Procédé de traitement d'un matériel contaminé par des composés polluants récalcitrants
La présente invention concerne un procédé de traitement d'un matériel contaminé par des composés polluants récalcitrants.
La dépollution des sites pollués, c'est-à-dire des sites sur lesquels une pollution d'origine industrielle du sol ou du sous-sol est susceptible de générer une nuisance ou un risque pérenne pour les personnes ou l'environnement, est un enjeu économique et scientifique actuel majeur.
La dépollution peut se faire par voie mécanique, par brûlage des terres, par voie chimique ou par voie biologique. La biorestauration ou bioréhabilitation peut être plus particulièrement utilisée. Cette technique met en œuvre des microorganismes, tels que des bactéries ou des champignons, pour dégrader les composés polluants récalcitrants, c'est-à-dire des composés qui résistent à la dégradation dans l'environnement.
Parmi ces composés polluants récalcitrants, on peut citer notamment les halobenzoates tels que le chlorobenzoate et le bromobenzoate, et les composés nitrés tels que le 2,4,6-trinitrotoluène (TNT) et autres explosifs tels que le PETN (penta-érythritol tétranitrate) et l'EGDN (éthylène glycol dinitrate).
On peut citer également les halogénures organiques tels que notamment le DDT[1 ,1 -bis(4-chlorophényl)-2,2,2-trichloroéthane], la 2,3,7,8- tétrachlorodibenzo-p-dioxine, le lindane (1 ,2,3,4,5,6-hexachlorocyclohexane), les composés biphényles polyhalogénés tels que notamment le 3,4,3', 4'- tétrachlorobiphényle et le 2,4,5,2',4',5'-hexachlorobiphényle.
On peut enfin citer les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) dont certains sont des composés mutagènes et cancérigènes.
L'agence américaine pour la protection de l'environnement (EPA pour environmental protection agency) a édité une liste de 16 HAP contaminant les sols, cette liste faisant référence dans de nombreux pays. Ces 16 HAP sont considérés comme prioritaires et doivent être surveillés. Le tableau 1 suivant présente la formule de ces 16 HAP.
Tableau 1 : Fonnule des 16 HAP
Plusieurs champignons formant la pourriture blanche sur le bois sont connus pour leur action dégradatrice envers certains composés polluants récalcitrants.
Ces champignons de la pourriture lorsqu'ils sont cultivés en conditions limitantes en nutriments (carence en azote par exemple) sont capables de dégrader la lignine ainsi que de nombreux autres composés organiques, y compris en particulier des HAP, grâce à un système enzymatique non spécifique à fort pouvoir oxydant (ligninases). Certains champignons de la pourriture sont également capables lorsqu'ils sont cultivés en conditions non limitantes, de transformer certains HAP, tels que le phénanthrène, en trans-dihydrodiols à l'aide de monooxygénases selon un mécanisme proche de celui existant dans les autres familles de champignons. Quelques champignons sont également capables de dégrader des HAP en trans-dihydrodiols ou en phénols. Le brevet allemand DE 37 31 816 décrit un procédé de dégradation des composés aromatiques difficilement dégradables dans les sols contaminés consistant à introduire dans ces sols certains champignons de la pourriture blanche associés à des matériels contenant de l'hémicellulose, comme par exemple la paille. Ces matériels contenant de l'hémicellulose sont préalablement soumis à un traitement à une température de 100 à 140°C et une pression de 1 à 3,6 bar, en présence de vapeur d'eau, afin de provoquer une autolyse partielle et un turgescence de ces matériels.
Le Demandeur a à présent mis au point un nouveau procédé de traitement des matériels contaminés par des polluants récalcitrants, en sélectionnant les types de supports organiques à utiliser, leur mode de traitement et leur mode d'inoculation par le champignon.
