Electrolyte solide réticulé
Domaine technique
L'invention concerne la préparation d'électrolytes solides réticulés pour batteries lithium-ions à base de réactions thiol-ène.
Technique antérieure
La réaction utilisée dans l'invention (réaction thiol-ène) a des applications dans de nombreux domaines dont les batteries.
La réaction thiol-ène (également hydrothiolation d'alcène) est une réaction entre un thiol et un alcène pour former un thioéther. Cette réaction a été signalée pour la première fois en 1905, mais elle a pris de l'importance à la fin des années 1990 et au début des années 2000 pour sa faisabilité et son large éventail d'applications, notamment pour les électrolytes.
Les thiols sont d'excellents nucléophiles par la formation d'anions thiolates (RS-) et sont également des électrophiles via les radicaux thiyls (RS*). L'une des réactions les plus étudiées mettant en jeu des thiols est l'hydrothiolation de doubles liaisons (C=C). Selon la nature des substituants de la double liaison, i.e. donneurs ou accepteurs d'électrons, et le type de catalyseur employé, la réaction thiol-C=C peut se produire suivant un mécanisme radicalaire ou nucléophile.
Dans le cas d'un mécanisme nucléophile, la réaction est l'addition de Michael sur une double liaison substituée par un groupement électroattracteur, tels que les (méth)acrylates (monomères contenant une double liaison active), et une base nucléophile est utilisée comme catalyseur.
Dans le cas d'un mécanisme radicalaire, il est important d'éviter les substituants électroattracteurs (monomères contenant une double liaison active) afin de s'affranchir de la polymérisation des espèces insaturées et des réactions secondaires non contrôlées. De préférence on utilise des monomères non activés tels que les allyl ou vinyléthers. L'hydrothiolation peut alors être amorcée thermiquement ou photochimiquement.
Xuan et al. (2020) Journal of Power Sources, vol. 456, p. 228024. DOI: 10.1016/j.jpowsour.2020.228024 utilisent un thiol de type (2,2'- (éthylènedioxy)diéthanethiol), qu'ils font réagir avec une fonction acrylate, sans réticulant.
Les polymères obtenus sont des polymères liquides visqueux. Les valeurs de conductivité décrites à 25 °C correspondent à celles de matériaux peu réticulés dans des conditions équivalentes.
Sarapas et al Macromolecules 2016, 49, 4, 1154-1162, utilisent des monomères thiol et vinyle pour la croissance de leurs chaînes, mais sans réticulation. Les conductivités décrites à 80 °C sont relativement faibles.
La publication ACS Macro Lett. 2020, 9, 500-506 décrit un (2,2'-(éthylènedioxy)diéthanethiol) combiné à un allyl éthylène glycol, en association avec le pentaérythritol tetrakis mercaptopropionate comme réticulant. Les valeurs de conductivités mesurées restent néanmoins faibles.
Les demandes de brevets US2019237803 AA et US2020411906 AA décrivent des réseaux formés à partir de la réaction thiol-ène en milieu aqueux. L'électrolyte obtenu est un gel de polymère (c'est-à-dire un matériau emprisonnant une quantité importante de liquide), comprenant nécessairement de l'eau. Les exemples ne portent que sur des gels contenant des solvants. Les rendements faradiques (charge-décharge de la batterie) décrits sont très faibles (autour de 80 %).
La demande de brevet US2021057753 AA décrit une anode pour cellule électrochimique comprenant un matériau électroactif comprenant du lithium et une couche protectrice poreuse comprenant un polymère à base de thiols. Le polymère est utilisé comme additif ou couche de protection d'une électrode, mais pas en tant qu'électrolyte.
