(54) Titre : SEQUENCE NUCLEOTIDIQUE CODANT POUR UNE ENZYME AYANT UNE ACTIVITE ACETOLACTATE SYNTHASE DE CICHORIUM
SEQUENCE NUCLEOTIDIQUE CODANT POUR UNE ENZYME AYANT UNE ACTIVITE ACETOLACTATE SYNTHASE DE CICHORIUM
5 La présente invention se rapporte à des séquences nucléotidiques associées à une tolérance aux herbicides chez des plantes, en particulier du genre Cichorium.
La chicorée (Cichorium intybus) est une plante dont les premiers stades de développement sont lents. En effet, il ne lui faut pas moins de deux mois avant de couvrir le sol. La culture se trouve, alors, en compétition directe avec un 10 nombre important d'adventices, qui, durant cette période, présentent un développement très actif. En l'absence d'un herbicide efficace et sélectif de la chicorée, il est fréquent de devoir procéder à l'élimination des adventices restants par binage mécanique complété par un sarclage manuel qui engendrent un surcoût très important. 15 Si la sélectivité d'un herbicide par rapport à une plante se traduit par sa non toxicité (au moins pour la dose utilisée) envers cette dernière, la spécificité désigne, elle, les catégories de plantes susceptibles d'être détruites par ce produit, en un mot son spectre d'activité.
Un herbicide est donc d'autant plus efficace qu'il affiche une 20 sélectivité restreinte (au mieux la plante cultivée), une spécificité large et une persistance faible, non pénalisante pour les cultures ultérieures.
L'alternative est donc soit de mettre au point un herbicide nouveau, possédant les caractéristiques de spécificité et de sélectivité requises pour une plante donnée, soit de disposer d'une plante modifiée pour être tolérante à un herbicide 25 connu.
La seconde solution présente un avantage certain car elle permet d'éviter de mener l'ensemble des tests de toxicité nécessaires pour la mise sur le marché de ces produits.
L' acétolactate synthase (ALS) est la première enzyme de la voie de
30 biosynthèse des acides aminés branchés Val, Leu et Ile. Quatre classes d'herbicides inhibent cette enzyme, comprenant les imidazolinones, les triazolopyrimidine sulfoanilides, les pyrimidinylthiobenzoates et les sulfonylurées. Ces herbicides sont largement utilisés car ils
ont une efficacité importante (quelques grammes à l'hectare suffisent), un large spectre d'activité et une faible toxicité vis-à-vis des mammifères.
La chicorée n'est pas naturellement résistante aux inhibiteurs de l'ALS. Un objectif de la présente invention est d'obtenir des mutants de Cichorium intybus résistants au chlorsulfuron (herbicide appartenant à la classe des sulfonylurées), notamment par sélection in vitro de suspension cellulaire en contact prolongé avec l'herbicide. Il est généralement admis que si une résistance est liée à la mutation d'un gène « sauvage », celle-ci se réalise naturellement avec une probabilité de l'ordre de 10" à 10" dans des conditions de culture in vitro. Les analyses enzymatiques indiquent que l'acquisition de la tolérance est due à l'altération de la sensibilité de l'ALS vis-à-vis de ces inhibiteurs. L'inhibition de 50 % de l'activité ALS nécessite, chez le tolérant homozygote une dose de chlorsulfuron 570 fois supérieure à celle produisant le même effet chez le sensible (20-25nM). La sensibilité de l'ALS issue de la lignée tolérante vis-à-vis de Pimazaméthabenz est 125 fois plus faible (Northern Blot, figure 1). Par ailleurs, aucune surproduction de cette cible n'a été constatée. Cette altération de l'ALS se transmet de génération en génération, comme un caractère mendélien codé par un gène nucléaire unique. L'analyse du génome des chicorées tolérantes homozygotes confirme ce caractère monogénique. L'allèle tolérant « T », indifféremment désigné résistant dans ce texte, est semi-dominant, l'allèle sensible « s » est récessif ; un homozygote s/s est donc sensible à ces herbicides. L'activité spécifique de l'ALS tolérante aux sulfonylurées est diminuée par rapport à celle de plantes sensibles.
L'activité de l'ALS est connue pour être régulée négativement par les produits finaux, valine et leucine, de la voie de biosynthèse qu'elle initie. L'ALS extraite des chicorées tolérantes présente une diminution de la sensibilité (10 fois pour la leucine et 3 fois pour la valine) à ce rétrocontrôle. Ainsi une séquence nucléotidique selon l'invention code pour une ALS fonctionnelle dans le genre
Cichorium et présentant une affinité réduite pour les acides aminés leucine et valine.
Des travaux antérieurs ont montré que l' acétolactate synthase est une enzyme de 670 acides aminés. Deux régions de mutation confèrent une tolérance aux sulfonylurées chez différentes espèces, une première région A de l'ALS entre les positions 121 et 209 et une deuxième région B de l'ALS entre les positions 560 et
665 (Wright et al., 1998, et figure 6). Le document FR 2 765 240 décrit une mutation de l'ALS conférant une tolérance chez Cichorium entre les acides aminés 377 et 670 La résistance résulte chez Xanthium de la mutation en position 574 d'un Trp en Leu (Banasconi et al., 1995, et figure 6). En outre, au vu des travaux déjà réalisés par Dewaele sur l'ALS de
Cichorium (thèse de doctorat, 1997), le besoin demeure de connaître la séquence nucléotidique codant pour les acides aminés 1 à 376 de l'ALS, et la ou les mutations éventuelles qui confèrent la tolérance aux herbicides. Les inventeurs ont donc cherché à identifier la séquence complète de l'ALS fonctionnelle naturelle, et la séquence complète de l'ALS mutée par rapport à l'ALS naturelle, cette ou ces mutations conférant la résistance aux herbicides du type sulfonylurée et/ou imidazolinone.
A cet effet l'invention a pour objet selon un premier aspect une séquence nucléotidique isolée correspondant à SEQ ID N°l et codant pour une acétolactate synthase (ALS) fonctionnelle dans les plantes du genre Cichorium. La séquence en acides aminés déduite de la séquence nucléotidique SEQ ID N°l de l'ALS de cette espèce correspond à SEQ ID N°2.
L'invention concerne aussi une séquence nucléotidique choisie parmi : a) une séquence nucléotidique comportant au moins 70, notamment au moins 80% d'identité avec SEQ ID N°l ; b) une séquence nucléotidique complémentaire de la SEQ ID N°l ou d'une séquence définie en a) ou b) ou de la séquence ARN ; c) une séquence nucléotidique comprenant une séquence telle que définie en a), ou b) ; , ladite séquence définie en a), ou b) codant pour une ALS de séquence SEQ
ID N°2 ou une séquence polypeptidique fonctionnellement équivalente.
Par protéine ALS fonctionnellement équivalente on entend que les propriétés biologiques vis-à-vis des herbicides, plus spécialement aux sulfonylurées et aux imidazolinones, sont identiques ou très proches de l'ALS naturelle non mutée, soit en raison d'une absence de mutation, soit en présence éventuelle d'une mutation mais sans conséquence sur la sensibilité à ces herbicides.
Les inventeurs ont réussi à obtenir la séquence de l'ALS non mutée entre les acides aminés 103 et 670. La liste des séquences annexées correspond donc à des séquences à partir de l'acide aminé 103. Par exemple SEQ ID N°2 est numérotée de 1 à 568, ce qui correspond aux acides aminés 103 à 670 respectivement. Le décalage est donc de 102 acides aminés, ainsi la mutation en position 197 de l'ALS mutée citée par la suite se retrouve en position (197-102=95) sur SEQ ID N°2 (c'est à dire Pro pour l'ALS non mutée et Ser sur l'ALS mutée référencée SEQ ID N°4).
