Procédé et dispositif de traitement d'affluents, notamment de l'eau, par séparation membranaire.
La présente invention concerne le traitement d'effluents, par exemple de l'eau contenant notamment des micro-polluants organiques, des matières organiques naturelles et/ou synthétiques et des composés biodégradables .
Au cours des dernières années, on a utilisé de plus en plus largement des techniques de séparation membranaire à faible pression (microfiltration et ultrafiltration) pour le traitement de l'eau. Cette généralisation de ces techniques est due au fait que leur mise en œuvre permet une excellente élimination des particules ainsi que des éléments pathogènes les plus importants.
Bien que ces techniques de séparation membranaire peuvent se substituer aux étapes de clarification classiques pour le traitement d'eaux à faible turbidité, il est cependant généralement nécessaire de prévoir un prétraitement de l' effluent avant de le soumettre à la séparation par membranes, ce prétraitement ayant notamment pour but :
- d'éviter le colmatage des membranes en réduisant la teneur en particules de l' effluent à traiter et
- d'éliminer les polluants dissous afin de maintenir l'efficacité des membranes.
La présente invention se propose d'apporter un procédé de traitement d'effluents comportant un tel prétraitement, ce procédé permettant de résoudre les deux problèmes techniques distincts mentionnés ci-dessus.
L'état antérieur de la technique, dans ce domaine particulier, est à l'heure actuelle le suivant.
En ce qui concerne la réduction de la teneur en particules de l' effluent à traiter, notamment d'eaux à turbidité élevée, avant la séparation membranaire, il est de pratique courante d'utiliser des clarificateurs classiques et à masse de contact solide. L'inconvénient de cette technique connue réside en ce que la vitesse de charge hydraulique maximale que l'on peut obtenir avec ce type de clarificateurs est de l'ordre de 4 m/h. Une clarification à des vitesses plus élevées nécessite la mise en œuvre de floculants organiques dans des clarificateurs à masse de contact ou une filtration à flux ascendant mettant en œuvre un matériau granulaire.
Les polluants dissous, notamment dans les procédés de traitement en vue de l'obtention d'eau potable, comprennent les matières organiques, à la fois naturelles et synthétiques (notamment pesticides, phénols etc..) et des composés biodégradables tels que l'ammoniaque, le méthane et le carbone organique biodégradable. L'élimination de ces polluants s'effectue généralement dans une série de réacteurs de prétraitement qui sont positionnés en amont du système de séparation membranaire et qui doivent être conçus en fonction des besoins d'élimination spécifiques. Ainsi par exemple, l'élimination des matières organiques (naturelles et/ou
synthétiques) peut être obtenue par addition de coagulants et d' adsorbants pulvérulents, soit dans un clarificateur à masse de contact solide, disposé en amont du système de séparation membranaire, comme décrit dans FR-A-2 628 337, soit dans une boucle de séparation membranaire avec une recirculation de l'adsorbant dans un décanteur à lit de boues, tel que décrit notamment dans PR-A-2 696 440. L'un des inconvénients de ces techniques connues réside dans le fait que la vitesse maximale de charge hydraulique que l'on peut obtenir est de l'ordre de 4 m/h, ce qui limite la vitesse hydraulique de l'étape d'adsorption et entraîne la nécessité de prévoir une étape de clarification-adsorption à vitesse élevée.
Pour éliminer les composés organiques, il est possible d'utiliser, outre les matériaux adsorbants en poudre, des matériaux adsorbants granulaires tels que notamment du charbon actif, ces matériaux étant mis en œuvre dans des réacteurs d'adsorption à lit fixe ou fluidisé. Il est ainsi possible d'augmenter la vitesse hydraulique (jusqu'à des valeurs pouvant atteindre de l'ordre de 15 à 20 m/h) mais en obtenant des vitesses d'utilisation plus faibles du charbon actif qui se traduisent par une augmentation des durées de rétention du charbon actif. Cependant, les longues durées de rétention du charbon actif dans les réacteurs à lit fixe
(c'est-à-dire le temps qui s'écoule avant la régénération du charbon actif) se traduit par un colmatage important des pores du charbon actif par les matières organiques naturelles, ce qui limite l'adsorption des micro- polluants dans le cas d'un afflux de pollution. Ces inconvénients montrent la nécessité de mettre au point un
procédé d'adsorption à vitesse élevée avec un remplacement continu du charbon actif.
