d'un pic simple avec une absorbance maximale à 260 nm à un Ve de 10,27 ml (Figure 6 B). Comme ces résultats ont été obtenus dans les mêmes conditions salines que celles utilisées pour les analyses SPR, le volume d'élution décroissant de l'ADN en présence de Hise-EthR correspond très certainement à une augmentation de la masse moléculaire du complexe d'ADN de 94 pb du fait de la liaison de l'octamère proteique au site opérateur. L'ajout de concentrations croissantes de His6-EthR au fragment d'ADN a conduit à l'apparition progressive d'un pic additionnel éluant 15,30 ml après la charge, avec une absorbance maximale à 280 nm (Figures 6C et 6D). Ce pic correspond à une molécule qui présente un rayon de Stokes pratiquement équivalent à celui du standard de masse moléculaire chymotrypsinogène A (25 000 Da) (Amersham Biosciences). Ces données ont été confirmées en déterminant le volume d'élution de Hise-EthR en l'absence de fragment d'ADN (Figure 6E), et suggèrent fortement que, dans des conditions in vitro qui permettent à Hise-EthR de se lier à son opérateur, le répresseur non lié n'adopte pas une grosse forme multimérique, mais plutôt une forme monomérique. Cependant, étant
donné que la chromatographie d'exclusion de taille est fondée sur le rayon de Stokes plutôt que sur la masse moléculaire per se, le fait queΗis6-EthR se dimérise en solution en l'absence de son site opérateur ne peut être exclu.
B.8. Oligomérisation de EthR in vivo
Afin de déterminer si EthR peut se dimériser en l'absence de son ADN cible, le système double hybride bactérien (BACTH) a été utilisé (Karimova et al., 1998). Dans ce système, l'interaction de deux protéines entraîne une complémentation fonctionnelle entre les deux domaines de l'adénylate cyclase (CyaA) de Bordetella pertussis, conduisant à la synthèse d'AMPc. En tant que molécule de régulation soluble, AMPc est ensuite capable d'activer la transcription de gènes AMPc dépendants. ethR a ainsi été clone en phase avec la région codant le domaine de 25 kDa de CyaA, donnant pT25-EthR. ethR a ensuite été fusionné avec la région codant le domaine de 18 kDa de CyaA de manière à produire pT18-EthR. Une souche de E. coli cyclase-déficiente (DHP1) (Karimova et al., 1998), a été transformée avec des combinaisons différentes de plasmides (Figure 7). Lorsqu'elles étaient co-transformées avec pT25- EthR et pT18-EthR, les colonies retrouvaient leur capacité à pousser sur milieu minimum enrichi en maltose. Aucun des clones obtenus par la co- transformation des divers plasmides contrôles n'était capable de pousser, démontrant que la complémentation fonctionnelle de T25-EthR et T18- EthR était spécifiquement liée à l'interaction de deux molécules de EthR (Figure 7). Puisqu'aucun ADN homologue à l'opérateur de EthR n'a été détecté dans le génome de E. coli, ce résultat suggère que EthR est un dimère lorsqu'il n'est pas lié à son opérateur.
II- Purification et cristallisation du répresseur Hise-EthR :
A. Préparation de la protéine Hisg-EthR
L'entièreté de l'ORF codant le répresseur EthR de M. tuberculosis a été sous-cloné dans le vecteur d'expression pET15b (Novagen) afin de permettre la production de la protéine fusionnée à un tag-Histidineβ amino- terminal. E. coli BL21 (DE3) a été transformé et les clones recombinants ont été sélectionnés sur LB contenant 100 μg/ml d'ampicilline. Cinq ml de LB contenant 100mg/ml d'ampicilline ont été inoculés avec E.coli BL21(DE3)(pET15b-His6EthR) et mis en culture sous agitation à 37°C durant une nuit. La préculture a été utilisée pour inoculer 2 litres de milieu LB à une D06oo de 0,1. A DOβoo = 0,6-0,7, l'expression de ethR a été induite par addition de 1 mM IPTG. Après 2 heures d'induction à 37°C, les bactéries ont été récupérées par centrifugation à 7500 tr/min, avec une centrifugeuse Sorval RC 5B PLUS, rotor SS-34. Le culot bactérien a ensuite été congelé à -20°C. Le culot a été resuspendu dans 10 ml de tampon A (50 mM Tris, pH 7,5, 10 mM imidazole, 250 mM NaCI) puis lysé par passage à la presse de French (Bioritech) sous une pression de 6,2 x 106 Pa. Le lysat a été centrifugé 30 minutes à 4°C à 18000 tr/min dans une centrifugeuse Sorvall RC-5B PLUS, rotor SLA-3000 et le surnageant récupéré.
