Édit du 3 juillet 1315
Titre | Affranchissement des serfs dans le domaine royal. |
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Pays | Royaume de France |
Type | Édit |
Législature | Royaume de France (dynastie capétienne) |
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Promulgation | Le par Louis X le Hutin |
Par l'édit du 3 juillet 1315, le roi de France Louis X dit le Hutin affirme que « selon le droit de nature, chacun doit naître franc » et que « par tout notre royaume les serviteurs seront amenés à franchise ». D'où la maxime « nul n'est esclave en France »[1],[2],[3] et l'énonciation « le sol de la France affranchit l'esclave qui le touche »[4]. Cet édit abolit ainsi le servage (du mot latin servus, esclave) dans le domaine royal.
Contexte
[modifier | modifier le code]Le court règne du roi Louis X, de 1314 à 1316, est marqué par des conflits à la fois intérieurs (comme des révoltes paysannes) et extérieurs : Louis X cherche à financer une guerre contre les Flamands. La vente aux serfs de leur affranchissement représente justement une source de liquidités. Les fonds obtenus par l'affranchissement en masse étaient d'ailleurs moins laborieux à collecter que les taxes telles que la mainmorte et le formariage[5].
Contenu
[modifier | modifier le code]Version du Dictionnaire de Brillon ainsi que de l'Académie royale de Belgique
[modifier | modifier le code]Édit du 3 juillet 1315[6],[7] | |
«
Louis, par la grâce de Dieu, roi de France et de Navarre, à nos amés et féaux... |
Version de Charles-Jean-François Hénault & Antoine Étienne Fantin-Desodoards
[modifier | modifier le code]Édit du 3 juillet 1315[8] | |
« Comme, selon le droit de nature, chacun doit naître franc, et comme la servitude moult nous déplaît, considérant que notre royaume est dit et renommé le royaume des Francs, et voulant que la chose, en vérité, soit d'accord avec le nom, avons ordonné et ordonnons à tous lieux, villes et communautés et personnes singulièrement et généralement, que par tout notre royaume les serviteurs seront amenés à franchise. » |
Version de Louis Dussieux
[modifier | modifier le code]Lettres de Louis X portant que les serfs du domaine du roi seront affranchis moyennant finance - À Paris, le 3 juillet 1315[9] | |
Louis, par la grâce de Dieu roi de France et de Navarre, à nos améz et féaus maître Saince de Chaumont et maître Nicolle de Bravy, salut et dilection. |
Portée et limites
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Il convient d'interpréter avec prudence les « formules de style » (« par tout nostre royaume », « franchise soit donnée à bonnes et convenables conditions »...) rédigées par les scribes royaux[5] :
Comme indiqué dans la version de Louis Dussieux, l'affranchissement des serfs dans l'édit du 3 juillet 1315 concerne seulement le domaine royal (représentant en 1314 environ les 3/4 du Royaume de France[10]), et dans un premier temps exclusivement le bailliage de Senlis (correspondant essentiellement aux départements actuels de l'Oise et du Val-d'Oise)[11],[12],[13],[14].
L'exécution de l'ordonnance royale fut soumise aux commis Nicolas de Braye et Saince de Chaumont. Le même jour, le roi Louis X soumet une ordonnance analogue, cette fois-ci aux clercs royaux Philippe de Convers et Michel Mauconduit, pour l'affranchissement du bailliage de Vermandois[5] (correspondant à une partie de l'actuel département de l'Aisne)[15],[16].
Par ailleurs, la formulation que « franchise soit donnée à bonnes et convenables conditions » signifiait que l'affranchissement avait un prix, d'ailleurs jugé parfois si excessif qu'un bon nombre de serfs préférèrent rester dans leur ancienne condition. D'où l'ordonnance du 5 juillet 1315 par laquelle Louis X ordonne une taxation forcée pour les serfs refusant de racheter leur affranchissement[17],[18].
D'après Jean-Marie Carbasse, « même si cet acte n’était pas totalement désintéressé, même s’il n’a concerné, en pratique, que les serfs du domaine royal, il reste que le principe de la liberté personnelle était fermement rappelé, et fondé sur le droit naturel. »[19]
L'édit est consacré en 1571 lorsqu'un tribunal de Bordeaux affranchit des esclaves Noirs au motif que la France « mère des libertés » ne tolère pas la pratique esclavagiste sur son sol[20],[21],[22].