Par acide nucléique, séquence nucléique ou d'acide nucléique, polynucléotide, oligonucléotide, séquence de polynucléotide, séquence nucléotidique, termes qui sont employés indifféremment dans la présente description, on entend désigner un enchaînement précis de nucléotides, modifiés ou non, permettant de définir un fragment ou une région d'un acide nucléique, comportant ou non des nucléotides non naturels, et pouvant correspondre aussi bien à un ADN double brin, un ADN simple brin que des produits de transcription desdits ADNs. Ainsi, les séquences nucléiques selon l'invention englobent également les PNA (Peptid Nucleic Acid), ou analogues.
Il doit être compris que la présente invention ne concerne pas les séquences nucléotidiques dans leur environnement chromosomique naturel, c'est-à-dire à l'état naturel. Il s'agit de séquences qui ont été isolées et/ou purifiées, c'est-à-dire qu'elles ont été prélevées directement ou indirectement, par exemple par copie, leur environnement ayant été au moins partiellement modifié. On entend ainsi également désigner les acides nucléiques obtenus par synthèse chimique.
Par « pourcentage d'identité » entre deux séquences d'acides nucléiques ou d'acides aminés au sens de la présente invention, on entend désigner un pourcentage de nucléotides ou de résidus d'acides aminés identiques entre les deux séquences à comparer, obtenu après le meilleur alignement, ce pourcentage étant purement statistique et les différences entre les deux séquences étant réparties au hasard et sur toute leur longueur. On entend désigner par "meilleur alignement" ou "alignement optimal", l'alignement pour lequel le pourcentage d'identité déterminé comme ci- après est le plus élevé. Les comparaisons de séquences entre deux séquences d'acides nucléiques ou d'acides aminés sont traditionnellement réalisées en comparant ces séquences après les avoir alignées de manière optimale, ladite comparaison étant
réalisée par segment ou par « fenêtre de comparaison » pour identifier et comparer les régions locales de similarité de séquence. L'alignement optimal des séquences pour la comparaison peut être réalisé, outre manuellement, au moyen de l'algorithme d'homologie locale de Smith et Waterman (1981, Ad. App. Math. 2 : 482), au moyen de l'algorithme d'homologie locale de Neddleman et Wunsch (1970, J. Mol. Biol. 48: 443), au moyen de la méthode de recherche de similarité de Pearson et Lipman (1988, Proc. Natl. Acad. Sci. USA 85 : 2444), au moyen de logiciels informatiques utilisant ces algorithmes (GAP, BESTFIT, BLAST P, BLAST N, FASTA et TFASTA dans le Wisconsin Genetics Software Package, Genetics Computer Group, 575 Science Dr., Madison, WI). Afin d'obtenir l'alignement optimal, on utilise de préférence le programme BLAST, avec la matrice BLOSUM 62. On peut également utiliser les matrices PAM ou PAM250.
Le pourcentage d'identité entre deux séquences d'acides nucléiques ou d'acides aminés est déterminé en comparant ces deux séquences alignées de manière optimale dans laquelle la séquence d'acides nucléiques ou d'acides aminés à comparer peut comprendre des additions ou des délétions par rapport à la séquence de référence pour un alignement optimal entre ces deux séquences. Le pourcentage d'identité est calculé en déterminant le nombre de positions identiques pour lesquelles le nucléotide ou le résidu d'acide aminé est identique entre les deux séquences, en divisant ce nombre de positions identiques par le nombre total de positions comparées et en multipliant le résultat obtenu par 100 pour obtenir le pourcentage d'identité entre ces deux séquences.
Par séquences nucléiques présentant un pourcentage d'identité d'au moins 80 %, de préférence 85 % ou 90 %, de façon plus préférée 95 % voire 98 %, après alignement optimal avec une séquence de référence, on entend désigner les séquences nucléiques présentant, par rapport à la séquence nucléique de référence, certaines modifications comme en particulier une délétion, une troncation, un allongement, une fusion chimérique et/ou une substitution, notamment ponctuelle, et dont la séquence nucléique présente au moins 80 %, de préférence 85 %, 90 %, 95 % ou 98 %, d'identité après alignement optimal avec la séquence nucléique de référence. Il s'agit de préférence de séquences dont les séquences complémentaires sont susceptibles de s'hybrider spécifiquement avec les séquences de référence. De
préférence, les conditions d'hybridation spécifiques ou de forte stringence seront telles qu'elles assurent au moins 80 %, de préférence 85 %, 90 %, 95 % ou 98 % d'identité après alignement optimal entre l'une des deux séquences et la séquence complémentaire de l'autre. Une hybridation dans des conditions de forte stringence signifie que les conditions de température et de force ionique sont choisies de telle manière qu'elles permettent le maintien de l'hybridation entre deux fragments d'ADN complémentaires. A titre illustratif, des conditions de forte stringence de l'étape d'hybridation aux fins de définir les fragments polynucléotidiques décrits ci-dessus, sont avantageusement les suivantes.
L'hybridation ADN- ADN ou ADN-ARN est réalisée en deux étapes : (1) préhybridation à 42°C pendant 3 heures en tampon phosphate (20 mM, pH 7,5) contenant 5 x SSC (1 x SSC correspond à une solution 0,15 M NaCl + 0,015 M citrate de sodium), 50 % de formamide, 7 % de sodium dodécyl sulfate (SDS), 10 x Denhardt's, 5 % de dextran sulfate et 1 % d'ADN de sperme de saumon ; (2) hybridation proprement dite pendant 20 heures à une température dépendant de la taille de la sonde (i.e. : 42°C, pour une sonde de taille > 100 nucléotides) suivie de 2 lavages de 20 minutes à 20°C en 2 x SSC + 2 % SDS, 1 lavage de 20 minutes à 20°C en 0,1 x SSC + 0,1 % SDS. Le dernier lavage est pratiqué en 0,1 x SSC + 0,1 % SDS pendant 30 minutes à 60°C pour une sonde de taille > 100 nucléotides. Les conditions d'hybridation de forte stringence décrites ci-dessus pour un polynucléotide de taille définie, peuvent être adaptées par l'homme du métier pour des oligonucléotides de taille plus grande ou plus petite, selon l'enseignement de Sambrook et al., (1989, Molecular cloning : a laboratory manual. 2nd Ed. Cold Spring Harbor).
Grâce aux techniques décrites plus loin dans la demande qui permettent de mesurer l'activité ALS, l'homme du métier dispose des données appropriées pour identifier directement sans effort excessif les acides nucléiques correspondant aux homologies mentionnées ci-dessus. Par ailleurs, les inventeurs effectuant le clonage de 85% du gène de l'ALS à partir de l'acide aminé 103 ont identifié une mutation ponctuelle conférant la résistance aux sulfonylurées de la lignée étudiée.
Jusqu'à présent la séquence du gène de l'ALS chez la chicorée entre les acides aminés 103 et 377 n 'était pas connue. Ainsi, selon un deuxième aspect l'invention concerne une séquence nucléotidique isolée caractérisée en ce qu'elle correspond à SEQ ID N°3 et code pour une acétolactate synthase (ALS) mutée présentant au moins une mutation dans la région des acides aminés 103 à 377 de l'ALS, la ou lesdites mutations conférant à la plante une résistance à un herbicide. Aucune mutation conférant ladite résistance chez la chicorée n'avait pour l'heure été identifiée et ce résultat très utile a été obtenu par les inventeurs grâce aux travaux non évidents pour l'homme du métier décrits plus loin. L'invention concerne aussi une séquence nucléotidique isolée d'une plante du genre Cichorium choisie parmi : a) une séquence nucléotidique correspondant à SEQ ID N°3 b) une séquence nucléotidique comportant au moins 80% d'identité avec SEQ ID N°3 c) une séquence nucléotidique complémentaire de la SEQ ID N°3 ou d'une séquence définie en b) ou de la séquence ARN d) une séquence nucléotidique comprenant une séquence telle que définie en a), b) ou c) ; et en ce qu'elle code pour une acétolactate synthase mutée présentant au moins une mutation dans la région des acides aminés 103 à 377 de l'ALS, la ou lesdites mutations conférant à la plante une résistance à un herbicide.