La présente invention a donc pour objet un procédé de traitement d'un matériel contaminé par des composés polluants récalcitrants comprenant les étapes suivantes :
1) un support organique lignifié choisi parmi des copeaux de bois, des écorces d'arbres ou des rafles de maïs subit un traitement destiné à éliminer les contaminants microbiologiques ;
2) ledit support ainsi traité est inoculé avec une souche de champignons de la famille des polyporales, ladite souche étant sous la forme a) d'une solution de spores et/ou de fragments de mycélium en suspension dans un milieu liquide, b) de mycélium prédéveloppé en milieu liquide, ou c) de mycélium prédéveloppé sur un support solide, notamment (i) sur un milieu gélifié solide, ou (ii) sur des grains de céréales ;
3) l'inoculum de champignons obtenu est incubé dans des conditions appropriées à la croissance des champignons sur ledit support ;
4) l'inoculum de champignons sur support organique issu de l'étape 3) est introduit dans le matériel contaminé.
Par "conditions appropriées à la croissance des champignons sur ledit support organique lignifié", on entend des conditions d'humidité, de température et d'aération connues de l'homme du métier. Le support organique lignifié inoculé avec la souche de champignons peut être, par exemple, placé de manière avantageuse dans une chambre de culture à humidité contrôlée, à une température comprise entre 15 et 35°C, plus particulièrement entre 20 et 30°C, pendant une période comprise entre de préférence une et six semaines, par exemple de trois semaines.
Le support organique fortement lignifié peut être choisi, de manière avantageuse, parmi des copeaux de bois dur, tel que le peuplier ou le hêtre ou des écorces d'arbres, tels que le pin, ou bien encore des rafles de maïs broyées, pouvant être éventuellement mélangées à de la sciure de bois. De manière préférentielle, on choisit comme support organique lignifié des rafles de maïs ou des copeaux de bois.
Les copeaux de bois peuvent être calibrés ou du type "tout- venant", c'est-à-dire non calibrés.
Des copeaux de bois d'une granulométrie supérieure à 4,5 mm sont préférés, les copeaux de plus faible granulométrie freinant généralement la croissance du champignon du fait d'une mauvaise aération due au tassement des copeaux.
Les champignons étant sensibles aux contaminations microbioiogiques, il est important de s'assurer que les risques de contamination sont très faibles.
A cet effet, le support organique lignifié est traité avant inoculation par la souche de champignon, de façon à éliminer les contaminants microbiologiques. Ce traitement peut s'effectuer par séchage entre 450 et 550°C, par exemple à 500°C pendant quelques secondes, par pasteurisation pendant 1 ou 2 cycles chacun de 8 à 30 heures, de préférence 8 à 24 heures, de préférence 16 heures, chacun à une température comprise entre 50 et 100°C, de préférence entre environ 65 et environ 85°C, ou par stérilisation (autoclavage) entre 110 et 130°C, de préférence à environ 120°C pendant 20 à 240 minutes, de préférence 20 à 60 minutes. Le support organique lignifié peut être humidifié, de préférence à saturation, avant le traitement destiné à éliminer les contaminants microbiologiques. De manière préférentielle, ce traitement est réalisé par pasteurisation.
Le support organique lignifié est ensuite inoculé avec le champignon de la famille des polyporales qui se présente : a) sous la forme d'une solution de spores, de fragments de mycélium ou d'un mélange de spores et de fragments de mycélium, en suspension dans un milieu liquide, pouvant être préparée par exemple à partir de cultures de champignons sur un support solide, en particulier sur milieu gélifié solide, (notamment gélose) en tube, ou sur grains de céréales ; la suspension peut ainsi être obtenue notamment en introduisant un volume déterminé de milieu de culture CH tel que décrit dans Kirk et al., 1978, Influence of culture parameters on lignin Metabolism by Phanerochaete Chrysosporium. Anch. Microbiol. 117, 277-285, puis en agitant vigoureusement le tube de façon à libérer les spores ; b) sous la forme de mycélium prédéveloppé en milieu liquide : le mycélium prédéveloppé peut être obtenu en mettant en culture dans du milieu CH (Kirk et al., 1978) une solution de spores en suspension ; dans ce cas, la culture est placée sous agitation en général pendant environ une semaine à 30°C ; en fin d'incubation, les pelotes de mycélium formées sont récupérées puis utilisées comme inoculum ;
c) ou, de préférence sous la forme de mycélium prédéveloppé sur un support solide (mycélium recouvrant des fragments de support solide), notamment (i) sur un milieu gélifié solide tel que par exemple de la gélose, qui peut être contenu dans une boîte de Pétri, ou (ii) sur des grains de céréales (préculture sur grains de céréales).