L'élimination des composés biodégradables nécessite également l'utilisation d'un réacteur dédié, conçu en fonction des besoins spécifiques. Il peut s'agir d'un réacteur à lit fixe ou à lit fluidise contenant un matériau de support permettant le développement de la flore microbienne apte a dégrader le composé visé.
En conclusion, un procédé de prétraitement idéal en vue d'une séparation membranaire devrait comporter des étapes de clarification, d'adsorption et de biodégradation. Bien entendu, on connaît à l'heure actuelle des dispositifs assurant ces fonctions, mais ces dernières sont réalisées dans des réacteurs spécifiques qui sont placés en amont ou en aval des systèmes de séparation membranaire et qui ne permettent pas en général l'obtention de vitesses hydrauliques élevées.
En conséquence, la présente invention se propose d'apporter un procédé de traitement d'effluents, notamment de l'eau, contenant des micro-polluants organiques, de la matière organique, naturelle ou synthétique, ainsi que des composés biodégradables, ce procédé ne présentant pas les inconvénients et les limitations des procédés selon la technique antérieure mentionnée ci-dessus.
Le procédé selon la présente invention est caractérisé en ce qu'il comporte :
- une première étape de traitement mise en œuvre dans un filtre à flux ascendant à l'aide d'un matériau granulaire adsorbant circulant à contre-courant de l' effluent à traiter et assurant une clarification grossière, une adsorption et une biodégradation dudit effluent et
- une seconde étape assurant une séparation membranaire des micro-organismes et des particules contenus dans 1 ' effluent issu de la première étape.
Selon l'invention, le matériau granulaire adsorbant peut être par exemple (mais pas exclusivement) du charbon actif ou une résine. De préférence, il subit une régénération après traitement de l' effluent lors de la première étape et il est recyclé dans cette étape après régénération. Selon encore une autre caractéristique du procédé objet de l'invention, l'adsorption réalisée durant la première étape peut être améliorée par une addition intermittente d' adsorbants en poudre tels que notamment du charbon actif. Ainsi qu'on le comprend, la présente invention permet de combiner un traitement à l'aide d'un matériau granulaire adsorbant circulant à contre-courant de 1' effluent à traiter dans un réacteur à flux ascendant avec une séparation membranaire à faible pression tout en offrant la possibilité d'ajouter divers composés chimiques (notamment coagulants, adsorbants) en des points stratégiques du procédé.
La présente invention vise également un réacteur pour la mise en œuvre du procédé défini ci-dessus, ce réacteur étant caractérisé en ce qu'il comporte : un réacteur à flux ascendant muni à sa partie supérieure de moyens d'alimentation en effluent à traiter et contenant le matériau granulaire adsorbant, ce dernier circulant dans ledit réacteur à contre-courant de 1' effluent, ledit réacteur comportant trois zones, de bas en haut : une zone de séparation des particules du matériau granulaire, une zone de biodégradation et une
zone d'adsorption, l' effluent traité étant recueilli à la partie supérieure dudit réacteur et,
- un système de séparation membranaire en aval dudit réacteur et alimenté à partir de la sortie de ce dernier. Selon un mode de réalisation de ce dispositif, les moyens d'alimentation en effluent du réacteur comprennent un tube vertical débouchant à la partie inférieure dudit réacteur, un tube concentrique audit tube vertical étant disposé dans ce dernier pour assurer l'évacuation du matériau granulaire adsorbant qui, après passage dans un moyen de régénération est recyclé dans le réacteur.
D'autres caractéristiques et avantages de la présente invention ressortiront de la description faite ci-après, en référence à la figure unique du dessin annexé qui en illustre un exemple de réalisation dépourvu de tout caractère limitatif. Cette figure unique est une représentation schématique d'une installation mettant en œuvre le procédé selon l'invention.
En se référant au dessin, on voit que le dispositif selon l'invention comporte un réacteur assurant les fonctions de clarification et de biodégradation désigné par la référence 1 et un système de séparation membranaire 2 en aval du réacteur.
Le réacteur est du type à flux ascendant et il comporte à sa partie supérieure des moyens assurant son alimentation en effluents à traiter. Dans cet exemple de réalisation, ces moyens sont réalisés sous la forme d'un tube 3 disposé selon l'axe du réacteur qui présente une forme de révolution (par exemple cylindrique) . Le réacteur 1 contient également un matériau granulaire adsorbant tel que notamment du charbon actif ou tout autre matériau adsorbant, par exemple de la résine, ce
matériau désigné par la référence 4 assurant une clarification grossière de l' effluent à traiter ainsi qu'une adsorption et une biodégradation. Il est mis en suspension dans l' effluent contenu dans le réacteur à l'aide d'une insufflation d'air 5 prévue à la partie inférieure du réacteur, comme illustré sur la figure par une flèche, cette mise en suspension pouvant être facilitée par une injection d'eau pouvant être effectuée par le même moyen que celui prévu pour l'insufflation d'air.