Dans la suite de la description on désignera par le terme séquence nucléotidique mutée une séquence nucléotidique codant pour une ALS mutée c'est à dire conférant la tolérance (indifféremment désignée résistance) à ces herbicides. Une telle séquence mutée est typiquement homologue d'au moins 80% à la séquence non mutée.
En séquençant l'ALS de plusieurs individus sensibles et tolérants, les inventeurs ont en effet démontré qu'une même mutation ponctuelle était retrouvée en même position sur la chaîne polypeptidique, en position 197, conférant à la plante une résistance ou augmentant très fortement la résistance aux herbicides testés.
Selon un mode de réalisation préféré, la mutation en position 197 est une mutation Proline vers Serine. L'herbicide est choisi parmi les sulfonylurées, les imidazolinones.
Toutefois, toute mutation fonctionnellement équivalente (en particulier du fait de la modification de structure de l'ALS due à la substitution de la proline) fait également partie de l'invention. L'homme du métier connaissant une telle modification d'acide aminé en position 197 en déduit la modification correspondante sur la séquence nucléotidique.
En outre, l'invention concerne aussi une séquence nucléotidique isolée d'une plante du genre Cichorium comportant au moins 80% et typiquement au moins 90,95,98,99 % d'identité avec SEQ ID N°3, ladite séquence codant pour une ALS mutée présentant au moins une mutation dans la région des acides aminés 103 à 670, la ou lesdites mutations conférant à la plante une résistance aux herbicides, plus spécialement aux sulfonylurées et/ou aux imidazolinones. Selon un autre aspect l'invention concerne une séquence nucléotidique qui est un fragment représentatif d'une séquence nucléotidique, de l'ALS naturelle décrite précédemment.
Selon un autre aspect l'invention concerne une séquence nucléotidique qui est un fragment représentatif d'une séquence nucléotidique de l'ALS mutée décrite précédemment. Par fragment représentatif d'une séquence nucléotidique de l'ALS mutée on entend selon une première réalisation une séquence nucléotidique utilisable comme amorce pour l'identification et/ou la sélection de plantes du genre Cichorium résistantes à un herbicide sulfonylurée ou imidazolinone, d'une longueur d'au moins 10 bases, typiquement d'au moins 20 bases, et apte à amplifier une séquence nucléotidique mutée décrite précédemment.
Par fragment représentatif d'une séquence nucléotidique de l'ALS mutée on entend selon une deuxième réalisation une séquence nucléotidique utilisable comme sonde pour l'identification et/ou la sélection de plantes du genre Cichorium tolérantes à un herbicide sulfonylurée ou imidazolinone, et apte à s'hybrider avec une séquence nucléotidique mutée décrite précédemment.
Une sonde ou amorce se définit, au sens de l'invention, comme étant un fragment d'acide nucléique simple brin ou un fragment double brin dénaturé, et
possédant une spécificité d'hybridation dans des conditions déterminées pour former un complexe d'hybridation avec un acide nucléique cible.
Selon une réalisation, les sondes et amorces selon l'invention sont marquées directement ou indirectement par un composé radioactif ou non radioactif, afin d'obtenir un signal détectable et/ou quantifiable. Le marquage des amorces ou des sondes selon l'invention est réalisé typiquement par des éléments radioactifs ou par des molécules non radioactives. Parmi les isotopes radioactifs utilisés, on peut citer le P, le P, le S, le H ou le I. Les entités non radioactives sont sélectionnées parmi les ligands tels la biotine, l'avidine, la streptavidine, la digoxygénine, les haptènes, les colorants, les agents luminescents tels que les agents radioluminescents, chémoluminescents, bioluminescents, fluorescents, phosphorescents.
L'invention vise également les acides nucléiques susceptibles d'être obtenus par amplification à l'aide d'amorces selon l'invention.
Les polynucléotides de l'invention mentionnés précédemment peuvent ainsi être utilisés comme amorce et/ou sonde dans des procédés mettant en oeuvre notamment la technique de PCR (amplification en chaîne par polymérase) (Rolfs et al., 1991, Berlin : Springer-Nerlag) . Cette technique nécessite le choix de paires d'amorces oligonucléotidiques encadrant le fragment qui doit être amplifié. On peut, par exemple, se référer à la technique décrite dans le brevet américain U.S. Ν° 4,683,202. Les fragments amplifiés peuvent être identifiés, par exemple après une électrophorèse en gel d'agarose ou de polyacrylamide, ou après une technique chromatographique comme la filtra-ion sur gel ou la chromatographie échangeuse d'ions, puis séquences. La spécificité de l'amplification peut être contrôlée en utilisant comme amorce les séquences nucléotidiques de polynucléotides de l'invention comme matrice, des plasmides contenant ces séquences ou encore les produits d'amplification dérivés. Les fragments nucléotidiques amplifiés peuvent être utilisés comme réactifs dans des réactions d'hybridation afin de mettre en évidence la présence, dans un échantillon biologique, d'un acide nucléique cible de séquence complémentaire à celle desdits fragments nucléotidiques amplifiés. D'autres techniques d'amplification de l'acide nucléique cible peuvent être avantageusement employées comme alternative à la PCR, méthodes dites PCR-like à l'aide de couple d'amorces de séquences nucléotidiques selon l'invention. Par PCR-
like on entend désigner toutes les méthodes mettant en œuvre des reproductions directes ou indirectes des séquences d'acides nucléiques, ou bien dans lesquelles les systèmes de marquage ont été amplifiés. Ces techniques sont bien entendu connues, en général il s'agit de l'amplification de l'ADN par une polymérase. Il existe actuellement de très nombreux procédés permettant cette amplification, comme par exemple la technique SDA (Strand Displacement Amplification) ou technique d'amplification à déplacement de brin (Walker et al., 1992, Nucleic Acids Res. 20 : 1691), la technique TAS (Transcription-based Amplification System) décrite par Kwoh et al. (1989, Proc. Natl. Acad. Sci. USA, 86, 1173), la technique 3SR (Self- Sustained Séquence Replication) décrite par Guatelli et al. (1990, Proc. Natl. Acad. Sci. USA 87: 1874), la technique NASBA (Nucleic Acid Séquence Based Amplification) décrite par Kievitis et al. (1991, J. Virol. Methods, 35, 273), la technique TMA (Transcription Mediated Amplification), la technique LCR (Ligase Chain Reaction) décrite par Landegren et al. (1988, Science 241, 1077), la technique de RCR (Repair Chain Reaction) décrite par Segev (1992, Kessler C. Springer Nerlag, Berlin, New- York, 197-205), la technique CPR (Cycling Probe Reaction) décrite par Duck et al. (1990, Biotechniques, 9, 142), la technique d'amplification à la Q-béta-réplicase décrite par Miele et al. (1983, J. Mol. Biol., 171, 281). Certaines de ces techniques ont depuis été perfectionnées. Dans le cas où le polynucléotide cible à détecter est un ARNm, on utilise avantageusement, préalablement à la mise en oeuvre d'une réaction d'amplification à l'aide des amorces selon l'invention ou à la mise en œuvre d'un procédé de détection à l'aide des sondes de l'invention, une enzyme de type transcriptase inverse afin d'obtenir un ADNc à partir de l'ARNm contenu dans l'échantillon biologique. Il s'agit en l'occurrence de l'ARNm de l'ALS de l'échantillon de plante analysé. L'ADNc obtenu servira alors de cible pour les amorces ou les sondes mises en oeuvre dans le procédé d'amplification ou de détection selon l'invention. On peut ainsi utiliser les techniques de RT-PCR, de PCR quantitative.
Concernant l'utilisation de sondes, la technique d'hybridation de sondes peut être réalisée de manières diverses (Matthews et al, 1988, Anal. Biochem., 169, 1- 25). La méthode la plus générale consiste à immobiliser l'acide nucléique extrait des cellules de différents tissus ou de cellules en culture sur un support désigné support
d'immobilisation (tel que la nitrocellulose, le nylon, le polystyrène) et à incuber, dans des conditions bien définies, l'acide nucléique cible immobilisé avec la sonde. Après l'hybridation, l'excès de sonde est éliminé et les molécules hybrides formées sont détectées par la méthode appropriée (mesure de la radioactivité, de la fluorescence ou de l'activité enzymatique liée à la sonde).