De manière préférentielle, le support organique lignifié est inoculé avec des champignons polyporales précultivés sur des grains de céréales, tels que des grains de blé, de seigle ou de millet notamment.
Ledit support organique lignifié peut être inoculé avec des grains de céréales colonisés par les champignons, préferentiellement à un taux d'environ 1 % à environ 20 %, de préférence encore de 2 à 10 % (poids de grains/poids de support organique lignifié).
Les grains de céréales utilisés sont alors de préférence des grains non traités par des substances chimiques qui pourraient inhiber la croissance du champignon, grains qui sont stérilisés selon le protocole suivant: trempage dans l'eau, cuisson aux environs de 100°C pendant 30 à 60 minutes, de préférence 45 minutes, puis autoclavage de 110 à 130°C, de préférence à environ 120°C pendant 20 à 240 minutes, de préférence de 100 à 200 minutes. Un agent abrasif facilitant la séparation des grains entre eux ainsi qu'une source de nutriment peuvent être ajoutés de manière avantageuse aux grains de céréales. Un correcteur de pH peut être également ajouté de manière avantageuse. Le plâtre, le carbonate de calcium, la craie ou le talc peuvent par exemple jouer à la fois le rôle de nutriment (source de calcium), d'agent abrasif et de correcteur de pH. Du plâtre peut ainsi être ajouté aux grains de céréales immédiatement avant autoclavage à une concentration comprise par exemple entre environ 0,5 et environ 10 % (masse/masse). Les grains sont ensuite inoculés par exemple à l'aide a) d'une solution de spores et/ou de fragments de mycélium en suspension dans un milieu liquide, b) de mycélium prédéveloppé en milieu liquide, ou c) de mycélium prédéveloppé sur un support solide, notamment (i) sur un milieu gélifié solide tel que, par exemple de la gélose ou (ii) sur des grains de céréales, puis généralement placés en bocaux stériles ou dans des sacs stériles équipés de membranes microporeuses. L'incubation est alors de préférence réalisée dans une chambre de culture à humidité contrôlée
à une température comprise entre 15 et 35°C, plus particulièrement entre 20 et 30°C, pendant une période comprise entre une et six semaines, de préférence trois semaines.
Les supports inoculés peuvent ensuite être placés en sacs de culture permettant les échanges gazeux. Des fermenteurs en phase solide de capacité élevée peuvent également être utilisés à la place des sacs.
Selon un mode préféré de réalisation de l'invention, on choisit comme support organique des rafles de maïs ou des copeaux de bois, qui, préalablement à l'ensachage, sont mélangés intimement aux grains de céréales colonisés par le champignon, à un taux d'environ 1 % à 20 %, de préférence de 2 à 10 % (poids de grains/poids de copeaux ou de rafles). Le mélange est ensuite incubé à une température optimale pour la croissance de la souche de champignon utilisée (en général 25-30°C). Cette technique permet d'obtenir une culture homogène et très bien développée. Des générations successives d'inoculum peuvent être produites en rediluant soit les grains inoculés dans un volume de grains stériles, soit l'inoculum arrivé à maturité dans un volume de supports lignifiés stériles. A titre d'exemple, des copeaux pourront être humidifiés à l'aide d'une solution minérale (comprenant des suppléments nutritifs pour le champignon) comprenant pour un litre de solution :
KH2PO4 : 2 g
MgS04 : 0,5 g
CaCI2 : 0,1 g
Tartrate d'ammonium : 0,2 g
Eau en quantité suffisante pour 1 I de solution.
Le champignon utilisé dans le procédé de l'invention peut être n'importe quel polyporale connu. De manière avantageuse, le champignon mis en œuvre peut être la souche Coriolus versicolor déposée le 19 janvier 1996 à
la CNCM (Collection Nationale de Cultures de Microorganismes à l'Institut Pasteur) sous la référence 1-1657 ou l'un de ses dérivés, qui est capable de dégrader non seulement les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) comprenant deux à quatre cycles, mais aussi les hydrocarbures aromatiques (HAP) comprenant au moins cinq cycles dont tous les HAP comprenant cinq ou six cycles, notamment tous les HAP à cinq ou six cycles du tableau 1.