25 ml de résine d'affinité (chelating Sepharose Fast Flow - Amersham Biosciences) ont été lavés par 5ml d'eau bidistillée, puis chargés en Nickel par ajout de 5 volumes de NiS04 100mM. La résine a été lavée avec 5 volumes d'eau bidistillée et équilibrée avec 5 volumes de tampon A. La résine a été chargée sur une colonne jetable. Le surnageant de lyse bactérienne a été chargé sur la colonne d'affinité à un débit de 2 ml/min à l'aide d'une pompe péristaltique P-3 (Pharmacia Biosciences). La colonne a été lavée par passage de 10 volumes de tampon 50 mM Tris pH 7,5 ; 50 mM imidazole ; 250 mM NaCI. La protéine His6-EthR a été éluée par 1 ,5 volume de tampon d'élution (50 mM Tris pH 7,5 ; 250 mM
imidazole ; 250 mM NaCI). Les fractions récupérées ont été analysées sur gel SDS-PAGE à 12,5%. Les fractions présentant une pureté suffisante ont été groupées et dialysées 2 fois dans 10 mM Tris pH 7,5 ; 200 mM NaCI, à 4°C. La solution a ensuite été concentrée sur colonne Centriplus YM-3 (Amicon), puis par Macrosep 3K (Pall), afin d'atteindre une concentration finale de 50mg/ml de protéine.
Cristallisation : La cristallisation a été réalisée à 20 °C, par la méthode de la goutte suspendue en diffusion de vapeur (2 μl de solution de protéine, 2 μl de solution de précipitant et 0,75 ml de réservoir). Des cristaux d'Hisβ-EthR ont été obtenus en 7-10 jours avec la solution 15 du Cryokit de cristallisation pour protéines (Sigma) (0,17 M sulfate d'ammonium ; 0,085 M Na-cacodylate pH 6,5 ; 15% glycérol ; 25,5% PEG8000). Ces cristaux sont dénommés forme 2 dans la suite du protocole.
B. Marquage de la protéine EthR par des méthionines séléniées
E.coli BL21(DE3)(pET15b-His6EthR) a été cultivé à 37°C dans 2 litres de milieu M9 contenant 6 g/l de Na2HP04, 3 g/l de KH2P04, 0,5 g/l de NaCI ; et additionnés, au départ de la culture, de 4 g/l de glucose, 1 g/l de NH4CI, 2 ml de MgS04 1 M, 2 ml de CaCI2 100 mM, 20 ml du mélange de vitamines MEM (Sigma) et d'ampicilline à 100 mg/l., La voie de biosynthèse de la méthionine de E.coli BL21(DE3)(pET15b-HiS6EthR) a été bloquée à Dθ6oo= 0,5 (Doublie, 1997), par ajout d'acides aminés inhibant les aspartokinases: lysine à 100 mg/l, threonine à 100 mg/l, phénylalanine à 100mg/l, leucine à 50 mg/l, isoleucine à 50 mg/l, valine à 50 mg/l et sélénométhionine à 75 mg/l. L'incubation à 37°C a été poursuivie pour atteindre une Dθ6oo=0,6, puis 1 mM d'IPTG a été ajouté afin d'induire l'expression d'ethR. La culture a été agitée à 37°C pendant 3 heures supplémentaires. Le culot bactérien, récupéré par centrifugation à
7500 tr/min dans une centrifugeuse Sόrvall RC-5B PLUS, rotor SLA-3000, a été resuspendu dans 20 ml de tampon de lyse (50 mM Tris pH 7,5, 10 mM imidazole, 250 mM NaCI). 1 ml de mélange anti-protéasique Complète (Roche) a été ajouté avant de casser les bactéries à la presse de French. Le lysat a été centrifugé à 18000 tr/min, 30 minutes, à 4°C, avec une centrifugeuse Sorvall RC-SB PLUS, rotor SS-34. Le surnageant a été chargé à l'aide d'une pompe péristaltique P-3 (Amersham Biosciences) sur 25 ml de résine d'affinité (Chelating Sepharose Fast Flow- Amersham Biosciences) pré-équilibrée par 5 volumes de tampon de lyse. La protéine Hise-EthR a été éluée par 1 ,5 volume de tampon d'élution (50 mM Tris pH 7,5, 250 mM imidazole, 250 mM NaCI). Les fractions récupérées ont été supplémentées par 10 mM de Dithiothreitol (DTT), 0,2 mM d'acide éthylènediaminetétraacétique (EDTA), puis analysées par gel SDS-PAGE 12,5% coloré au bleu de Coomassie. Les fractions pures ont été regroupées et dialysees 2 fois contre 10 mM de Tris, pH 7,5, 200 mM de NaCI, 10 mM de DTT et 0,2 mM d'EDTA. La solution a ensuite été concentrée comme décrit ci-avant pour atteindre une concentration spectrale de 10 mg/ml, puis stockée à -80°C.