De manière surprenante, la Demanderesse a remarqué que, dans des formulations non aqueuses d'électrolytes solides, la réticulation améliorait les propriétés mécaniques du réseau par rapport à l'utilisation d'homopolymères, et que l'utilisation d'une molécule hydrocarbonée portant deux fonctions thiol en association avec une molécule hydrocarbonée insaturée comportant deux doubles liaisons C=C en présence d'un réticulant, dans laquelle le rapport molaire [double liaison C=C]/[thiols] dans la formulation est compris entre 1 et 1,1, permettait d'augmenter la résistance du réseau à une dégradation chimique.
En particulier, il apparaît que trois molécules organiques : le triethylène glycol divinyl éther, le trivinyl cyclohexane et le 2,2'-(éthylènedioxy)diéthanethiol, peuvent être utilisées comme électrolyte solide de batterie Li-tout solide ou comme composant de l'électrode positive (posolyte ou catholyte), en incluant un sel de lithium pour assurer un bon transport des ions
lithium dans l'électrolyte et le catholyte. La formulation d'électrolyte selon l'invention permet notamment d'obtenir des conductivités de plusieurs ordres de grandeur supérieures à celles obtenues dans l'art antérieur (10“5 à 10-7 S/cm).
Résumé de l'invention
La formulation d'électrolyte réticulable selon l'invention comprend au moins :
- Un sel de lithium ou un mélange de sels de lithium
- Une molécule hydrocarbonée comportant deux fonctions thiol
- Une molécule hydrocarbonée insaturée comportant deux doubles liaisons C=C
- Un réticulant, ledit réticulant étant une molécule portant au moins trois doubles liaisons C=C ; dans laquelle le rapport molaire [double liaison C=C]/[thiols] est compris entre 1 et 1,1.
La quantité de sel(s) de lithium peut représenter entre 2 et 40 % en masse par rapport à la masse de formulation totale, de préférence entre 10 et 30 % en masse par rapport à la masse de formulation totale.
La quantité de réticulant peut être comprise entre 0,5 et 20% massique, de préférence entre 1 et 5% massique par rapport à la masse totale de formulation.
La formulation d'électrolyte réticulable selon l'invention peut comprendre un initiateur radicalaire ou anionique, en quantité comprise entre 0,01 à 0,05 fois la masse totale de formulation hors sel(s) de lithium.
La formulation d'électrolyte réticulable selon l'invention peut comprendre un termineur de chaîne permettant de générer des chaînes pendantes, ledit termineur de chaîne étant une molécule portant une seule double liaison C=C, sans protons labiles, en quantité strictement inférieure à la quantité de matière du réticulant, de préférence une molécule comportant des fonctions éther ou poly(éthylène glycol), de manière très préférée un vinyl éthyl éther ou un vinyl méthyl éther.
Le réticulant peut être choisi parmi 1,2,4-trivinylcyclohexane, diallylmaléate, 1,3,5-triallyl- l,3,5-triazine-2,4,6(lH,3H,5H)-trione, 2,4,6-triallyloxy-l,3,5-triazine, pentaérythritol allyl éther, pentaérythritol triallyl éther, triméthylolpropane allyl éther, glyoxal bis(diallyl éther), triméthylolpropane tri(méth)acrylate, pentaérythritol tri(méth)acrylate, triméthylolpropane éthoxylate tri(méth)acrylate, triméthylolpropane tri(méth)acrylate, glycérol propoxylate (1PO/OH) tri(méth)acrylate, triméthylolpropane propoxylate tri(méth)acrylate,
pentaérythritol tetra(méth)acrylate, di(triméthylolpropane) tetra(méth)acrylate, de manière très préférée parmi 1,2,4-trivinylcyclohexane, 2,4,6-triallyloxy-l,3,5-triazine, pentaérythritol allyl éther, triméthylolpropane allyl éther, de manière encore plus préférée le réticulant est le 1,2,4-trivinylcyclohexane.
La molécule hydrocarbonée comportant deux fonctions thiol peut être le 2,2'- (éthylènedioxy)diéthanethiol.