Par "dérivé", on entend une souche dérivée de Coriolus versicolor 1-1657 par mutation spontanée ou induite et capable de dégrader non seulement les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) comprenant deux à quatre cycles, mais aussi les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) comprenant au moins cinq cycles, dont tous les HAP comprenant cinq ou six cycles, notamment tous les HAP à cinq ou six cycles du tableau 1 (à savoir notamment le benzo(b)fluoranthène, le benzo(k)floranthène, le benzo(a)pyrène, le dibenzo(a,h)anthracène, le benzo(g,h,i)perylène et l'indenol (1 ,2,3-cd)pyrène), ainsi que, en général, les HAP comprenant plus de six cycles.
La présente invention a également pour objet l'utilisation de l'inoculum préparé selon les étapes 1) à 3) telles que définies précédemment pour dégrader des composés polluants récalcitrants contenus dans un matériel contaminé. L'inoculum est mis en contact avec le matériel contaminé dans des conditions appropriées pour stimuler la croissance des champignons dans le matériel et garantir l'activité dégradatrice des polluants récalcitrants.
De manière avantageuse, l'inoculum peut être mis en contact avec le matériel contaminé à un taux compris entre 1 et 50 % en poids, de préférence entre 5 et 20 % par rapport au poids du matériel contaminé. La mise en contact peut être réalisée notamment sur sol excavé ou sur sol déstructuré.
Ledit matériel contaminé peut être les sols, les sédiments aquatiques, les graviers, et autres matériels solides, et l'eau.
De manière préférentielle, ledit matériel contaminé est un sol.
Les principales mises en œuvre de techniques connues de biorestauration d'un sol sont :
- le traitement in situ : le sol est laissé en l'état ;
- le traitement sur site : le sol est excavé et traité sur place ;
- le traitement ex situ : le sol est excavé et traité hors site.
Par "conditions appropriées pour stimuler la croissance dudit champignon dans le matériel et garantir l'activité dégradatrice des polluants récalcitrants", on entend des conditions d'aération, de température et d'humidité, du matériel contaminé, connues de l'homme du métier.
Lorsque le matériel contaminé est un sol, l'humidité de celui-ci peut être, de manière préférentielle, comprise entre 50 et 80 % suivant le type de sol. La température peut être comprise entre 10 et 40°C, une croissance du champignon étant cependant toujours possible même à une température plus basse. La teneur en azote dans le sol peut être telle que le rapport carbone/azote/phosphore soit égal à environ 100/10/1. Le matériel contaminé peut également contenir de manière avantageuse des nutriments et des oligo-éléments.
L'aération peut être assurée par une circulation d'air forcée, par une diffusion naturelle d'air, ou par brassage mécanique du sol. Lorsque le matériel contaminé est un sol, un débit d'air d'environ 0,1 à 5 m3/h/tonne de sol est avantageux par exemple. L'aération peut être rendue plus homogène dans le sol en assurant un démottage ou un criblage préliminaire du sol. L'apport d'un support organique avec l'inoculum selon l'invention permet également d'améliorer la structure du sol, et par conséquent son aération. Plus généralement, l'homogénéisation du sol par démottagcVcriblage/brassage et le mélange avec le support organique de l'inoculum permettent d'améliorer les transferts de masse (eau, température, nutriments, air, enzymes) et par conséquent l'activité biochimique responsable de la dégradation des composants polluants.
Les exemples suivants illustrent l'invention sans la limiter d'une quelconque façon.
LEGENDE DES FIGURES :
La figure 1 représente les pourcentages de biodégradation en HAP totaux et en fonction du nombre de cycle après quatre semaines. Le pilote avec Coriolus versicolor 1-1657, 20 % est comparé au témoin microflore indigène.
La figure 2 représente les pourcentages de biodégradation en HAP totaux et en fonction du nombre de cycles. Le pilote avec Coriolus versicolus 1-1657, 10 % (après 5 semaines) est comparé au témoin (microflore indigène, 8 semaines).
La figure 3 repréf.ente les pourcentages de biodégradation en HAP totaux et en fonction du nombre de cycle après huit semaines. Le pilote avec Coriolus versicolor 1-1657, 10 % est comparé au témoin microflore indigène. La figure 4 représente les pourcentages de biodégradation de quelques HAP à cinq et six cycles dans un sol contenant initialement environ 7602 mg HAP/kg de sol et après huit semaines d'incubation.