Selon une réalisation particulière, les sondes nucléiques selon l'invention peuvent être utilisées comme sondes de capture. Dans ce cas, une sonde, dite « sonde de capture », est immobilisée sur un support et sert à capturer par hybridation spécifique l'acide nucléique cible obtenu à partir de l'échantillon biologique à tester et l'acide nucléique cible est ensuite détecté grâce à une seconde sonde, dite « sonde de détection », marquée par un élément facilement détectable.
Selon un autre aspect l'invention concerne un support sur lequel sont immobilisées les sondes ou amorces mentionnées précédemment, de manière covalente ou non covalente. En particulier, le support peut être une puce à ADN ou un filtre à haute densité.
On entend désigner par puce à ADN ou filtre haute densité, un support sur lequel sont fixées des séquences d'ADN, chacune d'entre elles pouvant être repérée par sa localisation géographique. Ces puces ou filtres diffèrent principalement par leur taille, le matériau du support, et éventuellement le nombre de séquences d'ADN qui y sont fixées.
On peut fixer les sondes ou amorces sur des supports solides, en particulier les puces à ADN, par différents procédés de fabrication. En particulier, on peut effectuer une synthèse in situ par adressage photochimique ou par jet d'encre. D'autres techniques consistent à effectuer une synthèse ex situ et à fixer les sondes sur le support de la puce à ADN par adressage mécanique, électronique ou par jet d'encre. Ces différents procédés sont bien connus de l'homme du métier.
Une séquence nucléotidique (sonde ou amorce) selon l'invention permet donc la détection et/ou l'amplification de séquences nucléiques spécifiques. En particulier, la détection de ces séquences est facilitée lorsque la sonde est fixée sur une puce à ADN, ou à un filtre haute densité.
Selon un autre aspect, l'invention concerne un polypeptide à activité acétolactate synthase de séquence SEQ ID N°4 comprenant la mutation en position
197, ou un fragment dudit polypeptide, et codé par une séquence nucléotidique mutée telle que décrite précédemment. Un tel polypeptide ou fragment est un polypeptide constitué de la séquence SEQ ID N° 4 ou d'une séquence possédant au moins 80 % d'identité, de préférence au moins 85 %, 90 %, 95 %, 98 % et 99 % d'identité avec la SEQ ID N° 4 après alignement optimal, et possédant la mutation en position 197. Par polypeptide dont la séquence d'acides aminés présentant un pourcentage d'identité d'au moins 80 %, de préférence d'au moins 85 %, 90 %, 95 %, 98 % et 99 % après alignement optimal avec une séquence de référence, on entend désigner les polypeptides présentant certaines modifications par rapport au polypeptide de référence, comme en particulier une ou plusieurs délétions, troncations, un allongement, une fusion chimérique, et/ou une ou plusieurs substitutions. Parmi les polypeptides dont la séquence d'acides aminés présente un pourcentage d'identité d'au moins 80 %, de préférence d'au moins 85 %, 90 %, 95 %, 98 % et 99 % après alignement optimal avec les séquences SEQ ID N° 4 ou avec l'un de leurs fragments selon l'invention, on préfère les polypeptides variants codés par les séquences nucléotidiques variantes telles que précédemment définies, en particulier les polypeptides dont la séquence d'acides aminés présente au moins une mutation correspondant notamment à une troncation, délétion, substitution et/ou addition d'au moins un résidu d'acide aminé par rapport aux séquences SEQ ID N°4 ou avec l'un de leurs fragments.
Selon encore un autre aspect, l'invention concerne un procédé d'obtention d'une plante Cichorium résistante à un herbicide sulfonylurée ou imidazolinone comprenant la sélection de plantes comprenant au moins une mutation dans la région 103 à 670, notamment 103 à 377 de l' acétolactate synthase, plus spécialement une mutation en position 197.
L'invention concerne selon un autre aspect un procédé de détection qualitative d'une plante du genre Cichorium tolérante à un herbicide sulfonylurée ou imidazolinone comprenant une étape de mise en évidence dans une plante testée d'une séquence nucléotidique mutée (mutation en position 197 de l'ALS) telle que décrite précédemment.
Selon une réalisation ce procédé comprend les étapes suivantes:
a) éventuellement, isolement de l'ADN à partir de l'échantillon biologique à analyser, ou obtention d'un ADNc à partir de l' ARN de l'échantillon biologique ; b) amplification spécifique de l'ADN isolé à l'aide d'au moins une amorce telle que décrite précédemment ; c) mise en évidence des produits d'amplification.
Selon un mode de réalisation, cette détection peut être effectuée à l'aide d'amorces, correspondant à des fragments situés respectivement de part et d'autre de la mutation identifiée caractéristique de la tolérance ou résistance.
L'invention concerne selon un autre aspect un procédé d'obtention dans le cadre d'un programme de sélection classique d'une plante du genre Cichorium résistante à un herbicide sulfonylurée ou imidazolinone comprenant la sélection de plantes comprenant au moins une mutation dans la région 103 à 670, notamment 103 à 377, de F acétolactate synthase, plus spécialement une mutation en position 197.
Selon un autre aspect, l'invention concerne un procédé de distinction d'une plante sensible homozygote (s/s), d'une plante homozygote (T/T) ou hétérozygote (T/s) tolérante aux herbicides du groupe des sulfonylurées et des imidazolinones. Selon une réalisation, ce procédé de distinction comprend une étape dans laquelle on met en évidence à partir d'ADN extrait d'une plante que l'on veut tester, la présence, sur un ou deux allèles, d'une séquence nucléotidique mutée (mutation conférant la tolérance/résistance) selon l'invention. La distinction entre ces individus permet aux sélectionneurs d'améliorer de manière très avantageuse les schémas de sélection en aval.
Selon une variante ce procédé de distinction comprend l'analyse des allèles du gène de l'ALS, permettant de distinguer l'allèle sensible (non muté en position 197), de l'allèle résistant (muté en position 197). Selon une réalisation on utilise une méthode SSCP ou analogue. Les outils de type kit ou analogue capables de mettre en œuvre ces méthodes, notamment avec des réactifs nécessaires à une amplification PCR, font également partie de l'invention.
Selon une variante ce procédé de distinction comprend le dosage de l'activité enzymatique de l'ALS en présence d'herbicide et notamment plus particulièrement de sulfonylurée, le niveau d'activité de l'ALS étant directement corrélé au génotype de l'individu. Selon une réalisation en présence de 26,6 nM de chlorsulfuron,
l'activité enzymatique résiduelle est de l'ordre de 30% pour les individus homozygotes sensibles, de l'ordre de 60 à 70%> pour les hétérozygotes tolérants, et de l'ordre de 100% pour les homozygotes tolérants.
Une enzyme codée par les séquences mutées selon l'invention, possédant une affinité diminuée pour la fixation d'herbicides du groupe des sulfonylurées et des imidazolinones, appelée dans ce qui suit ALS-, est également comprise dans l'invention.
Une cellule végétale comprenant une séquence nucléotidique telle que définie précédemment, avec les éléments nécessaires à l'expression de ladite séquence et/ou comprenant une enzyme ALS-, constitue un autre objet de l'invention.
Une telle cellule a une concentration en leucine, isoleucine et valine augmentée par rapport à la concentration de ces acides aminés dans une cellule sauvage ; ceci résulte de la diminution de sensibilité de l'ALS- au rétrocontrôle par ces acides aminés. Cette cellule végétale de préférence contient au moins une partie du génome du genre Cichorium, en particulier de Cichorium intybus.
Une souche de chicorée Witloof (Cichorium intybus L. var Witloof) tolérante aux sulfonylurées et/ou aux imidazolinones a pu être obtenue.