La molécule hydrocarbonée comprenant deux doubles liaisons C=C peut être choisie parmi les oligo-éthylène glycols portant deux liaisons C=C, les diallyl éthers et les diacrylates ou dimétacrylates, de préférence est le triéthylène glycol divinyl éther.
La formulation d'électrolyte réticulable selon l'invention peut comprendre un plastifiant du type oligo-éthylène glycol, solvant non aqueux peu volatil ou liquide ionique, ledit plastifiant représentant moins de 15 % massique par rapport à la masse totale de formulation. L'invention concerne également un procédé de préparation d'un électrolyte solide réticulé dans lequel : a) on réticule la formulation d'électrolyte réticulable selon l'une quelconque des variantes décrites, en présence éventuelle d'un solvant non aqueux, au moyen d'un initiateur radicalaire ou anionique ajouté ou déjà présent dans la formulation et par activation thermique ou photoinduite pour former un polymère conducteur des ions lithium, b) on évapore le solvant éventuel présent dans ledit polymère afin d'obtenir un électrolyte solide réticulé.
L'activation photo-induite peut être effectuée par lampe UV ou stéréolithographie.
L'invention concerne également l'utilisation de l'électrolyte réticulé obtenu par réticulation de la formulation selon l'une quelconque des variantes décrites ou obtenu par le procédé de préparation d'un électrolyte réticulé selon l'une quelconque des variantes décrites comme électrolyte solide de batterie Li-ion tout solide ou comme composant de l'électrode positive (posolyte ou catholyte) ou négative (négolyte ou anolyte) d'un système électrochimique.
Liste des figures
La figure 1 représente la conductivité (S/cm) en fonction de la température (1000/T avec T en
K) des préparations Al-3 (selon l'invention) et PI (comparatif) dans l'exemple 1.
La figure 2 représente la conductivité (S/cm) en fonction de la température (1000/T avec T en
K) des formulations B1 (selon l'invention) et PI (comparatif) dans l'exemple 2.
La figure 3 représente la conductivité (S/cm) en fonction de la température (1000/T avec T en K) de Cl (selon l'invention) et PI (comparatif) dans l'exemple 3.
Description des modes de réalisation
L'invention concerne une formulation d'électrolyte réticula ble comprenant :
- Un sel de lithium ou un mélange de sels de lithium
- Une molécule hydrocarbonée portant deux fonctions thiol
- Une molécule hydrocarbonée insaturée comportant 2 doubles liaisons C=C
- Un réticulant
- éventuellement un plastifiant du type oligo-éthylène glycol, solvant non aqueux peu volatil (pression de vapeur inférieure à 8 kPa à 20°C) ou liquide ionique, ledit plastifiant représentant moins de 15 % en masse par rapport à la masse totale de formulation.
La formulation d'électrolyte réticu la ble selon l'invention peut contenir un initiateur radicalaire ou anionique afin d'amorcer ultérieurement la réaction de polymérisation/réticulation. Dans une variante, l'initiateur radicalaire ou anionique peut être ajouté à la formulation selon l'invention lors de la réaction de polymérisation/réticulation.
La formulation obtenue peut être réticulée par toute technique connue de l'homme du métier.
Dans la formulation d'électrolyte selon l'invention, le rapport molaire [double liaison C=C]/[thiols] est avantageusement compris entre 1 et 1,1, de préférence strictement supérieur à 1.
En particulier, l'invention peut mettre en œuvre l'association de trois molécules organiques : le 2,2'-(éthylènedioxy)diéthanethiol, le triethylène glycol divinyl éther et le trivinyl cyclohexane comme réticulant, en présence d'un sel de lithium ou d'un mélange de sels de lithium.
L'électrolyte obtenu par réticulation peut être utilisé comme électrolyte solide de batterie Li- tout solide ou comme composant de l'électrode positive ou négative (posolyte ou catholyte, négolyte ou anolyte), et incluant un sel de lithium pour assurer un bon transport des ions lithium dans l'électrolyte et le catholyte/anolyte.