EXEMPLE 1 :
Choix du support organique
Les souches utilisées sont :
- Phanerochaete chrysosporium DSM 1547,
- Phanerochaete chrysosporium ATCC 24725,
- Coriolus versicolor CNCM 1-1657. e*.
Elles ont été cultivées sur un milieu malt agar en boîtes de Pétri jusqu'à obtention d'un recouvrement uniforme du champignon en surface de la boîte. Des morceaux de gélose inoculés par les champignons ont alors été utilisés pour coloniser les supports organiques.
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Tous les supports ont été préalablement autoclaves trois fois à 24 heures d'intervalle pendant 20 minutes à 120°C. Ils ont été humidifiés de façon à permettre un développement optimal du champignon.
Les supports inoculés par les différentes souches de champignons ont été placés en chambre d'incubation à une humidité de 100 % et à une température de 30°C jusqu'à obtention d'un développement satisfaisant des champignons. Leur développement a été évalué visuellement à l'aide d'une échelle qualitative (tableau 2) :
++ : développement moyen
+++ : fort développement (dense et uniforme)
Tableau 2 :
EXEMPLE 2 :
Influence de la granulométrie des copeaux sur la croissance des champignons
a) Objectif :
L'objectif de cet essai était d'évaluer l'influence de la taille des copeaux de bois sur la croissance de Coriolus versicolor 1-1657.
b) Méthodes
Les copeaux de bois utilisés proviennent de la société SPS (Société Parisienne de Sciure, Vénissieux). Trois granulométries différentes en
copeaux ont été utilisées afin d'évaluer l'influence de la taille des copeaux sur la croissance des champignons : 9-4,5 mm, 4,5-2,5 mm et 2,5-1 ,8 mm. Les copeaux contiennent à l'origine 10 % d'humidité. Ils ont été stérilisés par autoclavage à 120°C pendant 20 minutes et humidifiés à 60% à l'aide d'eau distillée. Ils ont ensuite été inoculés par des fragments de gélose solide recouvert de champignon. Les copeaux sont alors placés dans des chambres de culture saturées en humidité et à une température de 30°C. La croissance des champignons a été évaluée régulièrement au cours du temps à l'aide d'une méthode visuelle.
c) Résultats
Une plus faible croissance du champignon a été observée sur les copeaux de plus faible granulométrie. Cela peut s'expliquer par la mauvaise aération due au tassement des copeaux. La croissance la plus rapide a été obtenue pour les deux granulométries les plus importantes, celles-ci correspondant à la meilleure aération. Dans ces deux derniers cas, la croissance du champignon a été très satisfaisante.
EXEMPLE 3 :
Essai comparatif pour l'inoculation des copeaux par les champignons suivant différentes techniques de stérilisation
a) Objectif : L'objectif de cet essai était d'évaluer l'efficacité de différentes techniques de stérilisation des copeaux permettant d'obtenir une qualité de copeaux microbiologiquement acceptable et réalisable industriellement. Des essais de pasteurisation ont ainsi été lancés afin de mettre au point une solution alternative à l'autoclavage.
b) Méthode :
Les copeaux de bois utilisés proviennent de la société SPS (Société Parisienne, Vénissieux). Ils contiennent à l'origine 10 % d'humidité. Ils
ont été humidifiés à environ 60 % (poids/poids) à l'aide de milieu minéral spécifique, comprenant pour un litre de solution :
KH2P04 : 2 g
MgS04 : 0,5 g CaCI2 : 0,1 g
Tartrate d'ammonium : 0,2 g
Eau en quantité suffisante pour 1 I de solution.
Les copeaux ont été stérilisés selon les techniques suivantes : - par autoclavage à 120°C pendant 20 minutes ;
- par pasteurisation à 65°C pendant 16 heures ou 24 heures ;
- par pasteurisation à 85°C pendant 16 heures ;
- par pasteurisation à 65°C pendant 2 x 16 heures ;
- par pasteurisation à 85°C pendant 2 x 16 heures ; dans le cas des doubles pasteurisations, les deux cycles successifs de 16 heures chacun ont été séparés d'une période de refroidissement de 8 heures afin de favoriser la germination de spores éventuellement encore vivantes.