En l'absence de tout agent mutagène, des cals tolérants au chlorsulfuron, initiés à partir de suspensions cellulaires, ont été sélectionnés sur milieu de culture renfermant 28 nM de chlorsulfuron (dose létale pour les chicorées non-sélectionnées). Ces derniers ont permis la régénération de plantes fertiles capables de supporter des doses d'herbicides 1500 à 2000 fois supérieures pour les individus tolérants homozygotes, et 300 fois supérieures pour les individus hétérozygotes. En l'absence d'herbicide, aucun coût consécutif à l'acquisition de la tolérance n'est mesurable, tant sur le développement végétatif, que sur les potentialités reproductrices de la lignée tolérante.
L'invention a donc également pour objet une plante qui contient une séquence nucléotidique mutée telle que définie ci-dessus, une enzyme ALS- ou une cellule végétale contenant les éléments explicités précédemment, ladite plante étant tolérante aux herbicides du groupe des sulfonylurées et des imidazolinones.
L'invention a également pour objet un procédé de désherbage de plantes à l'aide d'un herbicide inhibant l'enzyme ALS, dans lequel la plante comporte une séquence nucléotidique mutée telle que définie précédemment codant pour une enzyme ALS-, une enzyme ALS- ou une cellule telle que définie ci-dessus.
Les exemples qui suivent sont destinés à illustrer l'invention. Dans ces exemples on se référera aux figures suivantes : Figure 1 : A : Comparaison des teneurs en protéine ALS chez les souches sauvages (S) et tolérante (T). La quantité de protéines totales déposées dans chaque condition est indiquée en μg.
B : Comparaison de l'activité transcriptionnelle chez les souches sauvages (S) et tolérante (R).
Analyse en Northern blot de l'expression de l'ARN messager correspondant à l'ALS de lignée de chicorées sensibles et tolérantes. L'ARN total a été extrait et 10 μg de chaque échantillon ont été soumis à électrophorèse, transférés sur une membrane nylon et révélés par un fragment d'ALS de chicorée marqué au
32P.
Figure 2 : Inhibition de l'activité enzymatique ALS extraite de plantes sensibles, tolérantes et hétérozygotes (femelle sensible x mâle tolérant), par le chlorsulfuron. Les valeurs sont exprimées comme en pourcentage des contrôles non traités, et représentent la moyenne des résultats obtenus dans trois expériences indépendantes.
Figure 3 : Effet de concentration croissante d'imadazolinone- imazaméthabenz sur l'activité ALS extraite de chicorées de type sauvage et tolérantes au chlorsulfuron. Les valeurs, exprimées en pourcentage des contrôles non traités, sur la moyenne des résultats obtenus avec deux préparations enzymatiques différentes.
Figure 4 : Conséquence de la mutation sur le rétrocontrôle de l'ALS par les acides aminés branchés. La sensibilité d'ALS extraite de chicorées tolérantes au chlorsulfuron et de type sauvage à l'inhibition par rétrocontrôle par chacun des trois amino acides branchés a été évaluée en mesurant l'activité enzymatique en présence de concentration croissante d'isoleucine, de leucine et de valine. Les résultats,
exprimés comme pourcentage de contrôles non traités, sont les moyennes de données obtenues dans trois expériences indépendantes.
Figure 5 : Polymorphisme intraspécifique : comparaison de séquences entre fragments de gènes codant pour l'ALS, issues de lignées sensibles et tolérantes de Cichorium intybus (nt 309 à nt 2015, soit 85%» du gène codant pour l'ALS).
Séquence nucléotidique et prédiction de la séquence en acides aminés de l'acétolactate synthase de Cichorium intybus issue de génotypes sensibles (S) et tolérants (T) aux sulfonylurées. Les nucléotides identiques sont indiqués par un tiret.
Le positionnement des amorces ALS-L1 et ALS-R1 correspond aux séquences nucléotidiques sur fond gris. Ces amorces ont servi à obtenir la partie 5' du gène de l'ALS.
Les séquences nucléotidiques des amorces ALS-L2 et ALS-R2 sont encadrées. Ces amorces ont servi à obtenir la partie 3' du gène de l'ALS.
Les séquences nucléotidiques des amorces ALS-L3 et ALS-R3 utilisées pour différencier les individus sensibles des individus tolérants homozygotes et hétérozygotes par la technique SSCP sont soulignées
Figure 6 : Polymorphisme interspécifique.
Alignement portant sur 85% de la séquence en acides aminés déduite de la séquence nucléotidique de l'ALS de Cichorium intybus avec les 11 séquences protéiques d'ALS les plus proches issues de différentes espèces végétales. L'alignement des séquences est réalisé à l'aide du logiciel d'alignement de séquences CLUSTALW Network Protein Séquence @nalysis (IBCP, France), disponible sur Internet.
Région A et Région B : Régions à mutations conférant une tolérance aux sulfonylurées chez différentes espèces végétales (Wright et al., Weed Sci. 46, 13-23, 1998)
Figure 7 : Comparaison de deux méthodes (dosage de l'activité enzymatique de l'ALS et analyse SSCP) qui permettent de distinguer chez Cichorium intybus des individus homozygotes sensibles (s/s), homozygotes tolérants (T/T) et hétérozygotes tolérants (T/s) aux sulfonylurées sur 44 plantes F2 traitées aux sulfonylurées et le parent sensible MS8 de la descendance F2.
1) Principaux résultats obtenus chez Cichorium intybus L. var Witloof On décrit successivement tout d'abord : exemple 1 : l'obtention d'une lignée naturelle résistante au chlorsulfuron exemple 2 : une méthode de caractérisation de la résistance au chlorsulfuron exemple 3 : l'isolement de la séquence de l'ALS mutée exemple 4 : une méthode de distinction des individus sensibles et tolérants aux sulfonylurées
Exemple 1 : Obtention d'une lignée résistante au chlorsulfuron
De jeunes plantules issues de germination aseptique d'akènes ont été utilisées pour obtenir cette lignée. Les cotylédons sont lacérés et déposés sur milieu liquide statique jusqu'à obtention d'expiants calogènes. Puis ces explants sont placés en milieu liquide sous agitation. Ces explants sont retirés au fur et à mesure des repiquages jusqu'à ce qu'il ne reste qu'une suspension hétérogène (cellules et minicals). Ce n'est que lorsque les cultures sont stabilisées, avec un délai de 10-15 jours entre les repiquages, que la sélection peut commencer. Les cals et les cellules sont étalés sur un milieu gélose contenant l'herbicide, ainsi que sur un milieu non sélectif.
Après 30 à 40 jours de culture, les amas cellulaires non nécrosés en présence des herbicides sont repiqués sur un milieu de sélection de même composition. Cette opération est répétée jusqu'à ce qu'il soit possible de sélectionner des cellules capables de se multiplier normalement en présence d'herbicide. Ces cultures sont alors déposées sur un milieu sélectif avec des cellules témoins n'ayant jamais subi de pression de sélection de façon à comparer le comportement de souches sensibles ou supportant l'herbicide.
On produit ensuite des vitroplants en maintenant les cals sur les milieux d'induction jusqu'à ce qu'ils forment des nodules méristématiques puis en repiquant sur un milieu de développement des bourgeons. Les jeunes vitroplants une fois enracinés sont prélevés et repiqués en mini serres. On isole ainsi une souche RI
OK qui se développe normalement en présence de chlorsulfuron et de sulfométuron (herbicides de la famille des sulfonylurées)..
Exemple 2 : caractérisation de la résistance au chlorsulfuron 1. Matériels et Méthodes
- Matériel végétal RI OK
Des graines obtenues à partir de chicorée du type sauvage, homozygote résistant au chlorsurfuron (RI OK) et hétérozygote (obtenues par pollinisation de plantes de type sauvage avec du pollen RI OK) ont été stérilisées en surface pendant 15 min dans une solution aqueuse de chlorure mercurique à 0,1%), rincées trois fois à l'eau distillée stérile et mises à germer sur des sels de Heller agarisés (Heller, 1953) contenant 20 g/1 de saccharose. Les plantules sont cultivées à 22 ± 1°C, sous un rythme de 16 heures de jour (250 μE m-2 s-1 densité du fluide photo photosynthétique) et 8 heures de nuit. Après un mois, les plantes sont récoltées et utilisées pour l'extraction d' ARN et l'analyse enzymatique.