Dans un mode de réalisation, un composé de type termineur de chaîne peut également être ajouté à la formulation d'électrolyte réticulable selon l'invention pour créer des chaînes pendantes lors de la réticulation.
Afin d'obtenir un électrolyte solide réticulé selon l'invention, le mélange réticulable comprenant les trois molécules suivantes : molécule hydrocarbonée portant deux fonctions thiol, molécule hydrocarbonée insaturée comportant deux doubles liaisons C=C et réticulant, est mis en contact avec un sel de lithium et de façon optionnelle, un solvant non aqueux, puis la réaction de réticulation est déclenchée au moyen d'un amorceur (initiateur radicalaire ou anionique) partoute technique connue de l'homme du métier. La réaction de réticulation peut être amorcée notamment par activation thermique ou photo-induite.
A l'issue de la réaction, un polymère conducteur des ions lithium est formé, ce polymère peut contenir un solvant emprisonné si un solvant est présent dans la formulation, qui peut être évaporé ensuite afin d'obtenir un matériau solide.
Dans les formulations d'électrolytes selon l'invention, le rapport thiol/double liaison est en général stoechiométrique ou dans un léger excès de doubles liaisons C=C; en revanche un excès de thiol n'est pas souhaitable.
La composition de la formulation peut être modifiée en faisant varier la quantité de réticulant et, le cas échéant, de monomère formant les chaînes pendantes. La quantité de sel de lithium ainsi que d'initiateur radicalaire ou anionique peut également être modifiée et un plastifiant peut être ajouté.
En résumé, les électrolytes solides réticulés selon l'invention comprennent au moins :
- Une molécule portant 2 doubles liaisons C=C, avantageusement choisie parmi les oligo-éthylène glycols portant deux liaisons C=C (par exemple les divinyls tels que le triéthylène glycol divinyl éther qui est la molécule la plus disponible commercialement, les diallyl éthers, les diacrylates ou diméthacrylates).
- Une molécule portant deux fonctions thiol (le 2,2'-(éthylènedioxy)diéthanethiol par exemple)
- Un sel de lithium ou un mélange de sels de lithium : tout sel de lithium soluble dans la résine formée (LiPFe, LiFSI Lithium bis (fluorosulfonyl)imide, LiCIC , ...) ou un mélange de plusieurs sels de lithium solubles peut convenir.
Le LiFSi (Lithium bis (fluorosulfonyl)imide) et le LiTFSI (Lithiumbis(trifluoromethanesulfonyl)imide) sont préférés en raison de leurs bonnes propriétés de conductivité et de stabilité électrochimique. La quantité de sel de lithium ou de mélange de sels de lithium varie de préférence entre 2 et 40% en masse par rapport à la masse totale de formulation, par exemple on peut utiliser une teneur de 20 % massique.
Un réticulant : toute molécule portant au moins trois doubles liaisons carbone-carbone C=C peut servir de réticulant pour la formulation d'électrolyte réticu la b le selon l'invention (par exemple le trivinyl cyclohexane ou d'autres molécules décrites ci-dessous, notamment de type thiols au moins trivalents), avantageusement à une teneur comprise entre 0,5 % massique et 20 % massique par rapport à la masse totale de formulation, de manière très préférée entre 1 et 15 % massique, de manière encore plus préférée entre 1 et 5 % massique.
De manière optionnelle, un composé ayant la fonction de termineur de chaîne (l'éthyl vinyl éther dans les exemples) permettant de générer des chaînes pendantes peut être ajouté à la formulation : toute molécule portant une seule double liaison C=C peut convenir, mais la présence de fonctions éther ou poly(éthylène glycol) est souhaitable. La molécule choisie ne doit pas comporter de protons labiles et la quantité de matière du termineur de chaîne est avantageusement strictement inférieure à la quantité de matière du réticulant.