Cristallisation de EthR-sélénométhionine : Avant d'être utilisée pour la cristallisation, Hisβ-EthR/met-sél a été décongelée sur glace et concentrée à 50 mg/ml à l'aide de microcons 3K (Amicon), à 4°C. La protéine séléniée a été cristallisée par la méthode des gouttes suspendues en diffusion de vapeur (2 μl de solution de protéine, 2 μl de solution de précipitant, 0,75 ml de réservoir), à une température de 20°C. Des cristaux sont apparus entre 7 et 10 jours dans les gouttes contenant 0,17 M sulfate d'ammonium (Fluka), 0,085 M Na-cacodylate pH 6,5 (Sigma), 15% glycérol (ICN) et 25% de polyéthyléne glycol 8000 (Fluka). Ces cristaux ont été utilisés pour déterminer la structure tridimensionnelle d' His6-EthR/met-sél. Ils sont dénommés cristaux de forme 1 dans la suite du protocole.
C- Obtention d'une seconde forme cristalline
Des essais de co-cristallisation ont été réalisés à partir de la protéine HiS6- EthR/met-sél en présence de 5 fragments différents d'ADN longs de 15 pb et couvrant la zone de fixation de la protéine sur l'opérateur de ethA (voir section I supra). La protéine a été décongelée sur glace et concentrée à 50 mg/ml. Le ratio protéine-ADN a été fixé à 2 : 1. Le mélange a été soumis à la co-cristallisation par la méthode des gouttes suspendues en diffusion de vapeur (1 μl de solution de protéine, 1 μl de solution d'ADN, 2 μl d'agents cristallisants, 0,75 ml de réservoir), à une température de 20°C. Des cristaux ont été obtenus après 2 à 3 jours d'incubation, pour le mélange His6-EthR/met-sél / fragment 1 d'ADN (SEQ ID N°27) avec une solution de cristallisation contenant 0,17 M sulfate d'ammonium (Fluka), 0,085 M Na-cacodylate pH 6,5 (Sigma), 15% glycérol (ICN) et 35% PEG8000 (Fluka). Ces cristaux sont dénommés forme 3 dans la suite du protocole.
D- Acquisition des données de diffraction et détermination de la structure d'EthR
Les cristaux de la forme 1 (cristaux élaborés à partir de protéine Hisβ- EthR/met-sél contenant des sélénométhionines) ont été utilisés pour déterminer la structure cristallographique.
L'acquisition des données de diffraction a été réalisée sur la ligne de lumière BM14 au synchrotron européen de Grenoble (ESRF). La procédure d'acquisition des données et de détermination de la structure a été la suivante.
Un cristal de la forme 1 a été congelé à l'aide d'un système de cryogénie de marque Oxford. Les données de diffraction ont été mesurées par un détecteur de type CCD, de marque Marresearch, de 133 mm de diamètre, positionné à 150 mm du cristal. Les clichés de diffraction ont été
enregistrés pour une oscillation du cristal de 1 °. Le temps d'exposition par cliché a été réglé sur 20 secondes. 360 images ont été mesurées à la longueur d'onde de 0,97865A. La matrice d'orientation du cristal dans le faisceau de rayons X a été déterminée avec le logiciel XDS. Les données de diffraction ont été intégrées et réduites avec le même logiciel. Les cristaux obtenus appartiennent au groupe d'espace P2-|2-ι2 (Figure 8) et présentent les paramètres de maille suivants : a=57,57 A; b=85,94 A; c=100,41 A. Ils contiennent deux monomères par unité asymétrique. Comme le montre la Figure 8, la structure révèle deux monomères du répresseur EthR associés en un dimère symétrique. Les monomères sont associés par leur domaine de fixation du ligand.
Chaque monomère (acides aminés 22 à 215) est entièrement hélicoïdal et comprend 9 hélices (respectivement α1 à α9 et 1 ' à α9', voir Figure 8). Le cristal a révélé la présence d'une molécule de ligand par monomère, enchâssée dans un tunnel formé par les hélices α4, α5, α6, al, α8 et α8' (provenant du second monomère). Les centres des domaines HTH (« hélice-tour-hélice ») de fixation à l'ADN de cette structure sont distants de 52 A. La détermination des phases associées à chaque facteur de structure a été déterminée par la méthode « SAD » («Single Wavelength Anomalous Diffraction »). Cette méthode est basée sur l'utilisation du signal anomal du sélénium incorporé dans la protéine via les sélénométhionines (voir préparation des cristaux de forme 1 ). Ce signal est maximal à la longueur d'onde employée (0,97865 A), longueur d'onde sélectionnée sur base d'une analyse d'émission de fluorescence par les cristaux. La position des atomes de sélénium dans l'unité asymétrique du cristal a été déterminée avec le logiciel Shelxd. Ces positions ont été affinées et les phases initiales calculées avec le logiciel Sharp. Les phases ont ensuite été améliorées par des procédures de modification de densité électronique implementees dans les logiciels Solomon et Dm, de la suite de logiciels CCP4. Le modèle moléculaire a été initialement construit avec le logiciel
Arp/Warp et le logiciel TURBO-FRODO. La structure finale a été obtenue par minimisation en énergie (procédure d'affinement) avec le logiciel CNS et inspectée manuellement avec le logiciel TURBO-FRODO. Les paramètres décrivant la topologie du ligand d'EthR ont été obtenus avec le logiciel HIC-UP.