Sources et références
[modifier | modifier le code]- Maurice Block, Dictionnaire général de la politique, 1867
- André Dupin, Réquisitoires, plaidoyers, et discours de rentrée, Paris, 1842
- Alexandre Ledru-Rollin, Journal du Palais : recueil le plus ancien et le plus complet de la jurisprudence française, Paris, 1840
- Désiré Dalloz, Jurisprudence générale du Royaume - Recueil Périodique et critique de législation, de doctrine et de jurisprudence, Paris, Dalloz, 1840
- Marc Bloch, Rois et Serfs. Un chapitre d'histoire capétienne, 1922, p. 761
- Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique, Bulletins de l'Académie Royale des Sciences, des Lettres et des Beaux-Arts de Belgique, Volumes 20 à 22, Bruxelles, Hayez, 1853
- Pierre-Jacques Brillon & Antoine-François Prost de Royer, Dictionnaire de jurisprudence et des arrêts, Lyon, Aimé de la Roche, 1781-1788
- Charles-Jean-François Hénault & Antoine Étienne Fantin-Desodoards, Nouvel abrégé chronologique de l'histoire de France contenant les événements de notre histoire depuis Clovis jusqu'à la mort de Louis XIV. Les guerres, les batailles, les sièges, &c., Paris, Prault, 1785-1788
- Louis Dussieux, L'Histoire de France racontée par les Contemporains (complete -Tome 1, 2, 3 & 4), 1861
- « FRANCE Prior to the Start of the 100 Years's War, 1314 », sur Wikimedia Commons, (consulté le ) : « Cf. Cate de la France en 1314 (domaine royal en orange) »
- Cf. Chanoine Afforty, Baillis : Observations sur les baillis et Baillis de Senlis (transcription du texte original par Amédée Margry), dans : Comité Archéologique de Senlis, Comptes-rendus et Mémoires, année 1881, Senlis 1882, 380 p. ; p. 1-119 ; Lire sur Gallica ; et Amédée Margry, Nouvelles recherches sur les origines des Grandes Baillies Royales, dans : Comité Archéologique de Senlis, Comptes-rendus et Mémoires, années 1897-98, Senlis 1899, 318 p. ; p. 105-156 ; Lire sur Gallica. Les quatre suites du travail paraissent dans les volumes : 1902 (p. 102-185), 1905 (p. 141-212), 1906 (p. 195-268) et 1908 (p. 181-273). Cette volumineuse étude de Margry porte sur les bailliages et les baillies en général.
- Damien de Templeux, Description du Beauvaisis où sont les Bailliages de Beauvais, Clermont et Senlis., 1640
- Voir Bailliage et sénéchaussée : 30 Beauvais + 63 Chaumont-en-Vexin + 202 Senlis
- Voir VEXIN, Beauvais, C. BEAUMONT, Senlis (DR), C. Clermont, C. de VERMANDOIS sur la carte La France en 1180
- Jean-Baptiste de Buridan, Les Coustumes générales du bailliage de Vermandois en la cité, ville, banlieue et prevosté... de Laon et les particulières de Ribemont, Sainct Quentin, Noyon et Coucy, Reims, Nicolas Hécart, 1630
- Voir Bailliage et sénéchaussée : 171 Saint-Quentin + 212 Soissons + 227 Laon
- Firmin Didot, L'univers: histoire et description de tous les peuples, 1845
- Émilien Carou, Le Paupérisme: Ses Causes, Moyens de le Prévenir, de le Soulager ou de le Réduire, Paris, 1879
- Jean-Marie Carbasse, Droit naturel et droits de l’homme, Presses universitaires de Grenoble, 2011
- Érick Noël, L'esclavage dans la France moderne, 2007 - Extrait disponible sur Cairn.info
- Sylvie CHALAYE, Éric DEROO, Dominic THOMAS, Mahamet TIMERA, Pascal BLANCHARD, Alain MABANCKOU, La France noire, 2012
- Université Rennes-II, Louis X, 23/05/2016