Dans la formulation d'électrolyte réticulable selon l'invention, les ratios entre les différents composants sont choisis selon des critères précis permettant d'obtenir les propriétés rhéologiques et de conductivité améliorées. Notamment, les rapports entre réticulant, molécule portant 2 doubles liaisons C=C, molécule portant deux fonctions thiol et termineur de chaîne sont calculés de la manière suivante :
Le rapport molaire [double liaison C=C]/[thiols] doit être compris entre 1 et 1,1 ; un excès de thiols n'est pas souhaitable.
De manière optionnelle, un plastifiant choisi parmi les oligo-éthylène glycols, les solvants non aqueux peu volatils de type carbonates ou poly-éthers ou les liquides ioniques peut être ajouté à la formulation. Le plastifiant doit composer moins de 15 % en masse par rapport à la masse totale de formulation.
L'initiateur radicalaire ou anionique, de préférence radicalaire (AIBN et TPO dans les exemples), permet d'amorcer la réaction de réticulation :
L'initiateur peut être activé thermiquement (par exemple composé de type diazo ou péroxyde) ou par rayonnement UV. Tout initiateur connu de l'homme du métier, notamment tout initiateur commercial peut être choisi.
La quantité d'initiateur à utiliser représente avantageusement entre 0,01 et 0,05 fois la masse du mélange de réactifs réticulables (c'est-à-dire la masse de la formulation sans le ou les sels de lithium, sans plastifiant, et sans solvant éventuel), le choix de la quantité exacte est ajusté par l'homme du métier.
Nature du réticulant :
Toute molécule portant au moins trois doubles liaisons carbone-carbone peut servir de réticulant.
Le réticulant utilisable dans les formulations selon l'invention peut notamment être choisi dans la liste suivante :
1,2,4-trivinylcyclohexane, diallylmaleate, l,3,5-triallyl-l,3,5-triazine-2,4,6(lH,3H,5H)-trione, 2,4,6-triallyloxy-l,3,5-triazine, pentaerythritol allyl ether, pentaerythritol triallyl ether, trimethylolpropane allyl ether, glyoxal bis(dia I lyl ether), trimethylolpropane tri(meth)acrylate, pentaerythritol tri(meth)acrylate, trimethylolpropane ethoxylate tri(meth)acrylate, trimethylolpropane tri(meth)acrylate, glycerol propoxylate (1PO/OH) tri(meth)acrylate, trimethylolpropane propoxylate tri(meth)acrylate, pentaerythritol tetra(meth)acrylate, di(trimethylolpropane) tetra(meth)acrylate.
Les composés préférés répondent aux critères suivants :
- Ils ne portent pas de protons labiles (comme le pentaerythritol triallyl éther)
- Ils n'ont pas de fonctions facilement hydrolysables (esters ou amides)
- Ils portent 3 doubles liaisons carbone-carbone ou plus.
De manière préférée, le réticulant peut être choisi parmi 1,2,4-trivinylcyclohexane, 2,4,6- triallyloxy-l,3,5-triazine, pentaerythritol allyl ether, trimethylolpropane allyl ether.
De manière très préférée, le réticulant peut être le 1, 2, 4-trivinylcyclohexane. Cette molécule présente notamment l'avantage d'être disponible commercialement et elle ne présente pas
de fonctions hydrolysables (ester, amide, ...) qui pourraient éventuellement fragiliser le réseau.
Le réticulant peut également être un thiol multivalent, au moins trivalent.
L'activation de la réticulation peut se faire après ajout de l'initiateur radicalaire ou anionique, ou en mettant en œuvre l'initiateur radicalaire ou anionique déjà présente dans la formulation par photo-induction ou par activation thermique.
La photo-induction peut se faire au moyen d'une lampe UV ou de techniques stéréolithographiques, notamment laser, écran LCD, impression 3D (également appelée fabrication additive). L'invention peut notamment s'appliquer à l'impression 3D de batteries, notamment de batteries pour véhicules.