Ils ont ensuite été inoculés par des fragments de gélose solide recouvert de champignon ou par du mycélium prédéveloppé en culture liquide, puis placés dans des chambres de culture saturées en humidité et à une température de 30°C. Le champignon utilisé est la souche isolée Coriolus versicolor 1-1657. La croissance des champignons a été évaluée régulièrement au cours du temps à l'aide d'une méthode visuelle.
c) Résultats :
Les résultats obtenus en comptant le nombre de points de contamination causée par des champignons indésirables confirment l'efficacité de la pasteurisation en particulier la pasteurisation obtenue à une température de 85°C ou pour deux cycles successifs de pasteurisation de 16 heures quelle que soit la température utilisée (65 ou 85°C). En effet, aucune contamination par un microorganisme étranger n'a été observée pour les cas cités précédemment.
La pasteurisation représente donc un moyen efficace pour éliminer les risques de contamination de l'inoculum. Il peut cependant être nécessaire de conduire deux cycles de pasteurisation successifs ou d'augmenter la température de pasteurisation pour une meilleure efficacité.
EXEMPLE 4 :
Traitement biologique de sols contaminés par des substances organiques récalcitrantes
L'efficacité des champignons utilisés a été vérifiée lors d'essais pilote conduits sur des sols pollués historiquement par des HAP. Leur inoculation dans le sol a permis d'améliorer significativement la biodégradation de composés réputés récalcitrants. Les champignons sont introduits dans les sols sur leur support organique (copeaux de bois) à un taux de 20 % (exemple 4a) et 10 % (exemples 4b et 4c).
Le support organique a été inoculé avec du mycélium prédéveloppé sur des grains de céréales (l'inoculation des grains ayant été effectuée initialement par de la gélose solide recouverte de champignons (mycélium prédéveloppé sur de la gélose solide)).
a) Des expérimentations ont été conduites en pilotes de 50 litres sur des sols contaminés historiquement par des HAP provenant d'anciens sites d'usine à gaz. L'efficacité des souches de champignons a été évaluée et comparée à l'activité de la microflore indigène du sol dans le cas d'un sol contaminé par des HAP à une concentration initiale en HAP totaux de 1596 mg/kg répartis de la façon suivante : 431 mg/kg pour les HAP à trois cycles, 774 mg/kg pour les HAP à quatre cycles, 274 mg/kg pour les HAP à cinq cycles et 117 mg/kg pour les HAP à six cycles. Les champignons ont été inoculés à un taux de 20 % et les paramètres environnementaux (humidité, température et, éventuellement apport de nutriments) ont été optimisés afin d'accélérer la croissance des champignons et leur activité enzymatique. Des pourcentages de biodégradation égaux à 73 % pour les HAP à trois cycles, 47
% pour les HAP à quatre cycles, 15 % pour les HAP à cinq cycles et 25 % pour les HAP à six cycles ont été obtenus après seulement un mois d'incubation en pilote en présence de Coriolus versicolor 1-1657 (voir figure 1 ). La biodégradation des HAP totaux a représenté environ 50 % après un mois de traitement. Dans le même temps, la microflore indigène en étant pourtant stimulée n'avait dégradé que très faiblement les HAP, la concentration finale atteinte n'étant pas significativement différente de la concentration initiale en HAP totaux. Dans ce cas, seuls les HAP à trois et quatre cycles ont été dégradés, mais leurs pourcentages de disparition n'ont été que de 19 et 16 % respectivement. Les méthodes analytiques utilisées pour tous nos essais ont été validées préalablement et ont classiquement consisté pour cet exemple en une extraction au C02 supercritique suivie d'une analyse par chromatographie gazeuse/spectrométrie de masse.