Les cristaux de la forme 2 sont semblables aux cristaux de la forme 1. Ceux-ci ont cependant été obtenus avec de la protéine recombinante non séléniée. Les conditions de cristallisation sont identiques, mais la provenance des solutions de cristallisation est différente. L'acquisition des données de diffraction a été réalisée à l'Institut de Biologie de Lille, en utilisant l'équipement du laboratoire de cristallographie macromoléculaire. La procédure d'acquisition des données et de détermination de la structure a été la suivante. Un cristal de la forme 2 a été congelé à l'aide d'un système de cryogénie de marque Oxford. Les données de diffraction ont été mesurées par un détecteur de type Imaging Plate, de marque Marresearch, de 345 mm de diamètre, positionné à 250 mm du cristal. Les clichés de diffraction ont été enregistrés pour une oscillation du cristal de 1 °. Le temps d'exposition par cliché a été réglé sur 120 secondes. 180 images ont été mesurées à la longueur d'onde de 1 ,5418 A. La matrice d'orientation du cristal dans le faisceau de rayons X a été déterminée avec le logiciel XDS. Les données de diffraction ont été intégrées et réduites avec le même logiciel. Les phases associées à chaque facteur de structure ont été déterminées par positionnement isomorphe du modèle moléculaire d' HiSδ-EthR/met-sél (obtenu à partir des cristaux de type 1 ). La structure finale a été obtenue par minimisation en énergie (procédure d'affinement) avec le logiciel CNS et inspectée manuellement avec le logiciel TURBO-FRODO. Les paramètres décrivant la topologie du ligand d'EthR ont été obtenus avec le logiciel HIC-UP. Les cristaux de la forme 3 appartiennent au groupe d'espace P4ι2-|2, avec les paramètres de maille suivants : a=122,2 A; b=122,2 A; c=33,6 A.
Ceux-ci ont été obtenus avec de la protéine recombinante séléniée (His6- EthR/met-sél). L'acquisition des données de diffraction a été réalisée à l'Institut de Biologie de Lille, en utilisant l'équipement du laboratoire de cristallographie macromoléculaire. La procédure d'acquisition des données et de détermination de la structure a été la suivante.
Un cristal de la forme 3 a été congelé à l'aide d'un système de cryogénie de marque Oxford. Les données de diffraction ont été mesurées par un détecteur de type Imaging Plate, de marque Marresearch, de 345 mm de diamètre, positionné à 250 mm du cristal. Les clichés de diffraction ont été enregistrés pour une oscillation du cristal de 1 °. Le temps d'exposition par cliché a été réglé sur 600 secondes. 100 images ont été mesurées à la longueur d'onde de 1 ,5418 A. La matrice d'orientation du cristal dans le faisceau de rayons X a été déterminée avec le logiciel XDS. Les données de diffraction ont été intégrées et réduites avec le même logiciel. La détermination des phases associées à chaque facteur de structure a été effectuée par la méthode du remplacement moléculaire (implémentée dans le logiciel AMoRe) en utilisant comme modèle la structure d'EthR obtenue à partir des cristaux de type 1. La structure finale a été obtenue par minimisation en énergie (procédure d'affinement) avec le logiciel CNS et inspectée manuellement avec le logiciel TURBO-FRODO. Les paramètres décrivant la topologie du ligand d'EthR ont été obtenus avec le logiciel HIC-UP. Les cristaux de la forme 3 ne contiennent qu'un monomère par unité asymétrique, confirmant la symétrie stricte d'ordre deux dans l'homodimère d'EthR en présence d'un inducteur lipophile.