Dans le cas où l'électrolyte solide est en contact avec l'électrode positive, la formulation réticulable selon l'invention à l'état liquide peut être enduite sur une électrode positive déjà préparée selon les protocoles de l'homme du métier afin que la formulation liquide mouille la porosité de l'électrode. Enfin, la réticulation est obtenue après amorçage thermique ou photoamorçage (UV).
Dans une variante de l'invention, les formulations selon l'invention peuvent être utilisées pour formuler une encre d'électrode positive (cathode), en ajoutant notamment dans la formulation la matière active (par exemple un oxyde mixte nickel manganèse cobalt lithié ou un phosphate de fer lithié) et le percolant électronique. Cette encre, une fois enduite et séchée, peut constituer une électrode positive solide.
Techniques de caractérisation
La conductivité ionique d'un électrolyte est mesurée en S/cm et caractérise la capacité de l'électrolyte à transporter des ions.
La conductivité ionique de l'électrolyte est mesurée par spectroscopie d'impédance électrochimique dans une cellule Biologie® CESH. La mesure est réalisée à plusieurs températures à l'aide d'une chambre thermostatée Biologie® ITS. L'acquisition du spectre d'impédance se fait à l'aide d'un potentiostat Biologie® MTZ 35 entre 30 MHz et 0,1 Hz autour de 0 V et avec une amplitude de ± 10 mV. La valeur de conductivité peut être déterminée par ajustement de la courbe avec un circuit équivalent du type (RI + R2//CPE1 + CPE2) ou visuellement en prenant la valeur de la partie réelle de l'impédance Re(Z) au minimum atteint
par la courbe entre le demi-cercle et la demi-droite correspondant à la partie capacitive sur le diagramme de Nyquist.
Le nombre de transport cationique (t+) correspond à la fraction de la conductivité totale liée au transport de charges par les cations et est caractérisé par spectroscopie d'impédance sur un échantillon monté entre deux électrodes non bloquantes (en lithium métal) à 60°C avec un potentiostat Biologie VMP3 entre 1 MHz et 0,1 mHz autour de 0V avec une amplitude de 10 mV. Le nombre de transport est obtenu par ajustement d'un circuit équivalent (RI + R2//CPE2 + R3//CPE3 + Wdl) puis par application de la formule : t+ = R2/(Rwdi + R2). Cette méthode de mesure correspond à la méthode dite de « Watanabe » (Solid State Ionics 28-30 (1988) 911- 917).
Le test de gonflement en solvant et le calcul de la fraction soluble sont des méthodes classiques de caractérisation des réseaux polymères afin d'avoir une estimation indirecte de leur densité de réticulation ainsi que de leur stabilité chimique. Après immersion d'environ 300 mg d'échantillon de réseau polymère pendant 72 heures à température ambiante dans un large excès de chloroforme (CHCI3), les échantillons gonflés sont pesés et ensuite séchés sous vide.
La fraction soluble (ws) est calculée avec l'équation suivante : ws = 1 - md/mO avec mO la masse initiale de l'échantillon gonflé de solvant (estimée par régression linéaire sur la courbe des masses mesurées à intervalles réguliers de 0,5 à 5 minutes après avoir retiré l'échantillon du solvant) et md la masse de celui-ci après extraction de la fraction soluble et séchage.
Le taux de gonflement, qui correspond au gain en volume du réseau après immersion dans le solvant, (l/q2) est calculé avec l'équation suivante : l/q2 = Pp(ql - l)/ps où ql est le ratio des masses échantillon gonflé sur échantillon sec, ps est la masse volumique du solvant (ps = 1,492 g. cm-3 pour CHCh) et pp la masse volumique du réseau polymère.
Avantages de l'invention
La formulation d'électrolyte réticulable selon l'invention présente l'avantage, notamment par rapport à des polymères déjà polymérisés, d'être liquide au départ, ce qui permet d'obtenir une bonne cohésion aux interfaces avec les électrodes, notamment en raison d'un remplissage facilité de la porosité des matériaux.