b) Des essais ont été conduits en pilotes de 50 kg sur des sols contaminés historiquement par des HAP provenant d'anciens sites d'usines à gaz. L'efficacité de souches de champignons a été évaluée et comparée à l'activité de la microflore indigène du sol dans le cas d'un sol contaminé par des HAP à une concentration de 1092 mg/kg répartis de la façon suivante : 122 mg/kg pour les HAP à trois cycles, 652 mg/kg pour les HAP à quatre cycles, 318 mg/kg pour les HAP à cinq et six cycles. La souche de champignon Coriolus versicolor 1-1657 a été apportée à un taux de 10 % (poids/poids). Les paramètres environnementaux ont été optimisés afin d'accélérer la croissance des champignons et leur activité enzymatique. Pour cela, la température a été maintenue aux alentours de 30°C et l'humidité du sol à 70 % de la teneur en eau utile du sol. Des pourcentages de biodégradation égaux à 75 % pour les trois cycles, 50 % pour les quatre cycles, 38 % pour les cinq et six cycles dont 46 % pour le benzo(a)pyrène, ont été obtenus après seulement cinq semaines d'incubation en pilote en présence de la souche Coriolus versicolor 1-1657 (voir figure 2). La biodégradation en HAP totaux a atteint 49 % après seulement cinq semaines d'incubation. Dans le même temps, la microflore indigène biostimulée n'a dégradé que très faiblement les HAP, le pourcentage de biodégradation atteint en fin d'essai étant à peine supérieur à 10 %. Après huit
semaines d'incubation, les résultats obtenus avec la microflore indigène biostimulée n'avaient guère évolué, avec des pourcentages de biodégradation de 18, 21 , 6 et 17 % pour respectivement les deux et trois cycles, les quatre cycles, les cinq et six cycles et les HAP totaux. Il est important de noter que le pilote témoin microflore indigène avait également été inoculé avec des copeaux stériles identiques à ceux utilisés pour la préparation de l'inoculum de champignon et cela à un taux de 10 % (poids/poids).
Les méthodes analytiques utilisées pour ces essais ont été validées préalablement et ont consisté pour cet exemple en une extraction au solvant sous pression à l'aide d'un appareillage DIONEX ASE 200 suivie d'une analyse par chromatographie gazeuse/spectrométrie de masse ou chromatographie liquide haute pression/détection UV. L'efficacité du champignon par rapport aux microorganismes indigènes (bactéries et champignons) est la plus marquée pour les HAP lourds à cinq et six cycles qui sont les plus difficiles à biodégrader.
c) Des essais ont été conduits en pilotes de laboratoire de 2 kg sur des sols contaminés historiquement par des HAP provenant d'anciens sites d'usines à gaz. L'efficacité de souches de champignons a été évaluée et comparée à l'activité de la microflore indigène du sol dans le cas d'un sol contaminé par des HAP à une concentration initiale en HAP totaux de 7602 mg/kg répartis de la façon suivante : 3903 mg/kg pour les HAP à deux et trois cycles, 3233 mg/kg pour les HAP à quatre cycles, 466 mg/kg pour les HAP à cinq et six cycles. La souche de champignons Coriolus versicolor 1-1657 a été apportée à un taux de 10 % (poids/poids). Les paramètres environnementaux ont été optimisés afin d'accélérer la croissance des champignons et leur activité enzymatique. Pour cela, la température a été maintenue aux alentours de 30°C et l'humidité du sol à 70 % de la teneur en eau utile du sol. Des pourcentages de biodégradation égaux à 49 % pour les trois cycles, 26 % pour les quatre cycles, 34 % pour les cinq et six cycles dont 44 % pour le benzo(a)pyrène, ont été obtenus après seulement huit semaines d'incubation en présence de la souche Coriolus versicolor 1-1657. La biodégradation en
HAP totaux a atteint 38 % après huit semaines d'incubation. Dans le même temps, la microflore indigène biostimulée n'a dégradé que très faiblement les HAP, le pourcentage de biodégradation atteint en fin d'essai étant équivalent à 25, 9, 0 et 16 % pour respectivement les deux et trois cycles, les quatre cycles, les cinq et six cycles et les HAP totaux (voir figure 3).
Les méthodes analytiques utilisées pour ces essais ont été validées préalablement et ont consisté pour cet exemple en une extraction au solvant sous pression à l'aide d'un appareillage DIONEXASE 200 suivie d'une analyse par chromatographie gazeuse/spectrométrie de masse ou chromatographie liquide haute pression/détection UV. L'efficacité du champignon par rapport aux autres microorganismes est la plus marquée pour les HAP lourds à cinq et six cycles qui sont les plus difficiles à biodégrader (voir figure 4).