- Extraction d' acétolactate synthase et dosage
L'activité ALS a été extraite et dosée comme décrit par Forlani et al (Plant Growth Regul. 14, 203-209, 1994). En bref, 5 g de feuilles sont réduites en poudre dans de l'azote liquide et remises en suspension dans 5 ml.g-1 du tampon phosphate 50 mM (pH 7,5) contenant 0,5 mM dithiothréitol, 1 mM MgC12, 0,1 mM pyrophosphate de thiamine (TPP), 0,01 mM de dinucléotide flavine adénine (FAD), 20%) de glycérol et 2% (p/v) de polyvinyl polypyrrolidone. Après centrifugation pendant 20 minutes à 18 000 g, le surnageant est additionné de sulfate d'ammonium solide (70%) de la saturation) et centrifugé. Les culots sont dissous dans du tampon d'extraction à demi force et dessalés par passage à travers une colonne de Sephadex G25 (Pharmacia). L'activité enzymatique est mesurée comme la quantité d' acétolactate produite. Les aliquots correspondant à environ 5 pkat d'activité ALS sont mis à incuber jusqu'à 90 min à 35°C en présence de tampon phosphate potassium 20 mM (pH 7,5) pyruvate de sodium 40 mM, MgC12 1 mM, TPP 0,1 mM et FAD 0,01 mM. Après décarboxylation, catalysée à l'acide, de l'acétolactate en acétoïne, cette dernière est déterminée par colorimétrie. Des témoins sont effectués pour quantifier le bruit de fond. Les moyennes des activités spécifiques de l'ALS
sont calculées sur au moins cinq déterminations indépendantes sur des semis ayant une croissance uniforme, récoltés au même stade de développement. L'inhibition enzymatique a été estimée par addition de concentration croissante de chlorsulfuron, d'imazaméthabenz, d'isoleucine, leucine et valine au milieu de réaction ; trois mesures ont été effectuées pour chaque dosage. Chaque expérience a été répétée deux fois sur différentes préparations enzymatiques ; les moyennes des deux répétitions sont présentées, exprimées par un pourcentage des contrôles non traités. - Analyse par Northern blot
L'ARN total a été extrait et des aliquots de 10 μg ont été dénaturés et soumis à électrophorèse sur des gels d'agarose 1,5%, contenant 3% de formaldéhyde. Les gels sont transférés sur des membranes Hybond-N dans le tampon 20 X SSC. La sonde chicorée utilisée pour la détection du transcrit d'ALS a été générée par PCR, avec des amorces homologues à la séquence du gène sur A du tabac, comprenant les positions 1274 à 1295 et 1883 à 1902 (Mazur et al, Plant Physiol. 85, 1110-1117, 1987). Le fragment de 630 pb obtenu a été clone dans le vecteur PCRTM II (Invitrogene) utilisant des procédures de clonage classiques et séquence par la procédure de terminaison didéoxy (Sanger et al, 1977, Proc Natl. Acad. Sci. USA 74, 5463-5467, 1977). La sonde a été marquée au 32P en utilisant le kit T7-Quick-Prime (promega) selon les indications du fabricant. L'hybridation a été effectuée à 60°C. Les autoradiogrammes ont été analysés sur un densitomètre Microtek Color/GaryTM (Biorad) et les données traitées avec le programme Cricket GraphTM.
Exemple 3 : isolement de la séquence de 1 "ALS mutée, et identification d'une mutation en position 197 conférant la tolérance -Matériel végétal utilisé
Un croisement a été réalisé au sein de Cichorium intybus entre une chicorée industrielle mâle stérile génique sensible aux sulfonylurées (MS8, Ets FLORIMOND DESPREZ) et une chicorée endive de la lignée RI OK homozygote résistante aux sulfonylurées (Ets HOQUET Graines), le but étant de transférer le caractère pour la résistance aux sulfonylurées du cultigroupe endive vers celui des chicorées industrielles. Une descendance F2 a été obtenue et traitée aux sulfonylurées à raison de 30g/ha de Glean (70% de chlorsulfuron, Du Pont). A cette dose, théoriquement,
seules les plantes résistantes aux sulfonylurées survivent, qu'elles soient homozygotes ou hétérozygotes. Le matériel utilisé pour l'étude correspond aux plantes F2 ayant survécu au traitement. Comme contrôle, on utilise le génotype sensible MS8 parent de la descendance F2. -Isolement du gène codant pour l'ALS de Cichorium intybus a) Extraction de l'ADN génomique.
L'extraction d'ADN génomique de chicorée est réalisée à l'aide du « Dneasy plant mini kit » commercialisé par Qiagen. Cinquante mg de feuilles sont broyées et l'élution après passage sur colonne Qiagen se fait dans 2 x 100 μl de tampon. b) Obtention de la partie en 5' du gène par PCR.
La comparaison de séquences de gènes d'acétolactate synthase de différentes espèces végétales a permis de définir l'amorce dégénérée sens (ALS-Ll) dans une région conservée du gène.
Amorce sens (ALS-Ll) : 5'-CTCGTCGAAGCYCTKGARCG-3' où Y=C/T, K=G/T et R=G/A
La séquence antisens (ALS-Rl) a été déterminée à partir de la séquence partielle d'ALS de chicorée obtenue par Eric Dewaele, clone DCIALSEB32 (Acquisition de la résistance aux sulfonylurées chez une souche de chicorée (Cichorium intybus L. var. Witloof) et conséquences sur le métabolisme des acides aminés branchés, Thèse de Doctorat, Université des Sciences et Technologies de Lille, 1997).
Amorce antisens (ALS-Rl) :
5'-AAGCTTCAGCAAACTTCA-3' La PCR a été réalisée dans un volume final de 20 μl contenant 0,2 μM de chacune des 2 amorces ALS-Ll et ALS-Rl, 1 mM de MgCl2, 0,1 mM de dNTP, 1 ng d'ADN génomique de chicorée, 0,6 U de Taq polymérase Appligène (15 U/μl) et le tampon PCR x 1. Le mélange réactionnel a été incubé dans un thermocycler (PE 9600, Perkin Elmer) pendant 40 cycles comprenant pour chaque cycle 1 min de dénaturation à 94°C, 1 min d'hybridation à 52°C et 1 min d'élongation à 72°C. Deux PCR indépendantes ont été réalisées, l'une avec de l'ADN provenant d'une chicorée sensible (MS8) et l'autre avec de l'ADN provenant d'une chicorée tolérante aux
sulfonylurées de la descendance F2. L'électrophorèse sur gel d'agarose des produits de PCR a révélé une bande de 1,5 kb, correspondant à la taille attendue selon les alignements de séquence d'ALS de différentes espèces végétales. Les produits de PCR ont été purifiés à l'aide de colonnes Qiaquick et clones dans le vecteur pGEM-T Easy (Promega). Les bactéries E. coli JM109 (Promega) ont été transformées avec cette construction. Trois clones contenant de l'ADN de plante sensible et 8 clones contenant de l'ADN de la plante tolérante ont été séquences avec un séquenceur automatique d'ADN Licor (Lincoln, USA). Les réactions de séquence ont été réalisées selon la méthode de Sanger à l'aide du kit « ABI PRISM Dye Primer Cycle Sequencing Core Kit » (Perkin Elmer). Les amorces ont été marquées à 1TRD-800, composé fluorescent. c) Obtention de la partie en 3 ' du gène par PCR.
Les séquences des amorces sens (ALS-L2) et antisens (ALS-R2) ont été déterminées à partir de la séquence partielle d'ALS de chicorée obtenue par Eric Dewaele, clone DCIALSEB32.