E. Analyse de la structure
L'analyse de la structure de EthR confirme l'appartenance de ce répresseur transcriptionnel à la famille dénommée « TetR/CamR ». A l'heure actuelle, les structures de deux membres de cette famille, TetR et QacR, ont été déterminées, dans les conformations induites et non
induites. TetR est le répresseur transcriptionnel de TetA, protéine responsable de la résistance à la tétracycline chez les bactéries à gram négatif. La fonction de répression de TetR est inhibée par la tétracycline, qui se fixe de manière symétrique à chaque monomère sur l'homodimère TetR. QacR est le répresseur transcriptionnel de QacA, protéine responsable, chez Staphylococcus aureus, de la résistance à de nombreux antiseptiques et désinfectants. QacR et TetR sont des homodimères, de topologie différente bien que composés tous deux uniquement d'hélices α. EthR, tout comme TetR et QacR, est un homodimère. Chaque monomère présente une topologie semblable à celle de QacR et se compose de 9 hélices α. Les trois hélices N terminales de chaque monomère composent le motif de fixation à l'ADN de type HTH (α2, α3), stabilisé par α1 (Figure 8). Les 6 autres hélices α composent le domaine de fixation du ligand ainsi que la zone de dimérisation (Figure 9). Le motif de dimérisation est constitué des hélices α8 et α9 (avec αδ' et α9') dans EthR, tout comme dans QacR. La dimérisation couvre une surface de 1562 A2 par monomère de EthR, une surface de contact comparable à celle observée pour QacR (1530 A2). Bien que les domaines de fixation du ligand de QacR et EthR se ressemblent, ils présentent une homologie de séquence faible, ce qui est reflété par les orientations relatives différentes des hélices formant ces domaines (RMSD global des chaînes principales de 2 A pour les hélices α4 à α9). Les hélices α4, α7 et α9 sont orientées de manière similaire dans QacR et EthR, tandis que les hélices α5, αδ et αδ présentent des orientations axiales plus divergentes, entraînant des déplacements allant jusqu'à 5 A entre les résidus topologiquement équivalents. Cette observation traduit la spécificité des répresseurs vis-à-vis de leurs différents inducteurs respectifs. L'orientation relative des motifs HTH et du
domaine de fixation du ligand sont également légèrement différents (Figure 9), ce qui donne lieu à un dimère EthR plus aplati. On précise que les termes « ligand » et « inducteur » sont ici synonymes et renvoient à la définition donnée précédemment. En outre, la forme « ligandée » ou « induite » du répresseur EthR correspond au répresseur « lié à un ligand ».
De la même façon, dans le contexte de l'invention, les termes « fixation » et « liaison » sont employés indifféremment. Les changements de conformation résultant de la fixation de ligands sur QacR ont été décrits. La fixation des ligands provoque des modifications de conformation qui aboutissent à une réorientation relative des deux domaines HTH au sein du dimère. Cette réorientation produit un écartement des motifs HTH de telle sorte que ceux-ci ne puissent plus se fixer dans le sillon majeur de la molécule d'ADN cible. La fixation des ligands à QacR produit une transition tour-hélice qui prolonge l'hélice α5. Ce mouvement se répercute sur les hélices environnantes. Il est à noter qu'une seule molécule de ligand se fixe par dimère de QacR, résultant en un dimère asymétrique. Le monomère sur lequel le ligand se fixe subit le changement conformationnel le plus drastique (élongation de l'hélice α5, et répercussion sur les hélices adjacentes). Cependant, la fixation d'un ligand dans un monomère affecte dans une moindre mesure la conformation du second monomère du répresseur, le signal se propageant via la zone de dimérisation. Globalement, ces modifications de conformation provoquent une augmentation de la distance « centre à centre » des hélices de reconnaissance des deux motifs HTH α3-α3' dans les dimères de QacR de 37 A (forme libre ou liée à l'ADN) à 4δ A (forme ligandée ou induite en présence de ligands). Cette augmentation de distance explique l'incapacité de fixation de la forme induite de QacR à l'ADN. Les trois formes cristallines d'EthR obtenues révèlent toutes la présence d'un ligand lipophile associé à chaque sous-unité du dimère (octanoate
d'hexadécyle (HeOc) ; pour la caractérisation spécifique de ce ligand, se reporter à la partie III ci-dessous).
Cette forme induite d'EthR avec son ligand lipophile révèle des caractéristiques structurales similaires à celles observées dans la structure de QacR sous la forme induite. L'hélice α5 de EthR présente une longueur similaire à l'hélice α5 de QacR dans le monomère fixant le ligand.
Une analyse détaillée de la structure de EthR a indiqué que les hélices de reconnaissance de l'ADN α3 et α3' sont séparées par 52 A. Une telle distance entre les domaines HTH est, par analogie avec QacR, incompatible avec la liaison du répresseur sur son ADN cible (Schumacher et al., 2001 et Schumacher et al., 2002). EthR fixe un ligand par monomère, de manière symétrique, au contraire de QacR qui ne fixe qu'un seul ligand par dimère. La liaison du ligand entraîne une transition tour-hélice des résidus Tδ9 à Y93, uniquement au niveau de la sous-unité liée au ligand, de sorte que l'extrémité C-terminale de α5, mais pas de α5', est prolongée par un tour. Y92 et Y93 sont donc capables d'interagir avec le ligand. La transition tour-hélice est essentielle non seulement pour la liaison du ligand, mais également pour l'induction, étant donné que la formation du tour supplémentaire dans l'hélice α5 entraîne un repositionnement de αδ et du domaine de liaison à l'ADN qui lui est attaché. Comme indiqué supra, le mouvement de α6 provoque la translation et la rotation du domaine de liaison à l'ADN qui relargue QacR de son site opérateur. La longueur de l'hélice α5, une empreinte dans l'induction de QacR, est comparable dans EthR et QacR liés à leur ligand, ce qui suggère des mécanismes d'induction similaires.