L'utilisation d'une réticulation contrôlée sur un mélange de monomères particuliers et la morphologie particulière du réseau tri-dimensionnel confèrent par ailleurs une mobilité accrue des chaînes et par conséquent une conduction ionique améliorée. Les performances de l'électrolyte solide selon l'invention reposent notamment sur le choix spécifique de certains monomères très flexibles et bons solvants des ions lithium et par une réticulation contrôlée.
Le comportement rhéologique obtenu pour les échantillons d'électrolyte réticulé selon l'invention correspond avantageusement à celui d'un polymère réticulé.
Exemples
Afin de simplifier la notation, les composants suivants de la formulation selon l'invention dans les exemples 1 à 3 ci-après sont nommés par la suite :
- Le 1,2,4-trivinylcyclohexane : TVCH
- Le 2,2'-(Ethylènedioxy)diéthanethiol : EDDT
- Le triéthylène glycol divinyl éther : TEGDVE
- L'éthyl-vinyl éther : EVE
Exemple 1 :
Un précurseur d'électrolyte réticulé est préparé selon la formulation d'électrolyte réticulable du tableau 1. Trois formulations de composition identique sont préparées et sont notées Al, A2 et A3. La composition du mélange dans le tableau 1 (Composition des échantillons Al-3) est exprimée en pourcentages massiques. Le mélange est ensuite réticulé entre une plaque de Teflon® et une plaque de verre par un éclairage UV avec une lampe Delolux A2 365 nm, avec une puissance de 300 à 600 mW/cm2 jusqu'à l'obtention d'un produit solide, typiquement 30 secondes à 3 minutes. L'électrolyte est élastique et adhère sur le verre. Un échantillon est également préparé par imprégnation d'un séparateur de batterie Celgard®
avec le précurseur liquide, puis par réticulation du mélange sous rayonnement UV, cet échantillon est utilisé pour la mesure du nombre de transport.
Table 1
du mélange réticulable (hors LiTFSI), il n'est pas inclus dans les % massiques des autres composants
Trois échantillons de référence à base de PEO (poly(oxyde d'éthylène)) [p(EO)] de masse molaire 300 kDa et de LiTFSI (lithium bis(trifluoromethanesulfonyl)imide) avec un rapport EO/Li de 20 asont préparés. Pour chaque échantillon, le polymère et le LiTFSI sont mis en solution dans l'acétonitrile, le liquide est coulé dans un moule Teflon® puis le solvant acétonitrile est évaporé. Chaque échantillon est noté PI.
La conductivité ionique de l'électrolyte est mesurée par spectroscopie d'impédance dans une cellule Biologie® CESH. La mesure est réalisée à plusieurs températures à l'aide d'une chambre thermostatée Biologie® ITS. L'acquisition du spectre d'impédance se fait à l'aide d'un potentiostat Biologie® MTZ 35 entre 30 MHz et 0.1 Hz autour de 0 V et avec une amplitude de 10 mV. L'échantillon PI est caractérisé de la même manière et sert de référence. Les données de conductivité sont comparées à celles de l'échantillon PI et présentées en figure 1. On remarque sur cette figure que la conductivité des échantillons Al, A2 et A3 est supérieure à la conductivité des échantillons PI sur toute la plage de température.
Le nombre de transport des échantillons est mesuré par spectroscopie d'impédance. Les électrolytes sont disposés entre deux électrodes de lithium métallique et caractérisés à 60 °C. L'acquisition du spectre d'impédance se fait via un potentiostat Biologie® VMP3 à 0 V avec une
amplitude de 10 mV entre 1 MHz et 0,1 mHz. Le spectre d'impédance est ajusté par un circuit équivalent et les résistances d'électrolyte et de diffusion peuvent alors être extraites. Le nombre de transport est calculé à partir de ces résistances. Le nombre de transport est mesuré sur l'échantillon Al et la valeur obtenue est de 0,14.