Amorce sens (ALS-L2) :
5 '-CAGAGCCAAAATCGTTCACA-3 '
Amorce antisens (ALS-R2) :
5'-TTCATTCTGCCATCACCATC-3' Des réactions PCR indépendantes ont été réalisées avec les deux amorces
ALS-L2 et ALS-R2 sur de l'ADN provenant d'une chicorée sensible (MS8) et de 6 chicorées tolérantes F2, dans les mêmes conditions que précédemment mais pendant 30 cycles et à une température d'hybridation de 55°C. Les fragments de PCR obtenus de 850 pb, correspondants à la taille attendue, ont été clones dans le vecteur pGEM-T Easy. Deux clones contenant de l'ADN de plante sensible MS8 et 4 clones par plante tolérante F2 ont été séquences.
Exemple 4 : Méthodes de distinction chez Cichorium intybus des individus sensibles, homozygotes tolérants et hétérozygotes tolérants aux sulfonylurées a) Dosage colorimétrique de l'activité enzymatique résiduelle de l'ALS en présence de chlorsulfuron.
L'extraction et le dosage de l'activité de l'ALS ont été réalisés selon la méthode décrite dans l'exemple 2 sur des feuilles fraîches âgées d'un mois, b) Analyse du polymorphisme de l'ALS par SSCP. Principe : La méthode SSCP (Single Strand Conformation Polymorphism) permet de distinguer les allèles d'un gène lorsque ceux-ci présentent des différences ponctuelles au niveau nucléotidique. Elle implique l'amplification par PCR de fragments d'ADN et l'analyse des fragments d'ADN dénaturés sur un gel de polyacrylamide non dénaturant. Chaque séquence primaire a une structure tridimensionnelle unique et va migrer à une vitesse qui lui est propre. La sensibilité de la détection de la mutation est élevée car un changement d'une base suffit à altérer la mobilité du brin d'ADN.
Les séquences des amorces sens (ALS-L3) et antisens (ALS-R3) ont été déterminées à partir de la séquence nucléotidique présentée Figure 5. Elles permettent l'amplification théorique d'un fragment de 310 pb comprenant le site muté chez les individus tolérants. Amorce sens (ALS-L3) : 5'-CTAACCCGGTCAAGCATCAT-3' Amorce antisens (ALS-R3) : 5 ' -CGGAAGAGGCGAGATGAAA-3 ' Des réactions PCR ont été réalisées avec les deux amorces ALS-L3 et ALS-
R3 et l'ADN des plantes sur lesquelles le test biochimique a été fait, dans les mêmes conditions que dans l'exemple 3 b) « Obtention de la partie en 5' du gène par PCR » mais avec une température d'hybridation de 55°C. Les fragments d'ADN amplifiés ont ensuite été dénaturés pendant 5 min à 94°C en présence de formamide. Environ 1/10e de la réaction PCR a été déposé sur gel de polyacrylamide non dénaturant -gel de 0,75 mm d'épaisseur et de 20 cm de long, MDE x0,5 (TEBU)-. L'électrophorèse a été réalisée à une température de 10°C dans des cuves Protean Ilxi (Biorad) avec du tampon TBE x0,6 (Tris-borate-EDTA). Le temps de séparation est de 3000 Vh pour un fragment de 300 pb. Après migration, les bandes ont été révélées au nitrate d'argent selon la méthode de Bassam et al. (Anal. Biochem. 196, 80-83, 1991).
2. Résultats et discussion
- Tolérance à l'herbicide :
Les premiers éléments pris en considération sont la quantité d'ARN messager- ALS et le niveau d'activité spécifique ALS. Les expériences de Northern blot effectuées avec aussi bien des plantes sensibles que résistantes n'ont pas montré de différence substantielle entre les deux lignées (figure 1). Au contraire, l'analyse enzymatique a révélé une différence significative quant à l'activité spécifique ALS, qui est de 12,2 +/- 1,1 pkat.mg-1 de protéine totale dans le type sauvage et 7,9 +/- 0,8 pkat.mg-1 de protéine dans les plantes résistantes. Ces résultats excluent la possibilité que la résistance soit dérivée partiellement ou complètement d'une augmentation du taux d'ALS. On peut noter que malgré une diminution de 35% de l'activité enzymatique spécifique, les plantes résistantes ne montrent pas de réduction ou d'altération de caractéristiques végétatives ou reproductives. Etant donné que le niveau d'ARNm n'est pas modifié, une explication possible pour cette réduction pourrait être la survenue d'une mutation affectant la stabilité de l'enzyme.
- Comparaison de la sensibilité in vitro au chlorsulfuron entre des ALS provenant de chicorées résistantes aux herbicides et sensibles :
L'activité ALS homozygotes de plantes résistantes et sensibles a été dosée en présence de concentrations croissantes de chlorsulfuron. Les résultats ont montré que l'ALS de plantes résistantes n'est pas inhibée jusqu'à des concentrations en herbicide de l'ordre du micromolaire, alors que celle provenant de plantes sauvages était déjà affectée par des taux nanomolaires (figure 2). La concentration requise pour inhiber 50% de l'activité ALS de plantes résistantes est de 12 μM, alors que la DI50 pour l'enzyme de plantes du type sauvage est de 0,021 μM, correspondant à une différence de 570 fois. Des comportements différents de façon si marquée suggèrent fortement une sensibilité diminuée de l'ALS à l'effet inhibiteur du chlorsulfuron comme déterminant de la tolérance sélectionnée.
L'ALS a également été extraite de chicorée hétérozygote obtenue par pollinisation de plantes de type sensible avec du pollen RI OK, et l'activité enzymatique a été mesurée en présence de l'herbicide. Les résultats montrent un profil biphasique intermédiaire entre les profils de type sauvage et homozygote
résistant (figure 2), indiquant la présence concurrente d'une forme d'ALS résistante avec une forme sensible, et que le caractère de résistance au chlorsulfuron est hérité de manière semi-dominante.
L'enzyme résistant au chlorsulfuron montre une tolérance croisée envers l'herbicide imidazolinone : imazaméthabenz.
L'activité ALS respectivement des types sauvage et résistant a été mesurée en présence de concentrations croissantes d'imazaméthabenz. Comme on le voit sur la figure 3, l'activité ALS de plantes résistantes n'a pas été affectée à des concentrations allant jusqu'à 10 μM, la DI50 étant d'environ 200 μM, alors que pour l'ALS provenant de plantes de type sauvage, l'activité a été inhibée à 50%) à 1,8 μM. Sélectionnée initialement pour sa résistance au chlorsulfuron, la lignée RI OK apparaît ainsi dotée d'une activité ALS qui est aussi 125 fois plus résistante à un herbicide appartenant à une autre classe d'inhibiteurs d'ALS. Dans le mutant de chicorée, la différence dans le niveau de résistance au chlorsulfuron et à l'imazaméthabenz est apparemment en accord avec l'existence d'un site unique de mutation avec des domaines de fixation spécifiques se recouvrant.
- Sensibilité au rétrocontrôle de l'ALS par la leucine et la valine.
Les acides aminés à chaîne ramifiée modulent leur propre synthèse en inhibant de façon coopérative la première enzyme de leur voie de biosynthèse. L'activité ALS a ainsi été mesurée dans des extraits provenant de plantes de type sauvage et RI OK en présence de concentrations croissantes de valine, leucine, ou isoleucine. Comme on s'y attendait, la valine et la leucine diminuent de façon marquée l'activité de l'ALS provenant du type sauvage avec des taux d'inhibition similaires (DI50 environ 1 mM) alors que l'isoleucine, qui contrôle le flux de carbone à travers sa voie au niveau de la thréonine désaminase est substantiellement inefficace (DI50 supérieure à 100 mM ; figure 4). Quand l'activité résistante au chlorsulfuron extraite de chicorée RI OK a été examinée, elle a été trouvée significativement moins sensible à l'effet inhibiteur de la valine (DI50 = 3 mM), ou encore plus de la leucine (DI50 aux environs de 10 mM ; figure 4). Il est donc probable que la forme résistante de l'ALS de la lignée RI OK résulte d'un ou
plusieurs événements mutationnels qui concernent à la fois le site de fixation aux herbicides et le domaine impliqué dans le rétrocontrôle par la valine et la leucine.