Le matériau granulaire circule dans le réacteur à contre-courant de l' effluent et il assure une biodégradation de cet effluent ainsi qu'une adsorption des polluants dissous dans ce dernier. Selon l'invention, il est prévu des moyens permettant d'extraire le matériau granulaire adsorbant 4 du fond du réacteur 1, afin de le soumettre à une régénération avant de le recycler dans le réacteur. Dans l'exemple de réalisation non limitatif illustré sur le dessin, ces moyens comprennent un tube 6 concentrique au tube 3 assurant l'alimentation du réacteur en effluent, ce tube 6 débouchant à sa partie inférieure sur le fond du réacteur (cette extrémité inférieure pouvant présenter la forme d'une tulipe), le matériau granulaire devant être régénéré étant amené à circuler de bas en haut dans le tube 6 sous l'effet de l'insufflation d'air 5. Le matériau granulaire est ensuite admis dans un système de régénération 7, pouvant être de tout type classique, dans lequel il est débarrassé des particules qu'il a fixées lors du traitement de l' effluent dans le réacteur et il est traité (par voie chimique ou thermique) afin de lui restituer sa capacité d'adsorption avant son recyclage
dans le réacteur, à la partie supérieure de ce dernier (flèche 8) . Les matières solides en excès sont évacuées du système de régénération (flèche 9) .
Sur la figure unique des dessins annexés, on a schématisé les trois zones que comporte le réacteur 1 :
Zone 1 (à la partie inférieure du réacteur) : séparation des particules du matériau adsorbant en vue de leur régénération ; - Zone 2 : biodégradation ; - Zone 3 : adsorption.
Il est possible selon l'invention de déterminer le temps de rétention des particules de matériau granulaire adsorbant dans le réacteur, afin d'empêcher tout impact négatif d'une adsorption des matières organiques naturelles sur la capacité d'adsorption des micropolluants par le carbone actif.
Après prétraitement dans le réacteur 1, l' effluent 10, évacué à la partie supérieure du réacteur 1, subit une séparation membranaire dans le système 2 pouvant être par exemple un système d'ultrafiltration à membranes.
Cette séparation membranaire, en aval du prétraitement dans le réacteur 1, assure la filtration des particules, notamment des fines du matériau adsorbant et des cellules biologiques libérées du matériau granulaire. Par ailleurs, les membranes assurent une protection à l' encontre d'une surcharge en matières solides dans le réacteur 1.
Le système de séparation membranaire peut être un système de micro ou d'ultrafiltration. Il peut être (comme dans l'exemple de réalisation illustré par le dessin) séparé du réacteur 1 ou bien intégré à ce dernier
et placé à sa partie supérieure, ce qui permet d'obtenir une installation compacte.
Le dispositif objet de l'invention peut utiliser des membranes filtrant de l'intérieur vers l'extérieur (système dit à « peau interne ») ou de l'extérieur vers l'intérieur (système dit à « peau externe ») .
Parmi les avantages apportés par la présente invention par rapport à l'état antérieur de la technique, on peut citer notamment les suivants : - obtention de vitesses hydrauliques importantes pouvant aller de 15 à 30 m/h ; excellente élimination des composés biodégradables
(notamment du carbone organique et de l'ammoniaque) ;
- régénération in situ du matériau granulaire adsorbant ; - utilisation très efficace du matériau granulaire adsorbant pour l'élimination des micro-polluants, notamment des pesticides ; amélioration du rendement du système de séparation membranaire en raison de la réduction à un minimum du risque de colmatage des membranes par de la matière organique .
Il demeure bien entendu que la présente invention n'est pas limitée aux exemples de réalisation décrits et représentés ci-dessus, mais qu'elle en englobe toutes les variantes. C'est ainsi par exemple que le choix du matériau granulaire adsorbant, des additifs chimiques éventuels, de la configuration du réacteur et des protocoles opératoires, peut être adapté aux traitements spécifiques recherchés, de manière à bénéficier pleinement des avantages apportés par la présente invention.