La réticulation de l'échantillon Al est vérifiée en mesurant les gonflements et le taux d'insolubles de l'électrolyte. La mesure se fait par saturation d'un échantillon de masse connue en chloroforme pendant 72 heures puis par des pesées successives après sa sortie du solvant (t+30 s, t+60 s, ...) Ces valeurs permettent de tracer une courbe meCh = f(t) et de remonter au gonflement de l'échantillon (m(to)/minit). L'échantillon est ensuite séché sous vide et le taux d'insolubles est déterminé (mfjnai/m init). Les gonflements observés (15,39) et les taux d'insolubles d'environ 73,3% montrent un réseau lâche, mais majoritairement réticulé (le réseau contenant 20 %m de LiTFSI non lié chimiquement aux polymères, un taux d'insolubles <80% est attendu pour un réseau peu réticulé).
Les mesures de conductivité et de nombre de transport montrent que la formulation d'électrolyte selon l'invention est supérieure à un polymère de référence de type PEO-LiTFSI en matière de conductivité ionique tout en ayant un nombre de transport similaire à celui d'un PEO dans la littérature (0, 1-0,2 en général, voir K. Po_zyczka et al. ; Electrochimica Acta 227 (2017) 127-135).
Exemple 2 :
La formulation B1 (voir Tableau 2 qui présente la composition de l'échantillon) est élaborée de la même manière que la formulation de l'exemple 1, la principale différence étant l'utilisation d'un initiateur radicalaire diazoture pour la réticulation. L'initiateur choisi est l'AIBN et la réaction est déclenchée par chauffage à 80 °C pendant plusieurs heures, le mélange étant placé dans un moule en Teflon® pour la réticulation. Les résultats de conductivité, de gonflement et de nombre de transport sont obtenus de la même manière que dans l'exemple 1.
Table 2
(hors LiTFSI), il n'est pas inclus dans les %massiques des autres composants
Les données de conductivité sont comparées à celles de la référence PI et présentées en figure 2. On remarque que l'électrolyte obtenu présente une conductivité légèrement meilleure que la référence PI à haute température et nettement meilleure à basse température (T < 50°C) ce qui est un avantage dans le domaine d'application des batteries Li- ion. Le réseau présente un taux de gonflement de 14,97 (soit 1497 %) et un taux d'insolubles de 69%. Ces valeurs sont similaires à celles obtenues dans l'exemple 1.
Exemple 3 :
La formulation Cl (tableau 3, Composition de l'échantillon Cl) est élaborée comme décrit dans l'exemple 1. Cette formulation a la particularité de contenir de l'éthyl-vinyl ether qui agit comme agent de terminaison des chaînes (termineur de chaîne) lors de la polymérisation pour générer des chaînes pendantes dans la structure. Les échantillons sont caractérisés de la même manière que décrit dans l'exemple 1. Ils sont toujours élastiques, mais moins collants que les films contenant uniquement du trivinyl cyclohexane. Les caractérisations (conductivité ionique, nombre de transport et gonflement) sont réalisées par la méthode décrite dans l'exemple 1.
Table 3
*Même cas de figure pour le TPO que dans l'exemple 1
Les données de conductivité sont comparées à celles de la référence PI et présentées en figure 3.
La conductivité ionique observée (figure 3) est légèrement plus faible que celle des formulations Al-3 mais elle reste supérieure ou égale à celle de l'échantillon de référence PI, en particulier à basse température. Le nombre de transport est évalué à 0,135 et 0,14 sur deux mesures réalisées sur le matériau. Le gonflement mesuré est de 12,21 et le taux d'insolubles de 65,2 %. L'introduction de bouts de chaînes entraîne la présence de chaînes de polymère « libres » qui sont solubles lors de l'essai de gonflement.