Cette diminution de sensibilité au rétrocontrôle (10 fois pour la leucine, et 3 fois pour la valine) se traduit par une augmentation des teneurs en valine (+140%>) et leucine (+80%>) libres dans ces plantes, comme cela apparaît sur le tableau suivant :
Teneur exprimée en nmol.g-1 de matière fraîche
Acide aminé Sensible Tolérant
Valine 10,1 ± 1,4 24,3 ± 1,8
Leucine 9,0 ± 1,9 16,0 ± 1,6
Isoleucine 6,9 ± 1,1 8,2 ± 1,2
Total (20 aa) 1502 1600
- Isolement du gène codant pour l'ALS
Les séquences nucléotidiques globales obtenues (partie 5' et 3' du gène) et les séquences en acides aminés déduites, de l'ALS de chicorée sensible et tolérante aux sulfonylurées, sont présentées Figure 5. Seul 85% du gène est représenté, du nucléotide 309 au nucléotide 2015. Il manque les 308 premiers nucléotides en 5', la partie du gène de l'ALS en 3' est complète et va jusqu'au codon STOP. La séquence d'ALS de chicorée contient cependant les deux régions A et B en entier (Figure 6) où ont été répertoriées les mutations conférant une tolérance aux sulfonylurées chez d'autres espèces végétales (Wright et al., Weed Sci. 46, 13-23, 1998). Au niveau nucléotidique, la seule différence entre allèles sensibles et tolérants se situe en position 591 où une Cytosine (C) pour l'allèle sensible est mutée en Thymine (T) pour l'allèle tolérant, ce qui entraîne au niveau acide aminé un changement d'une proline (P) en serine (S) en position 197. Cette mutation obtenue chez la chicorée est
localisée dans le domaine A contenant les sites de mutations connus conférant la tolérance aux sulfonylurées chez d'autres espèces végétales.
Au niveau protéique, la séquence d'ALS de chicorée a été alignée avec celles d'autres plantes (Figure 6). La séquence d'ALS la plus proche de la chicorée est celle de laitue. On retrouve d'ailleurs cette substitution au même endroit (position 197) chez Lactuca sativa (Eberlein et al., Weed Sci. 47, 383-392, 1999) et L. seriola (Guttieri et al., Weed Sci. 40, 670-678, 1992) mais la proline (P) chez l'individu sensible est mutée en histidine (H) chez l'individu tolérant homozygote. Par contre, on retrouve exactement la même mutation d'une (P) en (S) conférant la tolérance aux sulfonylurées au même endroit (position 197) chez le tabac (Harms et al., 1992) et chez A. thaliana (Haughn et al., 1988) qui sont cependant plus éloignés d'un point de vue botanique de la chicorée que la laitue.
Par ailleurs, on peut noter que le gène de l'ALS de chicorée ne contient pas d'intron tout comme les gènes d'ALS d'Arabidopsis thaliana, de Bassia scoparia, de betterave, de Brassica napus, du coton, de la laitue et du tabac. Il semblerait que ce soit le cas pour tous les gènes d'ALS.
- Dosage colorimétrique de l'activité enzymatique résiduelle de l'ALS en présence de chlorsulfuron.
Le dosage de l'activité enzymatique résiduelle de l'ALS en présence de 26,6 nM de chlorsulfuron permet de déterminer le génotype des individus. En effet, sur 44 plantes F2 traitées aux sulfonylurées et le parent MS8 sensible dont l'activité enzymatique résiduelle de l'ALS a été dosée, un individu homozygote sensible (s/s) présente en moyenne 29,5% ± 0,71 d'activité enzymatique résiduelle de l'ALS, un individu hétérozygote tolérant (T/s) 63% ± 4 et un individu homozygote tolérant (T/T) 103%) ± 3,6 (Figure 7). Il est à noter que la plante F2 n°ll bien qu'ayant survécue au traitement aux sulfonylurées apparaît d'après ce test homozygote sensible (s/s) avec une activité résiduelle de l'ALS de 30%.
- Analyse du polymorphisme de l'ALS par SSCP L'analyse sur gel SSCP des fragments provenant de 44 plantes F2 traitées aux sulfonylurées et du parent sensible MS8 (mêmes plantes analysées que dans l'exemple 4 a) « Dosage colorimétrique de l'activité enzymatique résiduelle de
l'ALS en présence de chlorsulfuron ») montre qu'un individu sensible (s/s) présente toujours une bande unique (correspondant aux allèles sauvages bb), l'individu tolérant homozygote (T/T) montre également une bande unique (correspondant aux allèles mutés aa) mais à un niveau de migration différent de la première et l'individu tolérant hétérozygote (T/s) montre deux bandes correspondant à celle de la plante sensible et de la plante tolérante homozygote (correspondant aux allèles ab) (Figure 7). Il est à noter que la plante F2 n°l l bien qu'ayant survécue au traitement aux sulfonylurées apparaît d'après ce test homozygote sensible (s/s) car elle a les deux allèles bb. Remarque : la plante F2 n°l 1 a un génotype homozygote sensible (s/s) quelle que soit la méthode de détection utilisée. Elle a « échappé » au traitement au Glean, ceci peut-être dû à une mauvaise répartition de l'herbicide.
Les expériences biochimiques (dosage colorimétrique de l'activité résiduelle de l'ALS) et moléculaires (analyse SSCP) sont parfaitement corrélées et permettent de déterminer sans ambiguïté le génotype au locus ALS. La substitution nucléotidique d'un C en T en position 591 de la séquence présentée Figure V est donc responsable de la résistance aux sulfonylurées de la lignée RI OK.
La méthode moléculaire présente un certain nombre d'avantages par rapport à la méthode enzymatique : elle est sûre, plus rapide, peut être réalisée sur des individus âgés et l'ADN peut être extrait à partir de feuilles séchées. Ce test moléculaire peut être réalisé en routine sur un grand nombre d'individus.
BIBLIOGRAPHIE
Bassam, B.J. et al.:"Fast and sensitive silver staining of DNA in polyacrylamide gels" Anal. Biochem., Vol. 196, 1991, Pages 80-83.
Bernasconi, P. et al.: "A naturally occurring point mutation confers broad range tolérance to herbicides that target acétolactate synthase" J. Biol. Biochem., Vol. 270, 1995, Pages 17381-17385.
Dewaele, E.: " Acquisition de la résistance aux sulfonylurées chez une souche de chicorée (Cichorium intybus L. var. Witloof) et conséquences sur le métabolisme des acides aminés branchés" Thèse de Doctorat, Université des Sciences et Technologies de Lille, 1997.
Eberlein, C.V. et al.: "Physiological conséquences of mutation for ALS-inhibitor résistance" Weed Sci., Vol. 47, 1999, Pages 383-392.
Guttieri, M.J. et al.:"DNA séquence variation in Domain A of the acétolactate synthase gènes of herbicide-résistant and -susceptible weed biotypes" Weed Sci., Vol. 40, 1992, Pages 670-678.
Harms, C.T. et al.: "Herbicide résistance due to amplification of a mutant acetohydroxyacid synthase gène" Mol. Gen. Genêt., Vol. 233, 1992, Pages 427-435.
Haughn, G.W. et al.:"Transformation with a mutant Arabidopsis acétolactate synthase gène renders tobacco résistant to sulfonylurea herbicides" Mol. Gen. Genêt, Vol. 211, 1988, Pages 266-271.
Wright, T.R. et al. : "Biochemical mechanism and molecular basis for ALS- inhibiting herbicide résistance in sugarbeet (Beta vulgaris) somatic cell sélections" Weed Sci., Vol. 46, 1998, Pages 13-23.