Cependant, du fait de la présence d'une molécule de ligand par monomère dans EthR, à la fois les hélices α5 et α5' subissent la transition tour-hélice et le déplacement du motif HTH putatifs, ce qui entraîne une
conformation plus ouverte des hélices de reconnaissance séparées par 52 A.
Ce mécanisme d'induction se distingue de celui de TetR, lequel se lie à 2 ligands par dimère et utilise un mécanisme d'induction, impliquant plusieurs mouvements « à travers hélice », dans lequel la liaison de la tétracycline augmente la distance centre à centre des hélices de reconnaissance de l'ADN de 3 A seulement (Orth et al., 2000). Par ailleurs, le domaine de fixation du ligand de EthR est unique et ne présente pas d'analogie moléculaire avec celui de QacR. Le site de fixation du ligand chez EthR traverse le domaine défini par les hélices α4 à α9. Il est délimité par les hélices α4, α5, α6, al, α8 et αδ' (provenant du second monomère) et se présente sous la forme d'un tunnel ou poche se prolongeant parallèlement aux hélices α4, α5 et al. Ainsi, cette poche est constituée de résidus appartenant à toutes les hélices du domaine de liaison du ligand de EthR. Le seul portail d'entrée apparent dans le site de liaison du ligand est formé par la divergence des hélices α6, α7 et α8.
Comme le montre la Figure 11 , une des extrémités du ligand est quasi parallèle à α6 (C1 à C6 dans la molécule de ligand HeOc décrite infra), près de la surface de la protéine. Ensuite, elle s'enroule aux alentours du résidu Trp13δ (C7 à C15) et s'enfonce dans le domaine de liaison du ligand, parallèlement aux axes des hélices α4, α5 et α7. La structure indique que la région C1 à C15 de HeOc est divisée en 4 segments présentant des courbures différentes (C1 à C6 ; C6 à C9 ; C9 à C12 et C12 à C15), et qui contournent le cycle aromatique du résidu W133 (Figure 11 ). HeOc adopte une conformation enfouie étirée de la position C15 jusqu'à son extrémité C24, sur environ 12 A. Ainsi, le ligand HeOc adopte pour l'essentiel une conformation étirée, sur une distance de 21 A entre les carbones C1 et C24, avec une région enroulée (C1 à C15) puis une chaîne carbonée linéaire (C15 à C24).
La poche de liaison du ligand est définie par les résidus de EthR suivants (voir Figure 11 , dans le sens C1 vers C24) : R128, V134, G124, L76, Q125, F187, F184, T121 , W138, F114, L183, E180, M142, N179, N176, W145, F110, W207, T149, 1107, Lδ7, V152, Y148, G106, W103 et M102. La cavité de liaison de la région C15 à C24 est riche en acides aminés hydrophobes (M142, 1107, Lδ7, V152, M102) et aromatiques (W145, F110, W207, Y14δ, W103). Elle contient également 2 asparagines, toutes deux situées face aux carbones C17 et C13 de HeOc (Figure 11 ). Une molécule d'eau est également enfouie via un pont hydrogène avec le résidu N179 près du carbone C17 du ligand. 4 résidus aromatiques jouent un rôle particulièrement important dans la courbure des segments C6 à C15 : F114, F110, W13δ et W145. W133 est crucial pour délimiter le domaine de liaison du ligand. Il est stabilisé par les interactions de sa chaîne latérale NE1 avec OE1 du résidu E160. E1δ0 est très stabilisé, étant donné qu'il interagit aussi avec NE du résidu R1δ1 appartenant à l'autre monomère présent dans le dimère de EthR, près de l'axe de double symétrie.
Bien que la structure de EthR non lié ne soit pas encore élucidée, il a été observé que F110 et F114, qui appartiennent au dernier tour de α5, pointent en direction du site de liaison du ligand et interagissent avec le ligand. Par analogie avec le changement au niveau de Y92 lorsque QacR est lié à son ligand, il apparaît qu'une augmentation de la distance centre à centre des domaines HTH lorsque EthR se lie à son ligand puisse être due à des changements conformationnels naissant dans la portion distale de α5, sous la forme d'une transition tour-hélice qui aboutit au changement aromatique près du site de liaison du ligand. QacR est induit par liaison à des ligands lipophiles cationiques mono- et bivalents présentant une grande diversité structurelle. Les structures du répresseur QacR lié à divers ligands cytotoxiques ont révélé la présence de 2 sites de liaison séparés mais potentiellement chevauchants au sein
d'une seule poche. Ces 2 sites de liaison sont pratiquement parallèles à αδ de QacR et se terminent par α5 qui ferme la cavité. La comparaison des sites de liaison de QacR et EthR a révélé que les 2 domaines de liaison du ligand possèdent le même portail d'entrée du ligand. HeOc chevauche en partie le site 1 de QacR, adjacent à la porte d'entrée du ligand. Toutefois, le site 2 de QacR n'est pas retrouvé dans le complexe HeOc-EthR du fait des orientations différentes des hélices α5 et αδ qui rétrécissent la cavité de liaison de EthR. A la place, EthR possède une seconde cavité, non observée dans QacR, qui s'étend sur environ 15 A, parallèlement à α4 et α7 (Figure 12). Le site 2 est délimité du site 1 de EthR par les positions W13δ et E1δ0. Ce second site de fixation dans EthR n'est pas complètement occupé par HeOc étant donné qu'il contient en outre une molécule d'eau enfouie près de la position C17 de HeOc. En général, dans QacR, les cavités de liaison non occupées par les divers ligands contiennent elles aussi des molécules d'eau.
III- Caractérisation des ligands du répresseur EthR :
A- Matériels et méthodes : Afin de caractériser le ligand, 750 ng de co-cristal d'EthR-ligand ont été lavés à l'aide du tampon de cristalisation, transférés individuellement dans du chloroforme afin de dénaturer les protéines et d'en extraire le ligand. L'analyse du chloroforme d'extraction par GC/MS a permis d'identifier l'hexadecyl octanoate (HeOc) comme produit majeur présent dans la solution. La structure de l'HeOc a ensuite été superposée au spectre d'analyse RX du cristal et s'avère compatible avec la densité électronique correspondant au ligand.
B- Résultats : Le ligand lipophile co-purifié et co-cristallisé avec le répresseur EthR a été identifié, à la fois par cartographie de la densité d'électrons (Figure 13) et par analyse GC-MS/MS (Figure 14). L'équivalent de 750 ng d'EthR co-cristallisé a été extrait par immersion des cristaux dans le chloroforme. Le profil d'élution de la chromatographie en phase gazeuse présente un pic spécifique à 22,16 min. Le spectre d'ionisation électronique (El) de ce pic a été comparé à une banque de spectres et correspond à l'octanoate d'hexadécyle (HeOc). Ce spectre présente un pic correspondant à l'ion moléculaire M+ à m/z=36δ. Les ions présentant les caractéristiques m/z = 41 , 55, 57, 69, 63, 97, 111 sont caractéristiques des molécules CnH2n-ι. Les ions m/z = 43, 57, 71 correspondent à des CnH2n+ι. L'ion m/z = 144 représente un réarrangement de type Me Lafferty de l'ester et m/z = 269 correspond à l'ion C16H330-CO+ (Me Lafferty et Turecek, 1993).
La co-cristallisation d'un ligand a été décrite pour la première fois pour la structure cristalline du complexe RXR α (F31δA)/RAR α, en révélant la présence d'un acide gras responsable de la propriété d'agoniste constitutif de ce mutant (Bourguet et al., 2000). Plus récemment, la structure du cristal du domaine de liaison du ligand de ROR β a été résolue en liaison avec un ligand stéarate (Potier et al., 2003). La molécule de stéarate agit comme un « remplisseur » plutôt que comme un véritable ligand, étant donné qu'un faible pourcentage d'occupation de la poche et une conformation en partie désordonnée ont été observés, et, de surcroît, qu'aucun effet activateur ou antagoniste sur l'activité de ROR β n'a été décelé.
En revanche, l'homodimère de EthR co-cristallise systématiquement avec HeOc selon une stoechiométrie de 2:2, avec une occupation totale et une densité d'électrons bien définie, ce qui indique un rôle essentiel de HeOc dans la stabilisation de la conformation induite de EthR.
Par ailleurs, de manière intéressante, il a récemment été montré que EthA est une monooxygénase du type Baeyer-Villiger, capable de convertir une large gamme de cétones, y compris des cétones à longue chaîne, en leurs esters correspondants (Fraaije et al., 2004). Compte tenu de la régulation du gène ethA par le répresseur EthR, il apparaît que des substrats de EthA pourraient servir de ligands du répresseur EthR.
IV - Augmenter la sensibilité des mycobactéries à l'ETH : des perspectives thérapeutigues :
A. Tests de synergie :
M. smegmatis me2 155 a été cultivé dans des flacons Erlenmeyer de 250 ml contenant 100 ml de milieu Sauton. Les cellules ont été incubées à 37°C sous agitation pendant 2 jours. Au cours de cette expérience, la synergie entre l'ETH et une cétone donnée a été déterminée comme étant la capacité de cette cétone à promouvoir la bactério-toxicité de l'ETH à une concentration inférieure à la concentration minimale inhibitrice (15μg/ml). L'effet phénotypique des cétones a été évalué en déposant des dilutions en série de la culture sur milieu LB contenant une faible concentration de ETH (5μg/ml), 1 mM de cétones (benzylacétone, 2- octanone, 3-octanone ou 2-décanone), ou une combinaison de l'ETH (5μg/ml) et des cétones (1 mM). L'aspect et le nombre des colonies pour chaque dépôt ont été analysés après trois jours de croissance à 37°C.
B. Résultats
La répression du gène ethA par le répresseur EthR réduit la sensibilité des mycobactéries à l'ETH. A l'inverse, un mutant EthR-déficient montrait une sensibilité augmentée à l'ETH par rapport à la souche mère (Baulard et al., 2000).
Une interférence avec l'activité de EthR conduit donc à une augmentation de la sensibilité à l'ETH.
L'interférence avec EthR in vivo a été testée en utilisant l'octanoate d'hexadécyle synthétique. Cependant, l'octanoate d'hexadécyle est un composé trop hydrophobe pour être utilisé en association avec un solvant biologiquement compatible.
D'autres composés apparentés, plus solubles, ont donc été recherchés. Comme indiqué ci-dessus, EthA a récemment été décrit comme étant capable de convertir une large gamme de cétones, incluant des alcanones à longue chaîne et des cétones aromatiques, en leur esters correspondants, suggérant un rôle possible de cet activateur dans le métabolisme des acides mycoliques (Fraaije et al., 2004). La capacité de EthR à se lier à un long ester hydrophobe tel que l'octanoate d'hexadécyle est compatible avec cette hypothèse et prouve le lien entre la régulation du gène ethA et l'activité de la monooxygénase EthA.
Il a donc été envisagé que certaines des molécules décrites par Fraaije et al. pouvaient constituer des ligands de EthR intéressants au sens de la présente invention. Afin de déterminer si certaines de ces molécules pouvaient effectivement interférer avec l'activité du répresseur EthR, et par là-même modifier la sensibilité des mycobactéries à l'ETH, 4 cétones différentes ont été testées pour leur aptitude à augmenter la sensibilité de M. smegmatis à l'ETH. Cette aptitude a été testée sur la croissance des mycobactéries, sur boîtes d'agar additionné de 5μg/ml d'ETH, ce qui est une concentration significativement inférieure à sa concentration minimale inhibitrice, laquelle est de 15μg/ml.
L'une d'entre elles, la benzylacétone (BA), a montré un effet bactériostatique important lorsqu'elle était co-administrée avec une faible dose d'ETH (5μg/ml). Aucun effet antimycobactérien de la benzylacétone n'a été observé en l'absence d'ETH, ce qui démontre donc la synergie stricte de ce composé avec l'ETH (voir figure 15).
Des inhibiteurs puissants d'EthR pourraient donc entraîner une réduction drastique de la dose thérapeutique d'ETH requise en thérapie et, par conséquent, réduire la toxicité associée au traitement de la tuberculose par l'ETH et des prodrogues apparentées. En sus de l'ETH, EthA est également impliqué dans l'activation d'autres thioamides, tels que la thioacétazone et l'isoxyl (De Barber et al., 2000). En dépit de son efficacité, l'Organisation Mondiale de la Santé ne préconise pas l'utilisation de thioacétazone, en particulier chez les individus infectés par le VIH du fait d'un risque de réaction dermique sévère (Blanc et al., 2003). La dé-repression du gène ethA par des ligands de EthR pourrait donc permettre de réduire la dose thérapeutique de la thioacétazone et de l'isoxyl. Il a récemment été montré que ce dernier composé ciblait une désaturase lipidique (Phetsuksiri et al., 2003), qui représente une cible anti-mycobactérienne encore non exploitée à des fins thérapeutiques.
Mycobacterium leprae est également sensible à l'ETH et à des dérivés tels que le prothionamide, mais n'est pas sensible à des niveaux cliniquement significatifs d'INH, du fait de lésions multiples dans le gène katG de cet organisme. C'est pourquoi l'INH ne peut être utilisé pour traiter la lèpre. Cependant, étant donné qu'à la fois ethR et ethA sont conservés dans le génome réduit de M. leprae, le développement de ligands de EthR inhibiteurs de son activité répresseur, comme additifs médicamenteux à l'ETH et à ses dérivés, pourrait donc permettre d'améliorer la chimiothérapie de la lèpre.
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